C’était à la faveur d’un périple de six jours sur le continent africain débuté ce jeudi 8 mars 2018 en Éthiopie.
Avant de se rendre à Djibouti, au Kenya, au Tchad et au Nigeria, le secrétaire d'Etat américain, Rex Tillerson était ce 08 mars 2018, au siège de l'Union africaine à Addis-Abeba où il s'est entretenu avec le président de la Commission, Moussa Faki Mahamat. Les deux hommes ont évoqué la lutte contre le terrorisme, mais aussi la présence chinoise en Afrique.
Rex Tillerson a conseillé la prudence aux pays africains. La prudence dans les contrats signés avec des entreprises chinoises. Des contrats pas toujours bénéfiques pour les pays du continent, selon le chef de la diplomatie américaine.
« Ils ne créent pas assez d'emplois, localement, ne forment pas assez les gens pour qu'ils participent davantage à l'économie de leur pays dans le futur. Et souvent le modèle de financement est fait d'une telle manière que lorsque le pays a des difficultés financières, il perd le contrôle de ses propres infrastructures, de ses propres ressources », a estimé Rex Tillerson.
Ne pas donner de leçons
Mais Rex Tillerson se défend de donner des leçons. « Nous n'essayons pas d'empêcher les investissements chinois en Afrique, le continent en a tellement besoin ! Cependant nous pensons qu'il est important que les pays africains réfléchissent soigneusement aux termes de ces investissements », a-t-il poursuivi.
Assis à ses côtés lors de la conférence de presse, le président de la Commission de l'UA, Moussa Faki Mahamat ne semble pas tout à fait d'accord. « Je pense que les Africains sont suffisamment mûrs pour pouvoir s'engager eux-mêmes, de leur propre gré, dans des partenariats qui'ils jugent utiles pour leur continent. Je pense que nous savons parfaitement où se trouvent nos intérêts », répond-il. Moussa Faki Mahamat s'était justement rendu en Chine il y a quelques semaines.
La crise politique éthiopienne en toile de fond
Dans son tête à tête avec le ministre éthiopien des Affaires étrangères, Workneh Gebeyehu, Rex Tillerson est revenu sur la crise politique actuelle en Ethiopie : un Premier ministre qui gère les affaires courantes en attendant que la coalition de quatre partis lui trouve un remplaçant, des manifestations sporadiques avec des morts en région Oromia, selon certains médias, et surtout un état d’urgence donnant des prérogatives très larges à l’armée et à la police fédérale.
Une très mauvaise solution, selon le secrétaire d’Etat américain qui l’a expliqué devant la presse. Selon lui, il faut au contraire accorder plus de liberté aux populations plutôt que de mettre en œuvre des mesures restrictives, comme c’est actuellement le cas depuis trois semaines. Rex Tillerson veut croire que les autorités d’Addis-Abeba vont lever le plus vite possible l’état d’urgence.
Même l’une des télévisions officielles éthiopiennes, Fana, a évoqué ces critiques tout en mettant plutôt l’accent sur l’appel à la patience de Rex Tillerson à l’attention du peuple éthiopien. Le chef de la diplomatie américaine dit aussi partager les inquiétudes quant aux violences : « L’Ethiopie est une jeune démocratie », a-t-il conclu. Un allié crucial des Etats-Unis dans la région, notamment contre les islamistes shebabs somaliens, mais un allié qui n’a peut-être plus crédit illimité à Washington.