L’affaire Kévazingo, loin de connaître son épilogue, compte déjà plusieurs victimes parmi lesquelles des employés des sociétés forestières qui assurent pourtant ne pas être concernées par le trafic du bois précieux. Depuis le 15 mai, des centaines d’employés du secteur ont été mis en chômage technique, et commencent à broyer du noir.
Dans un courrier adressé, le 20 mai, au Premier ministre, l’Union des forestiers industriels du Gabon et aménagistes (Ufiga), tire la sonnette d’alarme. Depuis la découverte par le Parquet d’une quantité de «Kévazingo illégal» dans un magasin à Owendo en fin mars, les opérations d’empotage des conteneurs à l’export pour toute la filière bois ont été suspendues. Si l’Ufiga avait «salué» cette mesure espérant que l’enquête aboutisse rapidement pour reprendre le rythme normal des activités, aujourd’hui cette suspension pèse sur le rendement des sociétés.
En fin avril, les sociétés membres de l’Ufiga se sont vu imposer à nouveau des blocages, après une reprise de quelques jours des travaux de la Brigade des Eaux et forêts d’Owendo et de la Douane. Selon Françoise Van De Ven, délégué général de l’Ufiga, non seulement l’assistance des agents pour l’empotage des conteneurs n’est plus possible, mais pour l’évacuation des grumes vers les unités de transformation à Owendo, les bordereaux ne peuvent être signés et cachetés. L’Ufiga indique que les grumes arrivées par le train et pour lesquelles les documents sont présentés en bonne et due forme pour le trajet jusqu’à Owendo, sont bloquées sur le parc et ne peuvent être envoyées vers les unités de transformation. «La Brigade d’Owendo n’étant pas autorisée à signer/cacheter les bordereaux pour le transfert vers les usines».
De fait, certaines sociétés telles que Rougier, Precious Woods-TGI, Placages déroulés du Gabon et Thebault ont dû cesser leurs activités. «Leurs stocks de grumes étant épuisés, leur personnel a été mis en chômage technique depuis le 15 mai», a fait savoir Françoise Van De Ven, indiquant que pour les autres usines à Owendo, la situation devrait être identique «dans les tout prochains jours par manque de matière première». N’étant impliquées ni de loin ni de près par le “Kévagate”, des centaines d’agents se retrouvent donc au chômage technique sous les regards impuissants de leurs employeurs n’étant aussi, «nullement concernés dans les enquêtes en cours». À en croire l’Ufiga, si les opérations d’empotage des conteneurs ne reprennent pas très vite, les navires attendus dans quelques semaines n’auront pas du bois à charger. «Ce qui constituera pour les lignes maritimes un grand préjudice, les frais d’escalade du port d’Owendo étant très élevés alors que la rentabilité de l’escale est remise en question par le manque de chargement à l’export», explique Françoise Van De Ven attirant l’attention du Premier ministre, Julien Nkoghe Bekale.
À en croire son propos, l’impact aujourd’hui est tel que cette fin du mois sera très difficile, tant les trésoreries des opérateurs affectées depuis mars ne permettent plus d’assurer leurs obligations socioéconomiques. Déjà affligées par des problèmes du port d’Owendo, les sociétés qui se sentent «injustement frappées» par le “Kévagate”, craignent que la paix socioéconomique soit affectée. Accrochant Julien Nkoghe Bekale, l’Ufiga souhaite que «l’enquête puisse aboutir dans les tout prochains jours». À défaut, elle appelle à une prise de mesures «pour que les sociétés non impliquées dans ce trafic puissent reprendre le travail rapidement».