À la suite des résultats des enquêtes menées par la Commission d’examen de la surpopulation carcérale, 153 prisonniers en détention préventive abusive à la prison centrale de Libreville ont récemment été libérés. La cohorte ne comprenait pas Magloire Ngambia, ancien ministre de l’Économie et des Travaux publics, placé sous mandat de dépôt depuis le 10 janvier 2017, et encore sans jugement.
S’il vrai est que 153 détenus dont les durées de détention préventive ont expiré, ont recouvé la liberté, il reste que le cas Magloire Ngambia interpelle. Le nom de l’ancien ministre de l’Economie et des Travaux publics ne figure pas parmi les bénéficiaires de cette récente remise en liberté. Ce qui provoque des remous parmi ses partisans, d’autant plus qu’avant cette vague, d’autres personnalités interpellées dans le cadre de l’Opération Mamba avaient déjà été libérées.
De report en report, l’ancien ministre n’a toujours pas comparu devant la Cour criminelle spéciale (CCS) pour corruption présumée concernant plusieurs affaires dont celle du tronçon Akieni-Onga. On en vient à se souvenir de la vive colère de la présidente de la CCS, Paulette Ayo Mba, qui pointait, en son temps, des «forces obscures» empêchant à la justice de faire son travail.
À qui peut donc profiter la détention préventive et prolongée de Magloire Ngambia à la prison centrale de Libreville ? Au regard de la loi gabonaise, sa garde à vue est largement dépassée. «En matière correctionnelle, nous dit l’alinéa premier de l’article 117 du Code de procédure pénale, «la durée de la détention préventive peut excéder six mois»», explique le Doctorant en droit privé à l’Université Paris-Est Créteil (UPEC), Terence Asseko Akoma, auteur de «La détention préventive dans la justice pénale gabonaise» sur queditlaloi.com.
Poursuivant dans ses explications, il indique qu’il peut être adjoint six mois supplémentaires à ce délai si le juge d’instruction estime que l’inculpé doit demeurer en détention au-delà d’un an… «En tous les cas, l’écriture de ce texte – quoique maladroite – nous enseigne que la durée maximale de la détention préventive en matière correctionnelle ne peut excéder douze mois, prolongation y compris», note-il.
«Toujours dans les mêmes conditions que celles de l’alinéa précédent, le juge d’instruction peut demander à la chambre d’accusation que soit prolongée la durée de la détention ; mais cette prolongation «ne peut excéder six mois». Ce qui revient à dire qu’en matière de crimes, et tel qu’est rédigé le texte, la durée maximale de la détention préventive ne peut excéder dix-huit mois», conclut-il.
En d’autres termes, l’ancien ministre aurait, en effet, déjà pu, comme les autres personnalités soupçonnées dans ces mêmes affaires ou dans des affaires similaires, bénéficier de la libération provisoire ou de la relaxe d’office. Or, il n’a jamais quitté la prison centrale de Libreville, où il est enfermé depuis le 10 janvier 2017, totalisant donc plus de deux ans d’incarcération… au-delà du délai légal de détention préventive.
Au regard de la situation, les proches de l’ancien ministre estiment que «Magloire Ngambia est victime d’un acharnement politique qui profiterait à certains détracteurs tapis dans l’ombre». «Sinon, insinue l’un de ses partisans, pourquoi les très hautes instructions du président de la République n’ont-elles pas été appliquées, à la règle, à tous ceux qui le méritaient ?».
Malgré les multiples appels de ses conseils à l’endroit des juges et des différentes instances judiciaires au sujet de «la détention arbitraire et prolongée» du concerné, les choses demeurent en stand by. D’où l’incompréhension que manifestent ses partisans et ses parents.