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Gabon : Depuis sa cellule, Bertrand Zibi écrit à Bento Pais
Publié le mercredi 17 mars 2021  |  Gabon Review
Bertrand
© Autre presse par DR
Bertrand Zibi Abeghe, un ex-député du parti au pouvoir
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Quelques semaines après avoir vu sa peine de 6 ans de prison confirmée par la cour d’appel judiciaire de Libreville, l’ancien député démissionnaire du Parti démocratique gabonais (PDG) à Minvoul, incarcéré à la prison centrale de Libreville, entre autres, pour détention illégale d’arme à feu, a récemment écrit à l’ambassadrice de l’Union européenne pour le Gabon, São Tomé-et-Principe et la CEEAC. Dans la lettre publiée intégralement ci-après, il lui raconte les tortures qu’il dit avoir subies et lui demande de le sortir de prison, non sans solliciter des sanctions contre le pouvoir en place. Lecture.

BERTRAND ZIBI ABEGHE Prisonnier Politique Gabonais.

Prison centrale de Libreville, le 11 mars 2021

Excellence Madame l’Ambassadrice Rosario Bento Pais,

C’est avec une joie immense que je vous écris cette lettre du fond de ma cellule à la Prison centrale de Libreville, où je croupis depuis la dernière élection présidentielle d’août 2016. J’ai été arrêté le 1er septembre 2016 après la longue nuit du bombardement du Quartier général du Président élu Jean Ping par un Commando, qui était conduit par Monsieur Leyinda Mathieu, alias Malone.

J’ai été, immédiatement, torturé, afin que j’avoue un supposé complot de coup d’Etat, une véritable machination montée de toutes pièces. D’après leur scénario, j’aurai réuni, à mon domicile, cinq (5) généraux des Forces de défense et neuf (9) individus. Des bandits instrumentalisés par eux-mêmes à qui j’aurai remis des armes de guerre et des uniformes militaires. Les procès-verbaux de cette infamie avaient déjà été écrits au préalable.

Mon refus d’accepter cette histoire nauséabonde m’a valu d’atroces tortures. Les neuf (9) bandits criminels, instrumentalisés par eux-mêmes, m’accusaient tous. Tous les faux procès-verbaux étaient, préalablement, écrits et il ne restait que mes aveux et ma signature. A la suite de mon refus catégorique de reconnaître cette infamie et de signer le procès-verbal, j’ai été gardé dans une cellule qui était en fait une fosse septique.

Ce projet de coup d’Etat n’a pas prospéré, parce que les dates mentionnées correspondaient à mon voyage en France et aux USA. Je n’étais pas au Gabon. Mais malgré mon innocence, j’avais subi les pires tortures.

Ensuite, j’ai été accusé d’une deuxième histoire aussi loufoque qu’invraisemblable. Un bandit, notamment connu des milieux judiciaires au Gabon, a été instrumentalisé par le pouvoir en place, pour m’accuser du fameux coup d’Etat, que j’aurai orchestré avec des criminels. D’après cet assassin, j’aurai participé à une séance de torture qu’il aura subie au quartier général du Président Jean Ping.

Malgré le fait que je n’avais jamais vu cet individu de ma vie et que je ne sache pas de quoi il parle. Malgré le témoignage de toutes les personnes citées dans cette affaire qui me disculpe. Tous les témoins cités par lui et son avocat m’ont tous innocenté. Aucun d’eux ne reconnait m’avoir vu ni de près ni de loin. Afin de m’accuser encore un peu plus, Mathieu Leyinda et son adjoint Darel Nze sont allés cacher une arme de guerre dans mon chantier.

Après une pseudo-fouille de cinq (5) minutes dans un vaste chantier, sieur Leyinda a retrouvé l’arme qu’il avait, au préalable, minutieusement, cachée dans mon chantier. L’arme trouvée dans mon chantier était une arme de guerre de type Kalachnikov avec un chargeur et cinq (5) balles à l’intérieur du chargeur.

Au tribunal, ce n’est plus la même arme qui est présentée au procès, le chargeur a disparu et il n’y a plus les cinq (5) balles. Savez-vous pourquoi ? Simplement parce que mon avocat de Paris et les autorités américaines (ma deuxième patrie) ont demandé l’expertise des pièces. Se sachant coincés, ils ont, tout simplement, fait disparaitre les preuves. Où est la justice dans tout cela ?

Excellence Madame l’Ambassadrice, mon histoire est similaire à celle de Suzanne dans la Sainte Bible au chapitre 13 du livre de Daniel, que je vous recommande vivement de lire.

