Sous la seule responsabilité du Sénat, le Projet de loi de finances (PLF) 2019, a été adopté le 31 décembre 2018. Avant de donner leurs voix, les centristes, par la voix d’Hugues Bessaques, ont dressé le bilan des trois dernières années où les budgets ont été alloués mais jamais exécutés
Le sénateur Hugues Bessaques n’a pas eu des mots tendres lors de la plénière du Sénat sur l’adoption du Projet de loi de finances, le 31 décembre 2018. «Lorsqu’on vous donne de gérer des hommes, ce n’est pas un droit à leur maltraitance qu’on vous donne», a-t-il déclaré, s’adressant au président du Sénat, Lucie Milébou Aubusson, ainsi qu’à ceux qu’il a qualifié de ministres financiers. «Pour cette année, la question que nous posons à l’endroit des ministres financiers, est de savoir comment ont-ils confectionné ce budget? Y-a-t-il eu conférence budgétaire?», s’est-il interrogé, répondant par la négative. Selon lui, les ministres passés au Sénat défendre leurs budgets ont assuré qu’ils ne savent pas comment ces budgets leur sont alloués.
Selon Hugues Bessaques, certains départements ministériels n’engagent pas la totalité de leurs budgets tandis que d’autres en redemandent. «Le budget de l’Enseignement supérieur est si maigre que nous nous demandons, quelle éducation et quel enseignement pour nos enfants? L’UOB se meurt sous nos yeux mais ça n’a pas l’air de nous émouvoir», s’est-t-il ému. Dans le domaine de la Santé, il dénonce le fait que 100 milliards sont alloués aux personnes âgées alors que leur impact n’est pas ressenti. «L’hôpital de Moanda était la préoccupation d’un vénérable sénateur. Depuis 9 ans, on attend son achèvement. A quand son ouverture?», questionne-t-il.
A en croire ce dernier, depuis 3ans les crédits sont alloués et inscrits, «mais jamais exécutés». «Seul 30% maximum du budget est exécuté. Où est alors le résultat de ces budgets non-exécutés? Soit 80% des fonds. Là j’insiste messieurs les ministres financiers, le reste de ces budgets non exécutés pour le développement du pays, où va-t-il ?», a-t-il formulé. Aussi, dit-il, le Gabon ne paie plus ses cotisations internationales. Conséquence, les ambassadeurs rappelés ne peuvent pas regagner le pays faute de moyen pour le rapatriement. «Sommes-nous tombés si bas? Mme le président, pendant que nous cherchons 50 ou 100 millions pour rapatrier nos ambassadeurs, un fonctionnaire dans son bureau soustrait les mêmes frais à son poste. Nous sommes ici capables de le dire. Les incohérences budgétaires sont visibles dans tous les départements ministériels. Des comptes parallèles sont ouverts dans l’illégalité afin de mieux capter les ressources générées au profit des individus mais pas de l’Etat», a-t-il accusé.
Selon lui, les entreprises gabonaises ne sont toujours pas payées et tiennent le gouvernement pour «responsable de leur clochardisation». «A vous messieurs les ministres financiers et vos fonctionnaires: quelles entreprises payez-vous?», a-t-il lancé.
Le sénateur estime par ailleurs que la Caisse des dépôts et consignations (CDC) a failli à sa mission. «Créée pour rendre fluide la gestion des budgets des différentes administrations publiques et para publiques, elle s’est plutôt illustrée dans la gabegie et la mauvaise gestion des ressources financières. A ce jour sa fermeture est presqu’acquise. Au lieu d’être un outil de performance pour la gestion de nos finances publiques, elle est plutôt un moyen de distraction de fonds publics», dit-il demandant une «enquête parlementaire». De même, il s’est interrogé sur la destination des cotisations de CNAMGS, au regard des difficultés de fonctionnement de cette structure.
Alors que les fonctionnaires hauts placés au ministère de finances affirment que les ressources du pays sont gérées par un service spécialisé logé à la présidence de la République, le sénateur plaide pour leur retour au Trésor public. «C’est cela la norme et c’est aussi cela que nous impose l’orthodoxie financière», dit-il.
Au regard de ces différentes dérives, Hugues Bessaques s’interroge sur le rôle du Parlement et son pouvoir de contrôle de l’action du gouvernement. Heurté par ce constat d’échec, lui et les centristes ont dit voté pour la dernière fois le PLF et ont assuré «qu’ils ne voteront plus jamais de tels budgets pour ne pas être complices des incohérences budgétaires, volontaires constatées».