Le Gabon devrait s’interroger sur l’expatriation de certains de ses citoyens. Sans vouloir entrer dans un débat strictement politicien, sachant qu’il n’y a pas de bon pays pour les pauvres pour reprendre Pierre- Claver Akendengué, nous venons, les larmes aux yeux, regretter avec tous ceux qui l’ont sincèrement aimé et/ ou respecté simplement, pour ne serait- ce que l’œuvre qu’il a accomplie, affirmer notre compassion en même temps que nous présentons à la famille nos condoléances les plus attristées. Il était un Francis Sala Ngoua- Beaud, il n’y en aura plus un autre !
Que faut- il finalement retenir d’un homme après son passage sur terre si ce n’est qu’il a servi avec loyauté, même si, et ce n’est pas l’apanage d’un seul individu, il est des insanités qui dénaturent leurs hauts faits d’armes.
Parmi les journalistes sportifs, car c’était devenu sa spécialité, qui ont marqué d’une empreinte indélébile leur passage dans le monde des médias gabonais en particulier, africains et mondiaux en général, Françis Sala Ngoua- Beaud aura figuré parmi ceux qui le plus ont retenu l’attention du public par leur verve oratoire, leur connaissance ou leur érudition, mais aussi par leurs mondanités qui le faisaient se différencier de talents qui se muraient dans un silence ou un mépris qui frisaient le rejet de leurs semblables.
Francis était un bon vivant qui ne supportait pas de ne pas partager ses instants de bonheur avec autrui. Ce qui l’amenait rechercher la compagnie à tout prix pour justifier sa nature qui était en vérité celle de quelqu’un de très attachant, disponible et toujours prêt à se mettre au service des autres. Altruiste, Sala Ngoua- Beaud l’était, à moins que l’on ne nous apporte la preuve du contraire. Permettez- nous de rappeler qu’à plusieurs reprises, nous avons eu à communier lorsqu’invité par lui, il nous présentait les facettes profondes de son être, celles révélant un homme de culture attaché au progrès tout en conservant son aspect naturel, celui d’être ambiant, bon jouisseur, qui savait profiter de tous les instants que lui offrait la vie, au point de nous amener admettre, comme le qualifiait son homonyme Francis Ntamalax, lui aussi parti dans l’au- delà, qu’il était un « ministre », mais un de « l’ambiance ». Ce n’était que blague, simple plaisir de le voir en action, tant ses frasques n’émouvaient plus personne, mais attiraient plutôt plus d’un vers cet homme qui dégageait l’humeur d’un « mondain », ce pourquoi il était en vérité accepté de tous.
Francis nous a marqué professionnellement car il était d’une grande mémoire en dehors du fait qu’il disposait d’une voix hors- pair, une voix de baryton aurait- on dit. Homme apparemment instable si l’on le juge sur le prisme de la vie privée, ce qui demande d’être prouvé, Francis fait partie de cette génération de journalistes gabonais qui ont inspiré bien de jeunes qui, osons- nous penser à juste titre, restent orphelins, d’un père dont le style les a inspiré. En effet, il ne sont plus légion, sinon ils n’existent plus de mémoire de journaliste, ces jeunes qui savent improviser ou conduire des reportages à la manière du défunt qui s’était illustré depuis la Radio Télévision Gabonaise (RTG) de l’époque par ses interviews et reportages, notamment ceux menés de main de maître pendant la finale de la Coupe d’Afrique opposant le National El- Alhy du Caire (Egypte) à l’Association sportive Sogara du Gabon et ceux concernant le championnat national du Gabon quand, présentant la configuration des équipes se produisant, il se plaisait à qualifier l’attaque du Football Canon 105 pour ne citer que cet exemple, d’ « armada étrangère » lorsqu’à côté de Boateng, étaient par exemple alignés d’autres étrangers qui avaient pour noms : Aladji Ibrahim, Fassinet Camara, Mbinga Kalonda ou Georges Alassane.
Hauts faits d’arme
L’on se souviendra toujours, pour ceux qui n’ont pas la mémoire courte, de cet élégant reportage commencé à Libreville, après que l’As Sogara ait connu au Caire une défaite de 3 à 0 en finale de la Coupe d’Afrique des clubs champions, et à l’issue duquel Jean- Claude Yénot, alors président du club le plus populaire du Gabon, statistiquement parlant, avait de retour du Caire, déclaré à l’aéroport « Léon Mba » que chaque caïman a son marigot. La finale d’une coupe d’Afrique, aucun club gabonais n’y avait jamais accédé, pour ne pas dire n’y a plus jamais accédé. Une épreuve à laquelle n’avait jamais accédé un club gabonais, pour s’achever à Port- Gentil, reportage au cours duquel Francis Sala Ngoua- beaud nous livra les restes de sa bile, passant en revue tous les pans concernant les préparatifs allant du casernement à l’entraînement en passant par la préparation physique. Quel bonheur pour tous ceux qui ont avec attention bien entendu suivi cette phase de l’implication tous azimuts du professionnel, qui lui vaudra d’être sollicité par la radio africaine Africa N°I dans laquelle il se distinguera en gravissant allégrement les échelons. Aussi, est- il devenu Rédacteur en chef, par sa compétence, entendons- nous bien, poste qu’il a assumé avec brio, avant de partir pour la « Télévision TV+ » à laquelle il a donné vie et fait respecter la ligne éditoriale, par la majorité des Gabonais, quoiqu’on ait, croyons- nous volontairement, refusé de produire ce qui était ses aspirations.
Sala Ngoua- Beaud était un dilettante, un homme avec qui tout le monde pouvait échanger sans avoir l’air d’être en face d’un supérieur ou d’un personnage qui vous impose de fournir des efforts pour que vous soyez compris. Ce qui créait l’harmonie et vous amenait conjuguer avec cet être qui paraissait exceptionnel en dépit du fait qu’il se singularisait par une attitude à demander des interrogations. Il lui arrivait, alors qu’il était programmé pour une mission, d’oublier ses engagements ou de les repousser à son gré, parce qu’il avait lui- même, le secret de sa prise de position. Il introduisait subtilement dans les poches de votre habit quelques billets de banque, peu importait leur valeur, puisqu’il avait du mal à compter, et c’est vrai, le plus important pour lui étant de vous faire vivre à la même heure que lui. Francis reste à nos yeux quelqu’un que l’on pourrait certainement qualifier d’atypique, mais que l’histoire, s’il y a histoire sous nos cieux, devrait retenir, eu égard au fait qu’il y a comme lui des hommes qui marqueront l’histoire à leur manière, l’essentiel étant que l’on ne retienne d’eux que ce qu’il y a d’important, ce qu’il y a d’important, c’est que Francis Sala Ngoua- Beaud n’a pas vécu inutilement !