Les chrétiens répondent par l’affirmative à cette question tandis qu’une partie de l’opinion en doute. Les églises dites de réveil prolifèrent depuis quelques années au Gabon, au point que certains les voient imposer un nouvel ordre religieux suscitant bien d’interrogations.
Ministère du plein évangile, église, chapelle, camp de prière, les églises dites de réveil ont plusieurs appellations, foisonnent à travers le pays et attirent chaque jour un peu plus de fidèles. A défaut de véritables temples, des espaces improvisés servent de site de prière. Salon, terrasse, cours et autres lieux parfois improbables sont mis à profit et les fidèles n’y voient aucun inconvénient. «La multiplication des églises est une bonne chose, parce que si la parole de Dieu entre dans les familles, base de l’éducation des enfants, c’est très bien. C’est le pays entier qui est béni», estime une fidèle du ministère du Combat spirituel pour qui Dieu peut être adoré partout et n’importe où.
Ces églises s’inspirent du grand réveil religieux du 19e siècle aux Etats-Unis et du renouveau charismatique chez les catholiques mais regorgent de nombreux pasteurs autoproclamés. «Je ne suis pas pasteur par hasard», disent-ils bien souvent. Certains d’entre eux se contentent de leur famille et voisinage comme fidèles alors que les meilleurs tribuns, ceux qui ont le maniement facile de la langue, attirent des foules.
Leurs thèmes de prédilection sont la richesse, la guérison et la sorcellerie. Les promoteurs d’églises éveillées déclarent avoir pour mission d’enseigner la bonne nouvelle et d’aider le pays à lutter contre toute sorte de maux afin qu’il puisse jouir de sa bénédiction. «C’est une grâce que le Gabon ait autant d’églises. La parole de Dieu déclare heureuse la Nation dont l’Eternel est Dieu. Ces églises sont pour nous le signe de la prise de conscience. C’est une bénédiction pour le pays», déclare le pasteur de l’une de ces églises. Sans avoir eu un brillant parcours ou obtenu un diplôme de théologie, il a «décidé de tout abandonner» pour se «consacrer à l’œuvre de Dieu». Il vit de la dime, des offrandes et autres dons de ses fidèles.
«C’est là où le bât blesse», pensent certains. Pour ceux-ci, de nombreux pasteurs pratiquent davantage du business qu’ils ne font du pastorat. Pour augmenter leurs audiences voire leurs sphères d’influence, certains à défaut de disposer de médias, utilisent tous les canaux possibles pour atteindre leurs objectifs. Ceux qui, paradoxalement, croient aux féticheurs ou sorciers n’hésitent pas à les fréquenter en vue d’obtenir des amulettes du succès ou «la fameuse bague qui fait tomber des foules». Ceux qui peuvent disposer de tentacules s’infiltrent dans le système pour en tirer profit de quelques manières.
«Quand je suis allée à l’église je cherchais du travail. Le pasteur a prié pour moi et comme il a des relations bien placées, il m’a trouvé du travail ainsi qu’à un autre frère en Christ. Il nous avait dit qu’on devait toujours payer nos dimes, offrandes, dons et penser à lui. Mais, un jour il nous a convoqués pour nous dire qu’il a des problèmes. Il nous a donc exigé de lui verser la totalité de nos salaires parce que c’est lui qui nous a trouvé le travail et il doit régler ses problèmes», raconte une fidèle qui pense finalement avoir été berné.
Pour elle, seuls les aspects lucratifs font courir un bon nombre de ces pasteurs, si bien qu’ils compromettent «la noble mission» de l’Eglise. «Quand on regarde même les campagnes d’affichage des hommes de Dieu à travers la ville, elles sont extravagantes. Finalement c’est pour le bien de qui ? Dieu ou de ces hommes ?», s’est-elle interrogé estimant que cette prolifération n’honore finalement pas le pays.