Membre actif de la société civile, co-initiateur de l’Appel à agir pour le respect de l’article 13 de la Constitution du 28 février, Nicolas Nguema exprime dans cette tribune libre, son dépit face au projet de décret visant à limiter l’attribution des bourses. Par ce projet de réforme, relève-t-il, «il semble que les dirigeants de ce pays tendent à faire de la réalité de leurs différents parcours, celui de la majorité des Gabonais».
«L’éducation c’est la famille qui la donne ; l’instruction c’est l’État qui la doit». Cette citation de Victor Hugo est à rappeler à l’heure où celles et ceux qui ont décidé de présider aux destinées de notre mère patrie, par devers nous, viennent de pondre un projet de réformes fixant les conditions d’obtention des bourses d’études pour les élèves et étudiants gabonais.
Avant de m’étendre sur le projet de réformes en lui-même, il me semble impérieux de revenir sur quelques préceptes que semblent ignorer nos décideurs de circonstances. La déclaration universelle des droits de l’homme (figurant au préambule de la constitution gabonaise), fait du droit à l’éducation, l’un des droits de l’homme.
En ce sens, l’État a le devoir de mettre en place, toutes les structures adéquates et efficientes, en vue de la satisfaction de ce droit des populations vivant sur le territoire. Ce devoir de l’État envers les populations passe, d’abord et avant tout, par la mise à disposition de lieux physiques d’instruction (établissements scolaires), de matériels didactiques (tables et bancs, tableaux noirs, craies, manuels scolaires, etc.), de personnels (enseignants, personnels d’encadrement et autres). Et pour finir, l’État a l’obligation de rendre ces lieux accessibles à tous.
En sommes-nous là aujourd’hui ? Bien évidemment que non. L’incompétence, alliée à l’étroitesse d’esprit de la classe dirigeante, a fait du Gabon le pays où l’État n’ambitionne plus désormais de construire des établissements scolaires, mais des salles de classes. Même en abaissant le curseur, toute entreprise est devenue pour l’État, “Himalayesque “.
La première richesse d’une nation ce sont les humains qui la composent, et non le pétrole et l’Okoumé, ou que sais-je encore ? Une fois ce simple constat posé, que peut-on bien dire de ce projet de réformes ubuesque ? Au Gabon, pays de “la tricherie reine”, où l’État a confié les clés de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieure à des affairistes de l’enseignement qui, au passage sont bien souvent les dirigeants eux-mêmes à l’initiative de ce type de réformes, nous allons assister à l’émergence d’une “pseudo élite dirigeante”, constituée de personnes dont, les parents-tricheurs, auront pu, moyennant espèces sonnantes et trébuchantes, assurer l’arrivée de leurs rejetons au baccalauréat avant l’âge de 19 ans. Si d’aventure le rejeton n’y parvenait pas à temps, il lui resterait tout de même les 12/20, plus simples à monnayer au travers de l’achat des épreuves, où de l’établissement, pour ce qui est de la moyenne générale.
À l’inverse, pour celles et ceux «sans le sou», il leur restera l’unique richesse qu’ils possèdent, à savoir leur corps. Par ce projet de réforme, il semble que les dirigeants de ce pays tendent à faire de la réalité de leurs différents parcours, celui de la majorité des gabonais. Avec un tel personnel dirigeant, dont les parcours académiques troubles et alambiqués n’ont bien souvent d’égal que leurs origines obscures et qui à leur temps et à leur époque, bon nombre d’entre eux ne seraient pas à la place qu’ils occupent, s’ils avaient été assujettis à cette loi. Il ne fait nul doute que les heures les plus sombres de notre pays sont devant nous.
Honte à vous!
Nicolas Nguema, membre actif de la société civile, co-initiateur de “l’Appel à agir”.