À la suite du groupe « Appel à agir », le collectif des anciens cadres, notables, et dignitaires de la République a rompu le silence, le 18 mai 2019, au sujet de la crise multidimensionnelle et multisectorielle qui accable le pays, depuis août 2016 et encore plus depuis l’indisponibilité temporaire « trop prolongée d’Ali Bongo ».
Estimant ne plus pouvoir se taire devant ce qu’ils qualifient de « ruine de nos valeurs » ayant permis tous les « abus, les errements et toutes les perversions qui sont la marque de fabrique de notre modèle sociétal actuel » et en raison de leur responsabilité d’anciens devant l’histoire et le peuple gabonais, les membres du collectif des anciens cadres, notables et dignitaires de la République ont décidé, le 18 mai dernier, devant les forces vives de la nation, de rompre avec le silence et de se lever contre l’indisponibilité temporaire « trop prolongée d’Ali Bongo ».
« Depuis le 24 octobre 2018, le sommet de l’exécutif gabonais pose problème. Il y a une indisponibilité temporaire trop prolongée du chef de l’Etat. Face à une telle situation de blocage généralisé du pays, en partant du sommet de l’exécutif, il apparaît à tous et à chacun urgent et impératif de ne pas laisser la situation se perpétuer et donc, d’évacuer cette impression lancinante de vide du pouvoir, génératrice de multiples questionnements », a déclaré l’ancien ministre des Affaires étrangères sous Omar Bongo, Paul Malekou, mettant en garde les tenants du pouvoir contre toute tentative de « brouiller les pistes à travers des opérations d’enfumage et des montages fantasmagoriques ».
Pour ce collectif, face à cette situation de blocage qui est loin d’être partisane, mais générale et républicaine, tout le monde doit prendre ses responsabilités, chacun à son niveau pour défendre le bien commun qu’est le Gabon. « Le pays va mal, et même très mal. Nous ne pouvons pas nous taire ! Car se taire, en pareilles circonstances, c’est être complice de ce qui se passe, avec les auteurs de ce qui se passe. Ce pays est le nôtre ensemble ! Et pour beaucoup, nous n’avons aucun autre pays de rechange. Ce débat sur la crise de pouvoir est d’intérêt national. C’est un débat républicain et global. Il interpelle donc tous les citoyens, en particulier tous les camps politiques, de la majorité comme de l’opposition », a indiqué le porte-parole du collectif, affirmant que le débat sur la vacance du pouvoir n’est pas clos par le jeu de ballet diplomatique offert quotidiennement au peuple qui ne saurait être dupe.
« À nos âges, nous voulons mourir la paix dans l’âme, en laissant à nos enfants et petits-enfants, un pays normal où il fait bon vivre, comme en rêve tout Gabonais de bonne volonté », a conclu le dignitaire Paul Malekou.
Ce collectif de sages de la République gabonaise pourrait être assimilé au Conseil des Global Elders, également appelé «Anciens ou Sages universels», une célèbre ONG regroupant des personnalités publiques reconnues comme hommes d’État, activistes politiques pour la paix et avocats des droits de l’homme rassemblés par Nelson Mandela en 2007. Le «Collectif d’anciens cadres, notables et dignitaires de la République» en est un peu la version gabonaise. Sera-t-il écouté dans un pays où les gouvernants pratiquent un jeunisme ayant administré à tous la preuve de ses limites ?