Le conflit qui oppose l’Etat gabonais au groupe français Veolia met en lumière une série de magouilles qui remet en question la responsabilité de l’Etat dans le suivi des certains dossiers notamment celui de la dette due aux entreprises privées nationales.
C’est la dette de l’Etat à la SEEG, entreprise détenue à hauteur de 51% par le groupe français Veolia, que nous qualifions de ‘’dette de la discorde’’ qui retient notre attention et pose les bases d’un constat quasi-généralisé à l’ensemble des relations de l’Etat avec le secteur privé. Arrêtée à 44 milliards de francs CFA d’après les calculs des responsables de la SEEG, celle-ci s’élève selon le gouvernement à plus de 13 milliards de francs CFA au 31 décembre 2016. Même à ce niveau de calcul, l’Etat n’est pas rassuré et craint qu’en fouillant bien, « ce montant ne soit pas totalement justifié » au regard selon les propos du ministre de la communication, porte-parole du gouvernement, Alain-Claude Bilié-By-Nze de « la légèreté présentée dans la facturation des consommations de l’Etat en eau et en électricité ». Ce qui nécessite un audit et montre par extension la légèreté dans le suivi des charges de l’Etat.
En effet, la question qui peut se poser est peut-être celle de savoir comment l’Etat, qui est censé êtrele garant de la transparence, peut jouir des services d’une entreprise privée sans avoir la traçabilité de ses consommations ? Le caractère litigieux de cette dette tout comme d’ailleurs l’étonnement de l’Etat devant le montant avancé par la SEEG montre la non maîtrise par ce dernier de cette dette alors que le bilan de celle-ci, si l’on s’en tient aux propos du ministre de la Communication avait été établie au 31 décembre 2016 soit, un an avant le litige actuel. Ce qui aurait pu laisser à l’Etat une marge de contrôle.
A l’opposé de cette possibilité, le doute du ministre de la Communication quant au montant arrêté qui est de 13 milliards de francs laisse de même, transparaitre une spéculation de calculs donc, une simulation de la somme de cette dette. Or, la lucidité d’action d’un gouvernement qui auprès des organismes internationaux prône la viabilité de ses finances publiques donc, une traçabilité dans les dépenses de l’Etat voudrait que le contrôle soit non seulement le maître-mot mais également la boussole d’action. Ce qui à l’analyse du dilemme actuel n’a pas été le cas. L’Etat s’est contenté comme souvent, de consommer sans jamais calculer le niveau de ces consommations. Cela s’explique par la divergence des sommes arrêtées de part et d’autres au sommet de l’administration. A la Présidence de la République, on parle d’une « petite ardoise » de 4 milliards de francs CFA tandis que chez le porte-parole du gouvernement on avance un montant de 13 milliards de francs CFA.
Cette situation qui tend à remettre en cause l’action de l’Etat dans la maîtrise de ses dépenses n’est cependant pas nouvelle. En 2015, alors qu’éclatait le conflit qui opposait le groupement Santullo-Sericom à l’Etat, une divergence d’attente concernant le montant exact de la dette de l’Etat auprès du groupe avait éclaté. Comme avec le cas actuel de la SEEG, les parties avaient du mal à se mettre d’accord sur la redevance réelle de l’Etat vis-à-vis du groupe en raison des surfacturations constaté. Ce qui avait conduit à d’importantes tractations. A la lumière de ces deux affaires qui se rejoignent à point crucial (les montants de la dette), il ressort des failles dans le dispositif de l’Etat de gestion de ses dettes dues aux partenaires privés nationaux. Et s’il était temps de dynamiser l’action des contrôles !