Soupçonné d’avoir financé la tentative de coup de force d’André Okombi Salissa, en 2016, le président gabonais est cité par les avocats du prévenu comme un des principaux témoins dont l’audition est nécessaire pour établir toute la vérité dans cette affaire. Ali Bongo est donc attendu au Congo.
En convalescence depuis fin novembre 2018 à Rabat au Maroc, Ali Bongo aura-t-il la force de se rendre à Brazzaville le 31 janvier prochain ? Pas sûr. Il n’empêche, le président gabonais y est attendu parce que cité, le 16 janvier, comme témoin par les avocats d’André Okombi Salissa, arrêté en janvier 2017. L’opposant congolais, challenger de Denis Sassou Nguesso lors de la présidentielle de mars 2016, est accusé d’«atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat». Son procès a repris ce jeudi 17 janvier avant d’être renvoyé au bout d’une trentaine de minutes.
La veille, en effet, Me Yvon Eric Ibouanga et ses quatre collègues ont adressé une correspondance au procureur général près la Cour d’appel de Brazzaville dans laquelle ils lui notifiaient «les noms des personnes dont l’audition et la comparution sont nécessaires» pour faire toute la lumière sur l’affaire liée à leur client. Dans cette correspondance, le nom d’Ali Bongo apparaît au même titre que celui de Pamphile Mesmin Okieri, présenté comme Commandant à la sécurité extérieure à la présidence de la République gabonaise.
En demandant leur comparution en tant que témoins, les avocats de l’ancien ministre congolais entendent faire jouer le «principe de contradiction» et garantir les droits de la défense.
A Brazzaville, certains désignent clairement Ali Bongo et le militaire comme les principaux complices d’André Okombi Salissa. «Brazzaville accuse Libreville d’avoir soutenu financièrement l’opposant», rapporte le site Financialafrik.com, rappelant que quelques années auparavant, le régime congolais «suspectait [déjà] le Gabon de servir de refuge à ses opposants Mokoko et Okombi».
Ali Bongo, fournisseur d’armes et de mallettes d’argent ?
Appuyant les soupçons de Brazzaville, «une source proche de l’instruction» confie au site Zianatv.com que «les services ont pu établir que M. Okombi Salissa bénéficie de complicités en haut lieu au Gabon pour organiser un coup de force au Congo», notamment grâce au financement consenti par le président gabonais.
En février 2016, Portail242.info avait tenté de démontrer «comment Ali Bongo arme et finance Okombi Salissa». Le site congolais disait tenir ses informations d’un «témoignage» du commandant Pamphile Mesmin Okieri livré aux forces de sécurité congolaises à qui il aurait révélé à l’époque qu’Ali Bongo Ondimba avait fourni «des armes et des mallettes d’argent» à André Okombi Salissa, «en vue de le soutenir dans sa conquête de pouvoir».
Devant le ministre de la Défense d’alors, Ernest Mpouoh, «le président Ali me précise la mission qui est la mienne, en me disant de sa propre bouche : ’’Est-ce que tu sais que le Président Sassou cherche à me déstabiliser?’’ C’est là où je réagis : ’’Sassou ?’’», raconte Okieri. Ce à quoi il répond : «Oui ! il soutient mes opposants, il les finance et moi aussi je vais lui faire la même chose», révèle Okéri, dans une déposition, le 4 février 2016 à Brazzaville.
Toutefois, si le président gabonais et le militaire (chargé de l’achat des armes en Israël et en Afrique du sud) apparaissent dans l’affaire, la justice congolaise pourrait bien se servir du procès-verbal de l’interrogatoire de Pamphile Mesmin Okieri qui, s’il existe véritablement, contient les noms d’autres personnalités gabonaises parmi lesquelles Idriss Ngari, l’oncle du militaire, et le Général Grégoire Nkouna. Seront-ils, eux aussi, appelés à témoigner ? Ça reste à voir. Le procès, lui, devrait reprendre le 31 janvier 2019.