Cette mesure, prise en conseil des ministres vendredi dernier, devrait permettre de retrancher 15 000 agents de la fonction publique et d’alléger d’autant la masse salariale.
Estimés à 30 000 agents sur les 100 000 fonctionnaires recensés dans le pays, les effectifs de la main-d’œuvre non permanente (Monp) seront réduits de moitié. Ainsi en a décidé le conseil des ministres vendredi dernier. De quoi permettre à l’Etat de réaliser des économies substantielles. Celui-ci dépense en effet chaque année en salaires 32 milliards pour cette seule catégorie d’agents publics, née dans des circonstances particulières.
La Monp découle d’une grève des agents de Gabon Propre Service, il y a une trentaine d’années, qui réclamaient leurs salaires. « Dans un élan social, l’État a récupéré cette main-d’œuvre pour exercer dans l’administration, le temps que leurs sociétés recouvrent une meilleure santé financière. Lorsque Gabon Propre Service a recouvré une meilleure santé financière, certains agents sont retournés auprès de leur employeur, tandis que d’autres sont restés dans l’administration. C’est ainsi qu’est né le système de la main-d’œuvre non permanente», a expliqué le ministre du Budget et des Comptes publics, Jean-Fidèle Otandault.
Alors que ce système concernait à la base des agents de propreté et l’hygiène, il a été étendu à d’autres corps de métiers. « Ce qui a engendré des recrutements à tout va dans l’administration. Au début, l’État déboursait 4 milliards de FCFA par an. 30 ans plus tard, nous sommes à 32 milliards environ », a déploré M. Otandault.
D’où la décision prise en conseil des ministres, qui est une recommandation de la Task force sur les finances publiques visant à assainir la masse salariale de la fonction publique. Si cette mesure a été critiquée par principe – dans un réflexe, il faut le dire, quasi-pavlovien – par quelques voix au sein de l’opposition et du monde syndical, elle était en réalité nécessaire.
Tout d’abord, d’une manière générale, le poids de la fonction publique gabonaise est démesuré. Et pour cause, pendant longtemps, celle-ci a servi de soupape sociale. L’on nommait à la fonction publique pour offrir aux Gabonais des conditions de vie descente. Le pétrole, alors, coulé à flot. C’était donc une façon de répartir la manne au sein de la population. Depuis, les puits se sont quelques peu taris et le cours du brut a chuté. La donne n’est donc plus la même.
Conséquence : aujourd’hui, le Gabon est l’un des pays d’Afrique qui compte le plus d’agents publics par habitant : 55 pour 1000 contre seulement 12 pour 1000 au Cameroun voisin. Le poids des salaires des fonctionnaires pèse lourdement sur les comptes publics. Ceux-ci représentent 50 % des dépenses de l’Etat pour atteindre aujourd’hui le montant exorbitant de 730,9 milliards de Fcfa. Le ratio salaires / recettes budgétaires a en effet explosé ces dernières années : de 15 % en 2005 et 22 % en 2010, il a atteint 51 % en 2016. L’essentiel des ressources publiques est donc consommée par les salaires des fonctionnaires. Une situation qui entrave la capacité du Gabon à investir pour préparer l’avenir,faute de marge de manœuvre financière suffisante.
Il était donc nécessaire d’y mettre un terme. Pourtant, à l’annonce de cette mesure de réduction de moitié des effectifs de la Monp, certains ont poussé des cries d’Orfraie. Avec un argument. Toujours le même : on détruit des emplois. Certes, mais c’est aller un peu vite en besogne. D’une part, ces Cassandre font mine d’ignorer que des mesures d’accompagnement, voire de reclassement sont en cours de réflexion. Les choses ne sont donc pas binaire. D’autre part, ça n’est pas à l’Etat mais aux entreprises de créer des emplois. L’Etat, quand il est bien géré, est là pour créer les conditions propices pour permettre aux entreprises de se développer et créer justement des emplois. Pas pour se substituer à elle.