L’ancien hiérarque du Parti démocratique gabonais (PDG) est décédé dans la nuit du 8 au 9 avril courant. Secrétaire général du PDG entre 1994 et 2008, il vivait ces dernières années reclus et affaibli par la maladie. Délaissé par la formation politique qu’il avait remodelée et dynamisée, il avait, sous la houlette de Guy Nzouba Ndama, battu campagne à Lastoursville pour Jean Ping lors de la présidentielle de 2016.
Simplice Guédet Manzela est décédé ce 9 avril au Centre hospitalier universitaire de Libreville (CHUL). Il y était interné depuis vendredi dernier. Admis en réanimation, il est sorti du coma hier avant de rendre l’âme dans la nuit.
En juillet 2014, alors qu’il venait d’être débarqué du poste de conseiller politique du président de la République, Gabonreview tirait la sonnette d’alarme quant à son cas, déplorant le fait que le parti qu’il avait dirigé et incarné assistait, dans l’indifférence, à sa quasi-déchéance. Ci-après l’article publié alors par Gabonreview. Biographique, il démontre que le parti au pouvoir ne sait pas manier les symboles, se montrant parfois ingrat envers ses anciens ténors.
L’homme seul
Il est tellement modeste et effacé que sa mise au placard est passée inaperçue. Et pourtant, il fait partie du cercle fermé de ceux qui ont incarné le PDG. Sa récente éviction du poste de conseiller politique du président de la République n’est pas faite pour rassurer quant à la capacité d’Ali Bongo à manier les symboles. Secrétaire général du PDG entre 1994 et 2008, Simplice Guédet Manzela est aujourd’hui sans activité et, à la limite, sans le sou. Une situation qui porte à réfléchir et ne devrait nullement inciter les barons du PDG à passer la main aux jeunes générations. Le pas lent, abattu, amaigri, l’homme ne comprend pas trop bien ce qui lui arrive.
Les adeptes du jeunisme et tenants de l’émergence à la gabonaise s’empresseront sans doute de dire qu’il incarne une époque révolue. Mais, il est un fait : plus que quiconque, l’ancien député de Mulundu symbolise le PDG de l’ère moderne. «Sur les 24 années de vie multipartite, le PDG a vécu 14 sous sa direction», note un journaliste de l’hebdomadaire partisan Dialogue, précisant : «Les Locales et législatives de 97 et 2002, les présidentielles de 98 et 2005, les sénatoriales de 2001 et 2006, toutes ces élections, toutes ces victoires ont été engrangées par son équipe».
Diplômé d’économie, enseignant de carrière, Simplice Guédet Manzela a toujours vécu par et pour la politique. Ancien membre de l’AGEG (Association générale des étudiants du Gabon), il rallie le PDG sitôt rentré au Gabon. Longtemps proche d’Etienne-Guy Mouvagha-Tchioba, il s’émancipe sitôt que ce dernier prend ses distances avec le PDG. Candidat malheureux au poste de président du groupe parlementaire PDG en 1991 face à Guy Nzouba-Ndama, il retrouve le même adversaire trois (3) ans plus tard dans la lutte pour la conquête du secrétariat général du PDG. Mais, cette fois-là, il sort vainqueur.
Parvenu au poste de secrétaire général du PDG, il entreprend de le décomplexer. Très vite, il ramène l’appellation PDG au lieu de «PDG-nouveau» à la mode à cette époque-là. Dans la foulée, il réhabilite la fête du 12-mars et reprend avec les grand-messes pour son anniversaire. C’est aussi lui qui suggère, en 1998, de transformer les députés et/ou sénateurs en autant de responsables locaux de la campagne présidentielle d’Omar Bongo, donnant de fait à cette élection nationale des allures de scrutins de proximité. Débarqué du secrétariat général du PDG en 2008, Simplice Guédet Manzela est d’abord nommé président du conseil d’administration de Gabon Poste mais, les péripéties de cette entité qui devient très vite La Poste SA vont le plonger dans la tourmente. Ne lui restait alors que son mandat de député.
Membre du comité permanent du PDG en 2009, il se prononce d’abord pour une candidature de Casimir Oyé Mba, avant que des pressions multiformes ne le contraignent à soutenir Ali Bongo. Dès lors, son influence au sein du PDG n’a cessé de décroître. En 2011, il fait le choix de passer la main au bénéfice de Romain Mikanga-Semba, l’actuel député. Nommé conseiller politique du président de la République, il croit alors pouvoir mettre son expérience au service des siens. Très vite, il va déchanter. «Durant toute la période où il est resté à la présidence, on ne lui confiait aucun dossier», révèle un de ses proches, qui indique : «Parfois on lui envoyait des demandes d’audiences pour qu’il dise si oui ou non la personne peut être reçue». Et de s’indigner : «Le plus grave est que même les éléments de rémunération auxquels il avait droit ne lui étaient toujours pas octroyés, Accrombessi et Gondjout estimaient qu’il n’est pas fiable». Pas fiable, l’ancien secrétaire général du PDG ? Aux yeux de qui ? Il y a assurément quelque chose qui a changé au sein de l’ex-parti unique ou plus largement de la majorité au pouvoir.
Malade, affaibli, Simplice Guédet Manzela, qui goûte très peu aux intrigues et combinaisons d’appareil, est aujourd’hui un homme seul. Au bord du désœuvrement et pas toujours à son avantage financièrement, il se demande encore comment et pourquoi en est-il arrivé là ? Certes, ses problèmes de santé n’incitent guère à lui confier des tâches nécessitant trop d’investissement physique. Mais, son expérience, sa capacité d’analyse et de synthèse et le lien étroit entre sa personne et le PDG auraient pu justifier un meilleur traitement. «Pour ce qu’il représente ou a représenté, on ne devrait pas le traiter comme ça», assène un député, qui poursuit : «Vu son état de santé, on aurait mieux fait le soutenir». Et de trancher : «Pour le symbole ce n’est pas du meilleur effet». Au PDG, le maniement des symboles semble très compliqué. Et pourtant, la politique c’est aussi la gestion des symboles…