Après sa suppression, le Conseil gabonais des chargeurs (CGC) a vu ses missions transférées à l’Office des ports et rades du Gabon (Oprag). Si le gouvernement a motivé sa décision par le souci de rationaliser le budget de l’État, pour le personnel du CGC qui conteste cette décision, la suppression du CGC est une aberration.
Le Conseil gabonais des chargeurs (CGC) n’existe officiellement plus. Le 26 février, le Conseil des ministres avait décidé de sa suppression transférant ses missions à l’Office des ports et rades du Gabon (Oprag). Le 5 mars, la passation de charges entre Liliane Nadège Ngari (ex-directeur général du CGC) et Lelabou Laccruche (directeur général de l’Oprag), a eu lieu consacrant ainsi la cession des activités du CGC.
Si le gouvernement motive sa décision par le souci de rationaliser le budget de l’État, le personnel représenté par Alain Batsielilit, président de la commission ad hoc chargée des négociations avec le gouvernement, estime que cette décision est «une véritable aberration». Selon ce dernier, le CGC n’émarge pas dans le budget de l’État. «De plus, le CGC n’a jamais eu des problèmes de trésorerie», a-t-il assuré. Alain Batsielilit est certain que les tensions financières de ces dernières années sont le résultat de mauvais choix managériaux. Un point de vue contrastant avec celui du gouvernement qui fait plusieurs reproches au CGC, parmi lesquels le non-versement des recettes au Trésor public. Là encore, Alain Batsielilit estime que c’est un faux débat, d’autant plus que le CGC est doté d’une agence comptable. Si les faits incriminés sont avérés, celle-ci n’aurait donc pas joué son rôle. Où sont parties ces recettes estimées à 10 milliards de francs CFA en moyenne par an ? Le représentant du personnel estime légitime de faire la lumière sur la destination de ces fonds.
Ce dernier s’inquiète par ailleurs du sort de ses collègues. Bien que le gouvernement ait précisé que les agents permanents de l’État concernés par cette suppression sont remis à la disposition de leurs administrations d’origine et que la gestion de tous les agents régis par le Code du travail se fera conformément aux lois et règlements en vigueur, Alain Batsielilit n’est pas rassuré. Pour lui, l’État veut «sacrifier plus de 250 familles gabonaises au nom d’une pseudo-rationalisation budgétaire».
Pour Alain Batsielilit, cette décision est dénuée de sens et tue une référence africaine en la matière. Le CGC a inspiré bien d’autres pays africains tentés d’ouvrir des conseils des chargeurs. Il a par exemple été l’initiateur du Bordereau d’identification des cargaisons (Bic), devenu Bordereau d’identification électronique et de traçabilité de cargaisons (BIETC), un outil d’encadrement du trafic utilisé par les conseils des chargeurs africains. De plus, le CGC encourageait la réouverture des conseils de chargeurs partout sur le continent. Et moins d’un mois avant cette décision ubuesque, il a inauguré son nouveau siège, signe de sa vitalité.
Selon Alain Batsielilit, le gouvernement a tué l’acteur principal du trafic multimodal pour confier ses missions à un acteur accessoire. L’Oprag, oppose-t-il, «ne devait pas absorber le CGC, car ses domaines de compétences étaient plus étendus que ceux de l’Oprag». Et ce dernier d’ajouter que «l’Oprag fait la promotion des ports et rades du Gabon alors que le CGC encadrait le trafic multimodal (terrestre, aérien et maritime) national et international». En clair, «l’Oprag est un maillon de la chaîne de transport alors que le CGC était le régulateur». Fort de ces éléments, Alain Batsielilit a invité le gouvernement à revoir sa copie. Le boa vomira-t-il sa juteuse proie ? Les milliards en jeu sont loin d’être indigestes.