Rodrigue Tsanga, président du Syndicat des Acteurs du Transport Terrestre (Syatrat), est gardé-à-vue depuis lundi à la Police Judiciaire (PJ), où il s’était rendu sur convocation. Se plaignant d’arriérés de salaires, le syndicat en grève depuis le 21 juin, poursuit la Sogatra en justice pour «détournement».
Convoqué vendredi, Rodrigue Tsanga s’est présenté à la PJ lundi «où il est toujours retenu», indique un membre du syndicat. «Il a été interpellé pour coups et blessures volontaires, diffamations et menaces, ou encore violences», selon une source judiciaire, ajoutant que d’autres syndicalistes du Syatrat devraient être entendus.
Le 21 juin, le Syndicat des acteurs du transport terrestre (Syatrat) était entré en grève au siège de la Sogatra à Libreville. Les forces de l’ordre étaient intervenues et plusieurs grévistes avaient été blessés, selon des photos publiées dans les réseaux sociaux.
Les manifestants disent avoir fait un sit-in «pacifique», alors que la direction générale les accuse d’avoir violenté leurs collègues voulant assurer le service minimum.
Sogatra assigné en justice pour «détournement» après 7 mois d’arriérés de salaires
Le Syatrat est en contentieux avec la Sogatra qu’il a assigné en justice il y a environ deux semaines. Une plainte a été déposée contre la Direction générale pour «détournement». Entreprise de près de 1.000 employés, la sogatra leur doit sept mois de salaires de 2018.
La société a signé le 22 mars un protocole d’accord avec les divers syndicats de l’entreprise, dont le Synatrat, prévoyant que les arriérés de salaires soient payés en 24 mois avec une décote de 20% sur chaque salaire mensuel, indique la direction de la Sogatra. Ce paiement n’a pas encore débuté, par manque de fonds, mais le dossier a été approuvé le 23 mars en Conseil d’administration, ajoute la direction.
Des subventions de l’État non justifiées jusqu’en 2019
Affaiblie depuis 2015, la société vit des subventions de l’État, sans que les recettes d’exploitation ne puisse assurer la maintenance des bus, selon la direction. «L’entreprise recevait des subventions de l’État, mais pourtant elle ne justifiait pas ces subventions», indique à Gabonreview l’administrateur directeur général, Bruno Minko Mi Ngoua, ancien secrétaire général de la PostBank qui a pris ses fonctions à la Sogatra début mars.
Remontant jusqu’à 2015 et s’appuyant sur un rapport d’audit de Deloitte consulté par Gabonreview, Minko Mi Ngoua dit ne pas avoir trouvé de trace de documents justifiant l’utilisation des fonds alloués par l’État à l’entreprise de transport, qui montaient généralement à un peu plus de 4 milliards de FCFA par an.
«Il y avait des sommes qui n’avaient jamais été justifiées par les anciennes directions générales, car pour qu’une somme soit justifiée, le Budget remet un certificat de conformité. D’autres sommes ont tout simplement été portées disparues, ce qui justifie les fausses factures servant à payer les salaires, comme par exemple 1,8 milliard sur la subvention 2018», indique M. Minko. «Avec la deuxième tranche de la subvention de 2018, soit près de 2,1 milliards de FCFA, qui s’est terminée en juin, nous avons payé les salaires 2019 et réhabilité le parc automobile», ajoute l’administrateur directeur général.
Selon le document, la subvention servait à payer les arriérés de salaires de la fin de l’année 2018, mais «nous avons décidé d’en faire une utilisation plus pragmatique notamment pour augmenter les recettes», explique Minko Mi Ngoua.
Une nouvelle société de transport, Trans-Urb, est prévue pour août 2019. Les syndicalistes y voient les signes d’une faillite de la Sogatra, alors que la direction parle de «saine concurrence».