Le fils de l’opposant Jean Ping a créé une fondation et amorcé une campagne dans les médias et sur les réseaux sociaux afin de redorer son image, passablement ternie par des affaires judiciaires, et se positionner dans la course à la succession de son père qui aura 81 ans lors de la prochaine élection présidentielle de 2023.
C’est une interview fleuve qu’a accordé Franck Ping a nos confrères de Direct Infos Gabon le mardi 31 décembre. Sans surprise, le fils de l’ex-candidat unique de l’opposition lors de l’élection présidentielle de 2016 y dresse le portrait d’un Gabon proche du pandémonium.
« A l’en croire, le Gabon est un État malade » avec « un peuple abandonné » qui « à peu de choses près les mêmes indices de développement que certains des pays les plus pauvres du continent. »
Quant à l’opération anti-corruption en cours au Gabon, elle ne trouve guère davantage grâce à ses yeux. « Le gouvernement de ce pays a gratuitement offert au peuple gabonais une comédie digne des plus grandes productions d’Hollywood. De mémoire, je n’ai jamais été témoin d’un pareil désordre au sein d’un État », cingle Franck Ping.
Le timing de cette interview est tout sauf anodin. Même s’il s’en défend très mollement (« Jean Ping n’a pas d’héritier politique », affirme-t-il), à travers cette sortie médiatique Franck Ping se positionne en vue de la succession de son père.
En effet, Jean Ping traverse une passe très difficile. Ces dernières années, l’ex-candidat unique de l’opposition lors de la présidentielle de 2016 a perdu un à un ses soutiens. Les vieux barons (Zacharie Myboto…) comme la jeune garde (Appel à agir…) considère sa stratégie consistant à revendiquer la victoire lors de la présidentielle de 2016 comme une impasse. Pire, cette année, Jean Ping a perdu le statut de leader de l’opposition au profit de Guy Nzouba-Ndama dont le parti Les Démocrates, fort de dix députés, est le premier groupe d’opposition à l’Assemblée nationale.
« Jean Ping aura 81 ans lors de la prochaine élection présidentielle. Compte tenu de la façon dont les cartes ont été rebattues ces dernières années au sein de l’opposition, il est tout sauf certain qu’il puisse se présenter à nouveau », explique un professeur en science politique de l’UOB. Franck Ping, tirant probablement les conclusions de cette situation, est ainsi amené à sortir du bois.
Il lance sa fondation
Pour mettre toutes les chances de son côté et soigner un peu plus son image, Franck Ping s’est offert récemment une campagne de sponsoring pour booster son audience sur le réseau social Instagram. Mieux, il a lancé il y quelques temps une fondation. Baptisée Fondation Ping, celle-ci a vocation à venir en aide aux plus démunis (…) par tous les moyens absolument nécessaires, explique son fondateur.
Reste que les choses ne sont pour lui pas si évidentes. L’image de l’intéressé a été terni ces dernières années par les affaires judiciaires. Dans l’affaire Sinohydro, la firme chinoise de BTP spécialisée entre autres dans la construction de routes et de barrages hydroélectriques Franck Ping est soupçonné d’avoir versé de substantielles commissions en échange de l’attribution de marchés publics au Gabon, au Cameroun et au Congo, comme l’a révélé Mediapart en juin 2016 (lire l’article).
Par ailleurs, « cela fait quatre ans qu’il n’a plus remis les pieds au Gabon. Il a perdu le contact avec le terrain, avec la base », explique un militant de la Convention pour la Nouvelle République, le mouvement de son père. Depuis ses déboires avec la Justice, le fils de Jean Ping vit aux Etats-Unis.
Enfin, Franck Ping devra aussi subir un procès en illégitimité. Lui qui dénonçait il y a quelques semaines une tentative de monarchisation du Gabon à la faveur de la nomination de Nourredin Bongo Ondimba au poste de coordonnateur général des affaires présidentielles se trouve de fait aujourd’hui dans la position de l’arroseur-arrosé.