Les inondations n’arrivent pas que dans le quartier sous intégré de Kinguélé à Libreville. Le président de la République a-t-il vécu la réplique de ce que vivent les Gabonais dont les maisons s’inondent à la moindre grande averse ? On ne saurait l’affirmer. Mais, les abords de sa villa à La Sablière donnaient cette impression, à la suite de la pluie tombée dans la nuit du 15 au 16 mai 2014. Extrapolations et petit commentaire.
La résidence présidentielle dite «Villa Marocaine» à La Sablière, le quartier huppé du nord de Libreville, a été inondée suite à la pluie tombée dans la nuit du jeudi au vendredi 16 mai 2014. Des photos faisant preuve du fait circulent sur l’Internet et ses réseaux sociaux tandis que les commentaires vont bon train, aussi invraisemblables que désopilants et parfois métaphysiques.
«Non …non…. en dehors des quartiers sous intégrés, des populations qui construisent sans plan… et qui doivent déguerpir… la sablière aussi est construite sans plan?», interroge un internaute sur Infos Kinguélé, le plus grand des réseaux sociaux gabonais avec ses 25000 membres. «Suite aux inondations enregistrées du côté de la sablière, dans le premier arrondissement de la Commune d’Akanda, allez-vous manifester votre élan de solidarité vis-à-vis de nos compatriotes? Proposerez vous au gouvernement de détruire ces constructions anarchiques non sans avoir trouvé des zones de relogement?», lit-on encore sur les pages Facebook du même réseau. Comme quoi, les catastrophes naturelles n’arrivent pas seulement dans les quartiers pauvres. Et si cela prête à un certain humour pour certains, le fait donne également à s’interroger.
Et l’on en vient à se rappeler que les remblais maritimes et l’empiètement sur le littoral ont nécessairement un effet sur l’environnement. A en croire Christian Serge Maroga, défunt président du Rassemblement des démocrates (RDD) et candidat à l’élection présidentielle de 2005, le quartier de La Sablière devrait être rasé, parce qu’il s’est érigé sans le respect des normes de la protection environnementale. Géographe de formation, il expliquait, lors d’une émission de télévision dans le cadre de l’élection présidentielle qui l’opposait alors à Omar Bongo, entre autres, que la construction sans étude d’impact environnemental de l’hôtel Dialogue – aujourd’hui rasé – était à l’origine de l’avancée du Komo qui rongeait le boulevard du bord de mer au niveau de l’ancien night-club «La Maringa» et en face de l’ancien gouvernorat.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on pourrait, par déduction, dire que les causes contraires produisent des effets contraires. Ainsi, ne devrait-on pas penser que le remblai qui s’effectue actuellement autour du Port-Môle, de l’ancien gouvernorat à Jeanne Ebori, serait à l’origine de l’inondation de la «Villa Marocaine» à La Sablière ? S’il n’est question ici que d’extrapolation, on ne devrait oublier qu’alors qu’on annonçait la reconstruction de l’hôtel Dialogue, les chercheurs du Centre national des données et de l’information océanographique (CNDIO), François Edgard Faure, Magloire Désiré Mounganga et Nicaise Rabenkogo, avaient d’une certaine manière prédit des dégâts naturels sur certaines parties du littoral de Libreville, situé sur la rive droit de l’estuaire du Komo (un des trois plus importants fleuves du pays, après l’Ogooué et la Nyanga).
L’actuel remblai géant, consistant à draguer le lit de l’Estuaire du Komo, à pomper son sable pour le projeter sur la rive et le bloquer avec des digues pour les besoins de la construction de la marina «futuriste» du Port-Môle, ne serait donc pas étranger à l’inondation survenue à la villa présidentielle de La Sablière. Les baraquements construits autour, pour la Garde républicaine, n’y ont échappé que du fait d’être construits sur de petits pilotis. Mais qu’a-t-il donc pu se passer dans l’enceinte de la villa, voire dans l’habitation elle-même ?
En tout cas, dans les commentaires qui en découlent, nombreux parlent de la revanche de Dame Nature ; d’aucuns de signe du temps. Une chose est en tout cas sûre : l’étude d’impact du projet de construction de la Marina du Port-Môle devient une Arlésienne dès qu’on demande à la consulter.