Cinq mois, jour pour jour, plus tard, il est peut-être temps de dresser le bilan. Il est urgent de se pencher sur les retombées économiques et sociales des mesures annoncées au soir du 13 mars dernier. En restreignant les libertés individuelles, en obligeant les entreprises à revoir leurs rythmes de travail, le gouvernement s’était placé devant un impératif cardinal : l’accroissement des dépenses d’intervention. En décrétant l’état d’urgence sanitaire, l’État s’était mis dans l’obligation de soutenir les ménages et les entreprises. De par le monde, de nombreux pays l’ont fait. En fonction de leurs moyens, ils ont mis en œuvre des plans d’accompagnement. Avec des fortunes diverses, ils ont apporté aide et assistance aux populations et/ou aux entreprises.
Impréparation, cupidité et irresponsabilité
De toute évidence, le gouvernement peine à relever les défis de la crise du coronavirus. Dépassé par les événements, il n’a pas su mettre en œuvre son propre train de mesures. Malgré une succession d’annonces, les choses sont allées en roue libre, toutes les initiatives s’étant soldées par de monumentaux fiascos. Ni la banque alimentaire, ni le soutien aux entreprises et encore moins le télé-enseignement n’ont été effectifs. Comme toujours, l’impréparation, la cupidité et l’irresponsabilité ont dicté leur loi. Sans évaluation ni études préalables, des promesses ont été faites. Cherchant à s’en mettre plein les poches, certaines personnalités ont préempté les marchés. Tout ceci a fait le lit des luttes d’influence et autres manœuvres déloyales, ouvrant la porte à une corruption généralisée. Au final, ni les populations ni les opérateurs économiques n’ont perçu les retombées des mesures annoncées à grand renfort médiatique.
Malgré le capharnaüm occasionné par la distribution des kits alimentaires, les pratiques n’ont guère changé. En dépit des cris de détresse de nombreux opérateurs économiques, singulièrement ceux du secteur tourisme et loisirs, rien n’a été fait pour corriger le tir. Faisant mine de ne rien voir, le gouvernement est resté droit dans ses bottes. Feignant de ne rien entendre, il a donné l’impression de poursuivre de desseins inavouables, d’agir pour lui-même et de n’avoir de compte à rendre à personne. Aujourd’hui encore, il demande à des populations éreintées par les difficultés quotidiennes de se soumettre à une restriction de toutes les libertés. Il exige des entreprises, mises à mal par la baisse d’activité, de souscrire au maintien de l’état d’urgence sanitaire. Pour ainsi dire, il s’attend à une obéissance aveugle à ses préconisations.
Questions et réponses froides
Loin de jouer les Cassandre, il faut quand même rappeler un principe de base : tôt au tard, quelqu’un devra bien répondre de tous ces manquements. Du moins, politiquement. Des questions reviendront alors en boucle. Le confinement était-il une nécessité vitale ? Fallait-il l’instaurer pour une durée aussi longue ? Notre pays était-il paré pour y faire face ? Ce remède n’est-il pas pire que le mal en lui-même ? En se posant ces questions, le gouvernement peut mieux apprécier la situation actuelle. En y apportant des réponses froides, il peut éventuellement esquisser des solutions plus adaptées. S’il n’entend pas lever le confinement dans les meilleurs délais, il doit mettre en œuvre un vrai plan d’accompagnement. Auparavant, il doit créer les conditions d’une adhésion des différentes couches sociales. Dans cette optique, il a le devoir de tirer les conséquences de ses récents échecs. Autrement dit, il doit faire la lumière sur la mise en œuvre des précédentes mesures, avant d’en proposer d’autres, décidées de façon consensuelle. L’enquête parlementaire en cours peut-elle y contribuer ? On peut raisonnablement le penser.
Pour l’heure, populations et opérateurs économiques semblent de plus en plus agacés par le maintien de l’état d’urgence sanitaire. N’en pouvant plus du couvre-feu ou des restrictions des libertés, les premières se sentent infantilisées. Ayant vu leurs dépenses de fonctionnement exploser du fait des précautions imposées (port des gants et du masque voire de tenues particulières pour les personnels, mise en place de dispositifs de lavage des mains, rotation des employés…), les seconds se disent condamnés à une mort certaine. Pour toutes ces raisons, un déconfinement incontrôlé est en cours par endroits. N’étant pas de nature à freiner la propagation du virus, cette initiative populaire entame la crédibilité d’un gouvernement visiblement coupé du réel.