C’est ce qu’a signifié le ministre de l’Intérieur, Lambert Noël Matha dans un communiqué fin mars dernier. Le communiqué gouvernemental fustige l’activisme acharné de certains opposants et leaders de la société civile qui continuent de réclamer la vacance du pouvoir, avec en prime, l’organisation d’une élection présidentielle anticipée, et ce, malgré le retour au pays d’Ali Bongo Ondimba. A tous ces opposants à l’affut de la vacance du pouvoir, le patron de l’Intérieur promet désormais des poursuites judiciaires.
Plus qu’un agacement palpable, c’est le signe d’une panique certaine dans les rangs du pouvoir qui embarrassé par l’affaiblissement physique du chef de l’Etat dont les images de l’aéroport de Libreville continuent de faire des vagues, cherche par tous les faux-fuyants à taire définitivement le débat sur la vacance du pouvoir. Et l’arme de bâillonnement, brandit comme d’habitude est bel et bien la justice, puisque le communiqué du Ministre de l’Intérieur appelle à la mise à contribution même de cette justice pour traquer tous les récalcitrants qui osent encore bramer sur cette question de la vacance du pouvoir. Les prétextes avancés, avec une ingéniosité exquise, font état de la déstabilisation des « institutions régulièrement établies » ainsi que la menace par ces opposants de la paix sociale.
Dans le viseur de Matha, c’est le Groupe des dix qui est ciblé, lui qui appelle à agir et qui avait déjà prévu d’agir contre les institutions, si le président Bongo n’était pas rentré au pays avant la fin du mois de mars. D’ailleurs, le retour triomphal d’Ali Bongo Ondimba, quelques jours après cet ultimatum, a été interprété comme une victoire du groupe des dix dont l’avertissement avait fait revenir rapidos le chef de l’Etat, alors qu’il poursuivait tranquillement sa convalescence au Maroc, après son accident vasculaire cérébral le 24 octobre 2018. Certains avancent même que le pouvoir gabonais aurait choisi de faire rentrer au plus vite le président Bongo, afin d’éviter une situation incontrôlable. Surtout au regard du printemps algérien, qui pourrait donner des envies au Gabon au regard de la similarité des situations.
Et c’est pour court-cuiter leurs actions, avec le risque d’un effet domino à l’Algérienne que le gouvernement tente désormais de fermer le clapet à ce Groupe des dix, en empêchant systématiquement la tenue de leur réunions qui deviennent menaçantes pour le pouvoir. Puisque dans cette ambiance d’intimidation symptomatique, ces dix ont été interdits d’accès à la Chambre de Commerce où ils devaient tenir une déclaration qui a finalement été lue dans la rue. Autre cible du gouvernement, la centrale syndicale, Dynamique unitaire qui, dans une déclaration le 28 mars dernier, a, elle aussi, réclamé la constatation de la vacance du pouvoir, estimant qu’Ali Bongo Ondimba, tel qu’exhibé en fanfare à l’aéroport de Libreville, n’est plus capable de diriger le pays. Et que par conséquent, leur rôle en tant qu’acteurs de la société civile, est de tout faire pour contraindre les institutions à reconnaître « l’invalidité définitive » de l’actuel président, avec la mise en place d’un pouvoir transitoire chargé d’organiser une élection anticipée.
Car pensent ces syndicalistes, la situation de blocage actuel du pays n’est autre que la conséquence d’un dysfonctionnement du pays dû à l’état de santé d’Ali Bongo. Mais de l’avis de certains, cette agitation du pouvoir qui tient à tout prix à fermer les bouches sur la vacance du pouvoir n’est autre que le signe d’une inquiétude quant aux capacités physiques et intellectuelles du président de la république à diriger encore valablement le pays. Pour y parvenir, il faut donc trouver un moyen de vicier le débat en l’interdisant par le brandissement de la justice comme collier de la bride politique. La vacance du pouvoir est donc désormais un débat risqué en République Gabonaise.