Excellence Madame l’Ambassadrice, les Gabonais s’étonnent que depuis mon arrestation par les éléments de la Direction générale de la recherche (DGR) de la Gendarmerie nationale, mon dossier ne soit traité exclusivement (Gendarmerie nationale et Tribunal) que par des ressortissants d’une seule et même province à l’instar du Haut-Ogooué. Est-ce la seule province au Gabon qui a des compétences en matière judiciaire ? Pour ma part, je pense que non.

Excellence Madame l’Ambassadrice, je voudrais vous souligner que mes meilleurs amis sont du Haut-Ogooué, j’ai des enfants avec des femmes de cette charmante province, j’adore le peuple de cette formidable province et ses paysages sont féeriques.

Simplement que la dictature qui gère notre beau pays le Gabon depuis plus d’un demi-siècle a, malheureusement, pris cette belle province et tout son peuple en otage. D’ailleurs, c’est le Haut-Ogooué qui a payé le lourd tribut, en perdant ses plus valeureux fils. Des hommes qui faisaient la fierté de tout le Gabon et partant de toute l’Afrique. Je pense à Dieudonné Pascal Ndouna Okogo, dit Ndouna Dépénaud, au Lieutenant-Colonel Jean-Marie Djoué Dabany, à Alphonse Layigui Obeye, au Général Léon Ossiali Ongaye, au Capitaine Alexandre Mandza Ngokouta, à Aissa Toulekima, etc. Toutes ces personnes et bien d’autres sont tous morts, parce qu’elles voulaient le bien-être de tous les Gabonais.

Excellence Madame l’Ambassadrice, à la Prison centrale de Libreville, j’ai été plusieurs fois torturé en présence du Directeur de l’époque, le Général Paul Mitombo pour des faits totalement invisibles. Il disait agir au nom du Président Ali Bongo Ondimba.

La première fois, c’était à la suite d’un coup de fil passé par Carl Mihindou-Mi- Nzamba à son frère et ami Franck Ping, conversation interceptée par les services d’écoute de la Présidence de la République gabonaise. A la suite de ce coup de fil, qui ne me concernait en rien, j’ai été, sauvagement, torturé avec Carl et les autres résidents du quartier spécial « B », simplement parce que nous étions dans le même quartier. A la suite de cette mémorable bastonnade avec des gourdins, j’ai eu la clavicule fracturée. Faute de soins, la fracture a, malheureusement, mal cicatrisé. Je dois me faire opérer d’urgence, parce que cette partie du corps humain est très sensible.

Malgré cette fracture visible, à l’œil nu, je n’ai droit à aucun soin. Je n’ai même pas le droit de me rendre dans une structure hospitalière, pour y subir des examens et faire des radios. La deuxième torture et pas la dernière de ma série d’actes de torture à la Prison centrale de Libreville a été celle relative à la découverte de journaux de l’opposition (Echos du Nord, la Loupe, le Temps, Missamu, le Nganga, etc.). A la suite de cette découverte de simples journaux, mon nom avait été cité comme le propriétaire de ces journaux. Ce qui m’a valu non seulement une bastonnade mémorable, mais encore et surtout un changement de quartier. J’ai donc été envoyé au C/A, quartier des fous, où je suis resté près de quatre (4) ans.

Pourtant, la règle, à la Prison centrale, indique que celui sur qui on trouve l’objet saisi est puni. Dans le cas des journaux, j’ai payé un très lourd tribut. Avant Mitombo, les journaux étaient totalement autorisés à la Prison centrale de Libreville. C’est lui qui les a fait interdire, au point d’en faire un produit plus dangereux qu’une bombe atomique. Il ne faut surtout pas lire Echos du Nord, sous peine de vous voir torturer à mort.

Excellence Madame l’Ambassadrice, ma vie, depuis ma démission de mon poste de Député à Bolossoville en présence du Président Ali Bongo Ondimba, est devenue un véritable calvaire. Je suis persécuté à l’extrême.

Excellence Madame l’Ambassadrice, voici une preuve irréfutable de mon innocence. Le Ministre Francis Nkea Ndzigue, Avocat de profession et ancien Ministre de la Justice ; personnalité assermentée, ayant prêté serment non seulement devant le Président de la République, la Cour constitutionnelle, mais encore et surtout sur la Constitution de la République gabonaise, a affirmé devant plusieurs centaines de personnes, lors d’un meeting de la campagne électorale pour le compte de la Députation à Minvoul : « Ali Bongo Ondimba m’a nommé ministre de la Justice, pour que je sorte Bertrand Zibi Abeghe de prison. Il sortira bientôt, je vous le promets ». Cette vidéo de Francis Nkea Ndzigue à l’époque Ministre de la Justice est disponible sur (Youtube, Facebook, Whatsapp…).

