Sans aucune langue de bois, le Directeur général de la Société Gabonaise de Raffinerie, SOGARA, Noel Mboumba a accordé un entretien exclusif à Gaboneco.com. Soupçons de détournement de deniers publics, gestion scabreuse, tribalisme, affaire « Delors Services » et bien d’autres sujets, bref Noel Mboumba livre sa part de vérité sur les tirs groupés qu’il essuie depuis un petit moment. Entretien.
Gaboneco.com : Noel Mboumba, vous êtes accusé d’avoir recruté massivement les frères de votre communauté ethnique, vrai ou faux ?
Noel Mboumba : Au niveau des recrutements, aujourd’hui à Sogara l’effectif c’est 312 personnes. Dans les 312 personnes, nous avons en 2017 à périmètre constant et à période constante, nous étions à 306 personnes, c’est-à-dire que l’évolution en valeur absolue est de six personnes entre 2017 et 2018. Maintenant dans ces effectifs nous avons 170 personnes qui sont d’ethnie myènè, représentant 55 % de la population, 58 personnes Punu-Guysir, les deux ethnies mélangées, soit 18%. Vous comprenez à partir de cet instant que les recrutements décriés ne sont pas l’apanage de la population Guysir-Punu à laquelle j’appartiens. Si on a que 58 personnes à la Sogara, Noël Mboumba n’a pas recruté 58 personnes depuis qu’il est là. Le nombre de personnes recrutées depuis que je suis arrivé est de 31 personnes, toutes ethnies confondues.
Ces recrutements font-ils exploser la masse salariale ?
Non ça ne fait pas exploser la masse salariale, on se rend bien compte que y’a des personnes qui sont remplacées simplement par le fait des départs à la retraite. C’est pour cette raison qu’entre les 38 personnes recrutées, il y’a deux ans, et l’écart de six personnes, le différentiel constitue les personnes qui sont parties en retraite que nous remplaçons pour combler les effectifs au niveau opérationnel. A côté de cela, nous avons promu 115 personnes d’ethnie myènè sur les 170, quasiment 7 myènè sur les 10 ont reçu un avancement. Donc il n’ya pas de tribalisme à la Sogara ou une flambée de recrutement.
Par contre, avant à la Sogara il y’avait beaucoup de contrats de prestations avec les sociétés étrangères, notamment Spi, Ortec etc. lorsque nous sommes arrivés, nous avons pris sur nous de privilégier les contrats de prestations de services aux entreprises gabonaises. Ce qui permet aujourd’hui de dire qu’à la Sogara en dehors de deux ou trois prestations liées à des prestations hautement techniques, il n’ya plus de contras avec les expatriés. La Sogara est pilotée aujourd’hui par des Gabonais à 100% et au niveau des prestations techniques, elles sont assurées par des Gabonais qui ont crée des entreprises, notamment les anciens de Sogara, Total qui ont une expertise dans la raffinerie.
Ces derniers travaillent aujourd’hui au niveau de Port-Gentil. Nous au niveau de la Sogara pour mettre en musique la politique du chef de l’Etat de privilégier le « local contact », nous sommes privilégiés les PME gabonaise. Aujourd’hui on en est satisfais et les gens qui pariait sur l’échec de Sogara du fait d’avoir écarté SPI, Ortec se sont trompées.
Quid de l’affaire Delors Services ? On parle de 400 millions que la Sogara aurait versés à cet opérateur économique, qu’en est-il exactement ?
L’opérateur Delors Services avait été sélectionné dans la short liste des entreprises qui pouvait assurer le contrat des hydro-crackers (Ndlr : camions permettant de nettoyer les caniveaux en temps de pluie). Nous avons contacté Delors Service parce que cette prestation était assurée par Ortec à l’époque. Nous avons fais la proposition à Delors Service pour cette prestation. Delors Service a estimé que la prestation était en deçà de ses attentes et a décliné l’offre, parce qu’on lui demande de faire trois mois d’essais. Et à l’issue de ces trois mois d’essais on allait décider, car Delors Services n’avait jamais travaillé à la Sogara, même à l’époque de M. Pierre Reteno Ndiaye.
