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Covid-19 : L’Afrique définitivement hors circuit ?
Publié le vendredi 3 avril 2020  |  Gabon Review
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© Autre presse par DR
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La crise du coronavirus met en exergue les faiblesses structurelles des Etats. Trop de pays africains donnent l’impression de faire des malheurs des Etats-Unis, de la France, de l’Italie ou de l’Espagne, la justification de leurs insuffisances.

L’Afrique est-elle définitivement hors circuit ? Est-elle incapable de faire face aux défis de l’époque ? Apparu en Chine, un virus à la progression fulgurante le laisse penser. Semant la panique, installant la peur du lendemain, le covid-19 met en lumière la faible structuration de nos sociétés. Dans la plupart des pays, les gouvernements peinent à formuler des stratégies endogènes de riposte. Donnant le sentiment de reproduire le schéma européen, ils égrènent des mesures pas toujours conformes à l’avancée de la pandémie ni à la configuration des infrastructures et encore moins à la réalité socio-économique. Pendant ce temps, les populations laissent éclater leur émoi, se demandant comment tout cela va finir.

A l’épreuve du temps

Tout en remettant en cause les discours convenus sur les systèmes de santé, la crise du coronavirus met en exergue les effets pervers de la gouvernance en vigueur depuis bientôt trois décennies. Même si on peine encore à en évaluer l’onde de choc, elle souligne les faiblesses structurelles des Etats. Certes, nulle part au monde, la situation n’est sous contrôle : aux Etats-Unis, en France en Italie et en Espagne, le nombre de victimes ne cesse d’aller crescendo. Mais, trop de pays africains donnent l’impression sinon de se satisfaire des malheurs d’autrui, du moins d’en faire une justification de leurs insuffisances. Incapables d’identifier leurs atouts ou de déceler les opportunités offertes par le déroulement des événements, ils ne parviennent pas à se surpasser. Comme dépassés par les circonstances, certains en arrivent à décréter le confinement général, sans en évaluer la faisabilité et, encore moins, le contrecoup économique ou social.

Dans ce contexte, on ne peut ne pas envisager le pire. Au plan social, les mesures d’accompagnement annoncées çà et là, parfois à l’emporte-pièce, pourraient se heurter à deux écueils majeurs : la mobilisation effective des fonds et, la mise en place de mécanismes de redistribution compatibles à la réalité. Surtout, dans des pays dominés par le secteur informel, où l’urbanisation anarchique a rendu chimérique tout plan d’adressage. Au plan économique, les effets conjugués de la baisse des cours des matières premières et de l’arrêt des investissements étrangers devraient être décuplés par le caractère inabouti de la transformation des structures de production. Au plan politique, le déficit de légitimité ne militera pas en faveur de nombreux régimes. Si des voix dissidentes ne se sont toujours pas fait entendre, cette unanimité aura beaucoup de mal à résister à l’épreuve du temps. Déjà, à mots à peine couverts, certains gouvernements sont accusés de profiter du covid-19 pour limiter l’exercice des droits civils et politiques.

Valeur d’avertissement

Depuis les indépendances, jamais les pays africains n’ont été mis à l’épreuve de façon aussi synchrone. Certains comme les Seychelles, l’Egypte ou l’Afrique du Sud pouvaient prétendre s’être dotés d’infrastructures modernes. D’autres, à l’image de Maurice, de l’Algérie ou de la Tunisie pouvaient affirmer avoir fait des efforts dans le développement humain. A l’instar du Botswana, du Cap-Vert ou du Ghana, il s’en trouvait pour vanter leur gouvernance démocratique. Sans crier gare, le covid-19 est venu mettre en évidence les limites de ces stratégies nationales, mises en œuvre sans vision intégratrice. Autrement dit, il a pointé la nécessité de construire des ensembles sous-régionaux, articulés et fonctionnant aux critères de convergence. Au grand dam des populations et, peut-être, pour le grand malheur de nombreux régimes, les systèmes de santé symbolisent le retard des processus d’intégration. Même si l’Union européenne se révèle impotente en l’espèce, on ne peut se satisfaire de l’atonie de l’Union africaine. En tout cas, son silence traduit un déficit de vision d’ensemble et une absence de démarche prospective.

Reste maintenant à tirer les enseignements d’une telle situation. Reste aussi à anticiper pour mieux envisager l’avenir. Déjà, certains cercles d’influence prédisent une catastrophe politique en Afrique. Eu égard aux accointances de nombreux régimes, ces analyses ont valeur d’avertissement. Au lieu d’imposer des mesures hors sol à des populations déjà éreintées par le quotidien, d’attendre une hypothétique aide extérieure ou de s’accrocher à un vague espoir de vaccin, les gouvernements africains doivent mettre l’imagination au pouvoir. Ils doivent exploiter au mieux la relative jeunesse de leurs populations. Autrement, ce sera la chienlit avec, à la clef, d’incalculables risques politiques.
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