Le conseiller spécial d’Ali Bongo et porte-parole de la présidence de la République aurait tenté d’initier, ces deux derniers mois, un «audit de sécurité» au Gabon sans en informer Frédéric Bongo Ondimba, le chef du Renseignement. Les services spéciaux locaux en ont plutôt une autre version mettant en scène Noureddine Bongo-Valentin.
Au palais de la Rénovation à Libreville règne ces dernières semaines un climat de tension empreint de suspicion. Sans que personne n’ait le courage d’en parler ouvertement, les couloirs de la présidence de la République ne bruissent pas moins depuis la virée de Sandy Obame à la Direction générale des Recherches (DGR), en novembre. Ce mercredi 2 janvier, La lettre du continent révèle que la secrétaire de Ike Ngouoni avait été entendue au sujet d’un mystérieux «audit de sécurité» que son patron aurait commandité à un groupe d’anciens militaires français peu après le début des ennuis de santé d’Ali Bongo.
En quoi ce fameux audit consistait-il ? Pourquoi a-t-on tenté de le lancer et qui était chargé de le faire ? Peu voire très peu de personnes au Palais du bord de mer savent de quoi il retourne, au point que Frédéric Bongo Ondimba, pourtant patron du Renseignement et demi-frère d’Ali Bongo, a été obligé d’ouvrir une enquête pour y voir clair. D’autant que tout aurait été fait dans son dos.
Si l’enquête aurait établi la responsabilité de Ike Ngouoni dans cette initiative, elle a également permis d’appréhender, le 8 décembre à l’aéroport de Libreville, un des membres du commando français, Stephan Privat. Interrogé par la Sécurité militaire gabonaise, l’ancien sous-officier du 8e Régiment de parachutistes d’infanterie de marine (RPIMa) a, en effet, reconnu que ses allées et venues entre la France et le Gabon Libreville avaient lieu dans le cadre de cet «audit de sécurité» supposément commandité par le porte-parole de la présidence de la République.
Version locale
La version de La Lettre du continent n’est pas vraiment corroborée par les sources des services spéciaux gabonais. Dans ce milieu proche de la présidence de la République, il se raconte que Sandy Obame (Sandy Ntsame Obame épouse Lefandy pour l’Etat-civil), attachée de cabinet de Ike Ngouoni, avait plutôt été entendue à la Direction générale de la Contre-Ingérence et de la Sécurité militaire (B2) pour avoir facilité les formalités d’entrée au Gabon du fameux Stephan Privat. Elle agissait sous les ordres de son patron, lui-même en affaire avec Noureddine Edouard Bongo-Valentin, le fils d’Ali Bongo. Celui-ci projetait la création d’une entreprise de sécurité et gardiennage au titre de quoi, il aurait sollicité l’expertise du fameux monsieur Privat.
L’ancien «gendarme français», tel qu’en parlent les sources locales sus citées, devait effectuer un audit sommaire de la Société gabonaise de services, la fameuse SGS aujourd’hui en difficulté et dans laquelle il a été recommandé à Noureddine Bongo-Valentin de prendre des parts. Le présumé mercenaire n’y a jamais pointé le nez au point d’éveiller les soupçons ayant conduit à sa filature puis à son interpellation, le 8 décembre dernier. Dans les cercles militaires locaux, où l’on soutient qu’Ike Ngouoni n’est qu’au service de Noureddine Bongo à qui il sert bien souvent de fusible, le débat tourne autour du projet du fils ainé d’Ali Bongo (26 ans) de monter une entreprise militaire et de sécurité privée (EMSP), nid par excellence des mercenaires et anciens militaires. Le fils de Sylvia Bongo aurait-il des velléités de prise du pouvoir, se demande-t-on.
La lettre du continent croit savoir que Stephan Privat a séjourné à Rabat entre le 27 novembre et le 1er décembre, où il a rencontré Ike Ngouoni et Brice Laccruche Alihanga le directeur de cabinet d’Ali Bongo. A Libreville, il était accompagné, toujours selon le média d’information confidentiel, de 10 autres vétérans des forces spéciales françaises, logés à La Sablière et à Batterie 4. Tous les 11 ne seraient plus sur le territoire national. Leur mission aurait été abandonnée.