Quand je suis arrivé, j’ai eu une discussion avec son responsable à qui j’ai indiqué que ma politique était celle du Chef de l’Etat de promouvoir les PME locales. Donc Delors Services pouvait évidemment obtenir ce contrat. Nous avons fait une offre à Delors Services. Offre qui a été déclinée par Delors Services pour être surpris plus tard d’apprendre que Delors Services nous porte plainte au tribunal de première instance de Port-Gentil au motif que nous n’ayons pas respecté le contrat, que l’opérateur a engagé des coûts notamment dans la formation du personnel. Ce qui reste bien évidemment à justifier. Moi, je fais de la politique dans l’Ogooué Maritime, je ne souhaite pas que la Sogara soit là à passer du temps au tribunal. J’ai demandé à mes équipes de voir dans quelle mesure on pouvait trouver un accord transactionnel.
Parce qu’il semblerait que certains services au sein de la Sogara auraient contacté Delors Services qui a demandé 800 millions à la Sogara au titre du préjudice. Si le contrat avait été exécuté, même pendant trois ans il ne couterait pas 800 millions. Ce montant me paraissait complètement farfelu. Nous sommes allés au tribunal rencontrer le président du tribunal, Mme Rita Ntsame qui a indiqué qu’on ne pouvait pas payer ce montant. Car même si y’avait des dommages et intérêts ca ne dépasseraient pas trois mois. Calculs faits, on est autours de 30 millions en gros, mais naturellement les avocats de la Sogara avaient indiqué qu’il ne servait à rien d’aller dans un accord transactionnel et qu’il n’y avait aucune raison que nous perdions le procès.
Je ne voulais pas aller au contentieux avec Delors, c’est un frère de la communauté. Je voulais trouver un arrangement, j’ai plutôt opté pour un accord transactionnel. Aujourd’hui, le dossier est au tribunal de Port-Gentil pour contacter toutes les parties et parvenir à un accord transactionnel. Donc la somme de 400 millions n’a jamais été versée, le tribunal de Port-Gentil peut en témoigner. L’accord est dans les pipes, on n’est pas encore parvenu à un montant mais il est estimé autours de trente à quarante millions de FCFA.
On vous accuse d’avoir une gestion scabreuse et d’utiliser l’argent de la Sogara à vos fins personnels ?
(Rires) Ca me fait rigoler. Quand j’étais au ministère du Budget, on m’avait fais le même procès, idem au ministère de l’Economie plus que je posais des actions en faveur des populations. Je suis aujourd’hui Directeur général de la Sogara, on m’accuse de la même chose. Moi j’ai choisi la politique de proximité, politique prônée par le Chef de l’Etat, Ali Bongo Ondimba qui nous a toujours dit qu’il sera heureux lorsque les Gabonais seront heureux. Fort de ce principe, mon credo c’est de faire en sorte que les populations les plus précarisées, démunies bénéficient de mes attentions. C’est dans ce cadre qu’avec le peu de moyens que j’ai qu’une fois par trimestre je pose une action en faveur de ces populations là.
Sogara est une société privée, il n’y a pas un seul compte où le DG est le seul signataire. Je suis cosignataire soit avec faire le directeur financier en signature A, soit avec le directeur des opérations en signature B. Il n’y a pas un seul compte au Gabon ou à l’étranger où le DG de la Sogara est le seul signataire et donc aurait la possibilité de tirer des fonds pour pouvoir financer ses actions politiques, il n’en existe pas. C’est un faux procès, la Sogara à un compte d’œuvres sociales servant à des actions destinées aux orphelins, personnes âgées. Mais j’ai très rarement utilisé ce compte vu qu’il est géré par une organisation au sein de la Sogara qui s’appelle le comité des œuvres sociales, géré par des cadres et je ne suis pas le seul signataire.
Les actions menées ne sont pas édictées par le directeur général que je suis, mais plutôt menées de commun accord avec le comité des œuvres sociales. C’est un faux procès, les comptes de la Sogara sont certifiés par les commissaires aux comptes. La Sogara n’est pas une caisse où on peut facilement aller prendre de l’argent.
Une note de politique, vous êtes taxé de vouloir déstabiliser le PDG à Port-Gentil et être un faiseur de roi, un commentaire ?
Là encore, c’est une mauvaise vision des choses. Certains voient le ver à moitié plein et d’autres à moitié vide. Le PDG c’est mon parti. Je suis membre du PDG et président d’honneur de l’AJEV. Il n’y a pas de compétitions entre les deux entités, elles se complètent. Il y’a des actions qui peuvent être menées par l’AJEV et pas par le PDG. Par exemple dans un lycée, le PDG peut ne pas arriver alors que l’AJEV si, car il s’agit des jeunes. Au niveau provincial, l’AJEV est un cheval de Troie pour le président de la République, pour la politique de l’émergence. Elle ne doit pas être perçue comme un adversaire pour le Parti Démocratique Gabonais, mais plutôt comme un allié.