Dès vendredi 30 août, des cérémonies ont eu lieu au QG de Jean Ping et dans tout Gabon, mais aussi à l’étranger, en hommage aux morts et disparus des violences postélectorales, dont le chiffre officiel serait en dessous de la réalité.
Des impacts de balles, des vitres cassées, des portes défoncées : trois ans après la nuit du 31 août au 1er septembre 2016, le QG de Jean Ping porte toujours les stigmates de l’assaut par les forces de l’ordre aidées d’un hélicoptère.
«J’ai perdu mes trois petits enfants cette nuit-là», pleure une grand-mère, venue se recueillir dimanche matin dans la cour du QG, aménagée avec des chaises et des tentes pour l’occasion. Habillée d’une robe rouge, la vieille dame éplorée s’est conformée au dress code de ces trois ans de commémoration : le rouge et le noir.
L’opposant Jean Ping, qui se réclame toujours “président élu” des présidentielles de 2016, est apparu dans l’après-midi, saluant les participants à la cérémonie, sans pour autant faire de discours.
Richard Moulomba, le président de l’ARENA, parti membre de la Coalition pour la nouvelle République (CNR) de Jean Ping, s’est chargé de rendre hommage aux victimes.
La diaspora mobilisée
À l’étranger, la diaspora gabonaise avait également prévu des commémorations dès vendredi 30 août pour marquer l’anniversaire.
À Paris, par exemple, une cérémonie religieuse s’est tenue vendredi à l’église Saint-Antoine du 12e arrondissement, suivie d’une veillée dans le jardin Ranelagh du 16e.
Samedi, les participants au deuil des victimes se sont réunis sur la place du Trocadéro, avant de marcher en fin d’après-midi vers l’ambassade du Gabon.
Sur fond noir, une liste de 26 morts «clairement identifiés»
Au Gabon comme à l’étranger, une liste de 26 personnes décédées pendant les violences postélectorales était imprimée sur des panneaux et des t-shirts.
«Ce sont les personnes que nous avons pu clairement identifier, dont les corps ont été retrouvés et les familles contactées à l’époque des faits», indique Germain (prénom modifié), présent lors de l’assaut du QG.
«Il était vraiment difficile de compter les morts à l’époque, car c’était la panique, et les forces de l’ordre faisaient tout pour embarquer les dépouilles», se souvient un autre survivant de l’attaque.
Trois morts, selon le gouvernement
Le gouvernement quant à lui, ne reconnaît officiellement que la mort de trois personnes lors des violences postélectorales, qui avaient débuté dans la nuit du 31 août pour se prolonger pendant une grande partie du mois de septembre, avec des «hommes cagoulés» qui patrouillaient régulièrement dans les rues, se souviennent les témoins.
«Le même épisode fait l’objet de versions très contradictoires par le gouvernement ou par l’opposition (…). On est dans une fourchette qui va de 3 à 300 morts», avait déclaré à l’Agence France Presse (AFP) en juin 2017 le chef de la section de l’analyse des situations à la CPI, Emeric Rogier.
La société civile avait authentifié une liste de 31 personnes décédées, tout en affirmant que de nombreux corps n’ont pas été retrouvés, et que certains auraient été enterrés secrètement dans des «fosses communes».
La CPI a décidé en septembre 2018 de ne pas ouvrir d’enquête, mais estime qu’elle pourrait toujours réexaminer le cas du Gabon à la lumière d’éléments nouveaux.