Excellence Madame l’Ambassadrice, y aurait-il une preuve plus évidente et plus éloquente que cette vidéo de Nkea, qui parle clairement d’un complot politique ? Cette vidéo du ministre Nkea Ndzigue est une preuve irréfutable de mon innocence et de l’acharnement du régime dictatorial gabonais sur ma personne. NB. Je vous prie Excellence de regarder cette vidéo en présence d’un traducteur de l’ethnie Fang. Vous n’en croirez pas vos oreilles.

Excellence Madame l’Ambassadrice, d’autres faits et pas des moindres prouvent que nous sommes bien dans un complot politique ourdi par le pouvoir dictatorial gabonais. Comme en témoignent les propos d’une extrême gravité de sieur André Kemebiel (le bandit instrumentalisé par le pouvoir pour m’accuser). Il était longuement revenu sur le rôle qu’auraient joué Messieurs Arsène Emvouah (ancien aide de camp du Président Ali Bongo Ondimba), Luc Amvame, lui aussi ancien aide de camp du Président Ali Bongo Ondimba et surtout d’un certain Général du Mapane, Gaël Koumba Ayouné, d’après lui en présence de tous.

A la barre, il aurait affirmé que ces personnes auraient toutes joué un rôle déterminant dans son histoire. Comment des proches collaborateurs du Chef de l’Etat peuvent-ils être impliqués et associés à un personnage connu par toutes les Forces de l’ordre comme un multirécidiviste dans le milieu du grand banditisme ?

Autre chose curieuse et vraiment invraisemblable, Sieur André Kemebiel a le même avocat que le président de la République Ali Bongo Ondimba, en la personne de Sieur Aimery Bhongo-Mavoungou. Drôle de République.

Excellence Madame l’Ambassadrice, l’histoire récente de l’humanité nous enseigne qu’aucune dictature au monde n’a jamais perduré éternellement. Des exemples comme Nicolae Ceaușescu, en Roumanie, Saddam Hussein Abd al-Majid al-Tikriti, communément appelé Saddam Hussein, en Irak, Mouammar Kadhafi, en Lybie, Zine el-Abidine Ben Ali, en Tunisie, Mohammed Hosni Moubarak, en Egypte, Joseph-Désiré Mobutu au Zaire (République démocratique du Congo), Idi Amin Dada Oumee, en Ouganda, Jean-Bedel Bokassa, en Centrafrique, Blaise Compaoré au Burkina Faso, Yahya Jammeh, en Gambie…) n’ont pas réussi à vaincre leurs peuples respectifs malgré leur cruauté légendaire. La particularité de tous ces dictateurs est qu’ils se croyaient au-dessus de Dieu, le Créateur du Ciel et de la Terre.

Excellence Madame l’Ambassadrice, souvenez-vous du dictateur Francisco Franco, en Espagne. Il n’avait pas réussi à vaincre le peuple éternel d’Espagne. Tous ces dictateurs pouvaient, impunément, tailler sur mesure les Constitutions de leurs pays respectifs, tuer leurs populations et jouir de toutes les richesses.

Ils se prenaient tous pour des dirigeants indéboulonnables, voire des dieux vivants. La suite de leur fin de règne, nous la connaissons tous. Aujourd’hui, que reste-t-il de leurs noms ? De leurs familles ? Des nombreuses richesses volées et pillées à leurs peuples ? Rien du tout. «Vanité des vanités, tout est vanité», nous enseigne le livre de l’Ecclésiaste.

Alors, pourquoi autant de cruauté de la part du régime gabonais ? N’y a-t-il plus un seul sage au PDG pour dire stop ? Où sont les personnes sages du Haut-Ogooué, pour comprendre que ce régime entraîne, inexorablement, cette belle province et le Gabon dans un abîme ? Dans la famille Bongo, n’y a-t-il pas quelqu’un qui puisse comprendre que la voie empruntée par ce régime est une véritable impasse ?

Dieu merci, la belle province du Haut-Ogooué a quelques dignes fils et filles qui font la fierté de notre pays le Gabon, lesquels ont compris que ce qui se joue dans leurs terres et leur pays le Gabon est insupportable et inadmissible. Je rends, ici, un vibrant homme à ces dignes fils et filles du Gabon, qui, malgré toutes les menaces et intimidations, ont décidé de mettre le Gabon à l’abri de la peur. Je pense à Zacharie Myboto, Jean-Pierre Lemboumba Lepandou, Alfred Nguia Banda, Albert Yangari, François Banga Eboumi, Léon-Paul Ngoulakia, Chantal Myboto, Félix Bongo, Georges Bruno Ngoussi, Joël Ngouenini Ndzengouma, Isidore Djeno, Patrick Oyabi (génération Waze), Belinda Andjembe, Pascal Oyougou, Thibaut Adjatys, Greys Djenno, Joelle Mouho, Marcel Djabio, Gervais Amogho, Isaac John et surtout ce peuple altogovéen contraint au silence et tétanisé par la peur de cette dictature féroce et sanguinaire.

