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Probable nomination d’un vice-président de la République : Risque de conflit de compétences
Publié le vendredi 2 avril 2021  |  Gabon Review
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© Autre presse par DR
Les membres du gouvernement Issoze Ngondet II
Composé de 38 membres dont 9 ministres d’Etat, 16 ministres et 13 ministres délégués. Photo: Vice-Président de la République : M. Pierre-Claver MAGANGA MOUSSAVOU
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En tressant des couronnes de lauriers au coordonnateur général des Affaires présidentielles, le président de la République l’a renforcé. Or, en décidant de procéder au remplacement de Pierre-Claver Maganga-Moussavou, il s’est, théoriquement, résolu à mettre en œuvre le mécanisme de suppléance délégative prévu à l’article 14d de la Constitution.

Tout le monde en parle. Partout, les spéculations vont bon train. Se fondant sur une arithmétique ethnique d’arrière-garde, s’appuyant sur une « géopolitique » surannée, s’essayant à une analyse du rapport de force sociologique, chacun dresse le portrait-robot du prochain vice-président de la République. Au nombre des personnalités citées, on compte René Ndemezo’Obiang, Séraphin Ndaot Rembogo, Guy Nzouba-Nadama, Jean de Dieu Moukagni-Iwangou ou Guy-Bertrand Mapangou. Au-delà de la diversité des trajectoires, ce beau monde se retrouve sur un point : avoir été au service du régime incarné par Ali Bongo. C’est dire si cette nomination n’aura rien d’une « coupure épistémologique » , pour reprendre la notion chère à Louis Althusser. C’est aussi dire si elle participera, au mieux, d’une redistribution des cartes et, au pire, d’une opération de recyclage.

Confusion au sommet de l’Etat

Pourtant, d’aucuns se réjouissent de cette régularisation annoncée. En leur entendement, la nomination d’un vice-président de la République relève d’une exigence constitutionnelle. Et tant pis si, entre 2009 et 2016, elle resta vide sans susciter les protestations de la Cour constitutionnelle. Tant pis si le champ d’intervention de ce haut personnage de l’Etat n’a jamais été circonscrit. Tant pis si, en leur for intérieur, les populations le tiennent pour un « factotum », selon le mot de Pierre Mamboundou. Surtout, dans un contexte où le coordonnateur général des Affaires présidentielles gagne en influence. Comment faire cohabiter une personnalité chargée de suppléer « le président de la République dans les fonctions que celui-ci lui délègue » avec une autre censée « assister le président de la République dans la conduite de toutes les affaires de l’Etat et veiller à la stricte application de ses décisions » ?

De toute évidence, l’arrivée d’un vice-président de la République va en rajouter à la confusion au sommet de l’Etat. En tressant des couronnes de lauriers au coordonnateur général des Affaires présidentielles, le président de la République l’a renforcé. Or, en décidant de procéder au remplacement de Pierre-Claver Maganga-Moussavou, il s’est, théoriquement, résolu à mettre en œuvre le mécanisme de suppléance délégative prévu à l’article 14d de la Constitution. En pratique, il a pris le risque de créer un conflit de compétences. Comment se répartiront les tâches ? Quelle place pour le directeur de cabinet et ses adjoints ? Fort des dispositions constitutionnelles, le vice-président de la République aura-t-il préséance ? Le coordonnateur général des Affaires présidentielles s’en laissera-t-il conter ? Déjà, dans sa dernière interview chez nos confrères de Jeune Afrique, Ali Bongo affirme avoir « toute confiance » en son fils.

Peu disert sur le fonctionnement des institutions

Certes, la fonction de vice-président de la République est gravée dans le marbre de la Constitution. Certes, celle de coordonnateur général des Affaires présidentielles existait sous Omar Bongo. Les deux furent même occupées synchroniquement sans trop de dégâts. Mais il se faut se garder des parallèles hasardeux. Ayant été reprofilée, la fonction occupée par Noureddin Bongo Valentin n’a rien de comparable à celle jadis assumée par Jean-Pierre Lemboumba Lepandou. De plus, à cette époque-là, le cabinet du président de la République n’était pas omnipotent. Même si ce n’était pas la gouvernance à la scandinave, le gouvernement et les autres institutions faisaient illusion. Mieux, de par leurs parcours respectifs, le vice-président de la République et le coordonnateur général des Affaires présidentielles d’alors avaient une idée certaine du fonctionnement de l’Etat. Est-ce le cas aujourd’hui ? Si on peut en douter, l’avenir nous fixera.

Ali Bongo dit privilégier l’« efficacité collective» sur les « questions de personnes.» Il affirme avoir « besoin de (…) personnes qui pensent et agissent différemment. » Il soutient même vouloir « changer d’organisation ». Mais il se montre peu disert sur le fonctionnement des institutions. Quel respect pour la hiérarchie des normes quand une fonction créée par décret peut en imposer à une autre, consacrée par la Constitution ? Quelle garantie de séparation des pouvoirs quand on place des personnalités nommées au même niveau, voire au-dessus, d’élus du peuple ? Quelle égalité en droit quand on légifère en opportunité, quitte à faire du sur-mesure ? Quelle responsabilité quand famille et politique se confondent ? Ou quand vie publique et vie privée s’entremêlent ? S’il doit trouver sa place, le prochain vice-président de la République aurait intérêt à exiger une clarification. En tout cas, le décret de nomination ne suffira pas.
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