Léandre Nzue a été assigné en justice devant le tribunal de Libreville après une saisine du Procureur de la République suite aux propos qu’il a tenus en juin dernier laissant supposer qu’il menait une politique clientéliste. Des propos qui, selon les juristes, sont passibles de sanctions pénales au titre de l’article 327 du Code pénal gabonais.
La plainte, enregistrée sous le n°833811906, a été déposée le 2 juillet dernier par un habitant de Libreville, Sylvestre Abessolo, choqué par les propos tenus par le maire de Libreville le 19 juin dernier à l’occasion d’une conférence de presse.
« … Je prépare déjà 2023, et je dois sécuriser les votes à Libreville. Je suis de Libreville. Pendant que je suis là, 2023, Ali Bongo ne va pas perdre à Libreville. Il va gagner ici et moi je suis à Libreville. (…) les gens que j’ai embauchés, ils se reconnaissent que s’ils ont du travail, c’est grâce à Ali Bongo, parce que moi je suis le représentant du Président Ali bongo ici. Est-ce que vous comprenez cela ? […] Je suis en train de vous dire que moi, moi Léandre Nzue, Maire de Libreville, je suis de Libreville (…) et les personnes qui ont été embauchées, c’est vrai que c’est moi qui les ai embauchées, mais elles considèrent que c’est Ali Bongo qui leur a donné du travail, et ça me fait un électorat sûr », avait déclaré Léandre Nzue.
Selon le plaignant, de tels propos révéleraient « de faits pouvant constituer une infraction prévue et punie à l’article 327 du Code pénale ». Lequel article dispose que quiconque « par libéralités en argent ou en nature, par des promesses de libéralités, de faveurs, d’emplois ou d’autres avantages particuliers, faits en vue d’influencer le vote d’un ou de plusieurs électeurs, a obtenu ou tenté d’obtenir leur suffrage, soit directement, soit par l’entremise d’un tiers (…) par les mêmes moyens, a déterminé ou tenté de déterminer un ou plusieurs d’entre eux à s’abstenir (…) a, en vue d’influencer le vote d’un collège électoral, ou d’une fraction de ce collège, fait des dons ou libéralités, des promesses de libéralités ou de faveurs administratives, soit à une commune, soit à une collectivité quelconque de citoyens » est susceptible d’être puni de trois ans d’emprisonnement et d’une amende de 5.000.000 FCFA.
L’auteur de la plainte a indiqué que sa démarche était avant tout républicaine. « Les propos du maire ne sont pas concevables. Il était important, dès lors, d’en informer le Procureur, ce que permet le droit gabonais. C’est une attitude civique, républicaine que de dénoncer des faits susceptibles de convenir à la loi », a déclaré Sylvestre Abessolo.
Son initiative a en tout cas été accueillie favorablement par nombre d’ONG. « C’est la preuve que la Justice gabonaise, souvent décriée à tort à l’extérieur, fonctionne », commente un professeur de droit de l’UOB, la principale université du pays.
Contactée par La Libreville, la mairie de la capitale n’a pas souhaité à ce stade faire de commentaire.
Dans le camp présidentiel, les propos de Léandre Nzue ont été sévèrement jugés. Depuis près d’un an, le Palais du Bord de mer a fait de la lutte contre la corruption et autre comportement déviant de la part des décideurs publics l’une de ses priorités. Priorités que les propos du maire de Libreville viennent heurter de manière frontale.