Excellence Madame l’Ambassadrice, je voudrais simplement retrouver ma petite fille adorée Zoé, que j’ai laissée à deux mois et qui est maintenant une grande jeune fille allant à l’école. Je voudrais retrouver mes adorables enfants, qui sont privés de l’amour de leur père depuis trop longtemps. Je voudrais revoir les visages radieux de tous mes frères et sœurs et de tous les membres de ma famille et de tous mes amis et connaissances. Je voudrais prendre dans mes bras ma chère Marie-Claire Akule Obounou, une femme exceptionnelle, qui m’a donné l’amour du travail, l’esprit de famille, le courage dans les épreuves, le sens élevé de l’honneur et l’intégrité. Je voudrais chérir ma compagne qui m’a toujours apporté tout son amour et toute son affection durant ces cinq (5) dernières années. Je voudrais voir vieillir ma chère mère Akele Obounou, elle qui a tout donné pour ses enfants. Je voudrais revoir le visage de mon beau-père Alain Gerland, ce Français qui a abandonné sa France natale, pour venir vivre au Gabon avec sa charmante épouse Madame ma mère. Je voudrais revoir mon village Bouth Engasse. Je voudrais aller fleurir la tombe de mon défunt père Gaston Abeghe Zibi, qui a été un homme d’une douceur incomparable et d’un sens élevé de la famille, un homme de paix et de consensus, le pilier sur lequel nous nous reposions.

Depuis mon arrestation et mon incarcération, plusieurs personnes, se disant être envoyées par Ali Bongo Ondimba, sont venues me voir, pour me proposer des postes de ministre dans différents gouvernements depuis 2017. Pourquoi s’acharner à me voir dans un gouvernement d’Ali Bongo Ondimba ? A la suite de mes différents refus de faire partie d’un quelconque gouvernement, mes conditions, en milieu carcéral, se sont durcies. Est-ce une obligation de faire partie du Gouvernement ? Pour ma part, je ne désire qu’une seule chose : que justice soit rendue et que je recouvre ma liberté et ma vie. Par ailleurs, des sommes d’argent importantes me sont aussi proposées. Non, merci, cet argent appartient au peuple gabonais. Il en a plus besoin que moi.

Excellence Madame l’Ambassadrice, vous êtes une femme de conviction, une femme dotée d’un courage exemplaire, une femme d’un charisme et d’un sens élevé de l’honneur. Je sais que vous craignez Dieu et surtout que vous êtes contre toute forme d’injustice et de dictature. Vous êtes issue d’une noble famille, qui a su résister à la dictature cruellement sanguinaire du despote Francisco Franco, qui avait été, pendant près de quarante (40) ans (1936-1975) un dictateur sans cœur. C’est pour cette raison que je garde espoir que vous ne m’abandonnerez pas dans les griffes de cette dictature sanguinaire et que vous ferez tout ce qui est de votre possible, pour me sortir de prison.

L’Union européenne et la Communauté internationale doivent m’aider. Je suis innocent et l’Union européenne doit aider le Gabon. Il faut que l’Union européenne commence à penser aux sanctions contre ce régime sanguinaire et cruel qui nous tue, viole et pille sans vergogne toutes les richesses du Gabon. L’Union européenne doit mettre en marche les accords de Cotonou.

Excellence Madame l’Ambassadrice, vous ne devez plus vous contenter des paroles mielleuses à l’endroit de ce gouvernement. Agissez, avant qu’il ne soit trop tard. Dans l’espoir que ma lettre trouve un écho favorable auprès de vous, soyez un ange gardien pour moi-même et tout mon peuple. Je vous prie de croire en mon profond respect.

Bertrand Zibi Abeghe

Mone Essabdzang ya Bouth-Engasse

Mone Ngone Essaboak ya Momo

Affectueusement appelé le Gnamoro, l’Ivounda, le Ndjim, le Ndombaba, l’Okoulou, le Djadji, le Ndoss, le NKounkouma, le Répé, Dibal, l’As des As, Zambe.

Que le Dieu miséricordieux veille, éternellement, sur notre pays le Gabon.
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