N’ayant jamais abordé les législatives en rangs serrés, s’étant systématiquement révélée incapable de présenter des candidats sur l’ensemble des circonscriptions, l’opposition parait déterminée à user de la recette de la dernière présidentielle.
Clarifier les règles, élaborer les procédures, documenter les délibérations, déléguer les questions techniques aux commissions ad hoc. Autrement dit, trouver le compromis le plus satisfaisant pour toutes les parties. Dans la perspective des législatives à venir, l’opposition aurait-elle opté pour une stratégie unitaire ? Intervenant lors du 8è anniversaire de son parti, le président de l’Union nationale l’a laissé entendre. Affirmant y travailler aux côtés d’autres acteurs, il a indiqué devoir rendre les conclusions très bientôt. Désireux d’accroître leurs chances de s’imposer, certaines formations politiques, notamment Les Démocrates, le Rassemblement héritage et modernité, l’Union nationale et l’Union et Solidarité auraient, de toute évidence, décidé d’y aller en rangs serrés. «Organisation et fonctionnement», «programme de gouvernement», «modalités de désignation des candidats», «sécurisation et contrôle du scrutin», «modalités d’organisation de la campagne», «financement et logistique», «communication» : analysée et conçue par des équipes dédiées, l’alliance politique et électorale se construit pied à pied, sans tambour ni trompette. Manifestement, Guy Nzouba-Ndama, Alexandre Barro-Chambrier, Zacharie Myboto et Jean de Dieu Moukagni Iwangou veulent demeurer fidèles à l’esprit de la présidentielle d’août 2016.
Certes un débat sur l’opportunité de cette participation se développe chaque jour davantage. Certes le réquisitoire se fait toujours plus acerbe et violent. Certes ces divergences d’approche font craindre une implosion de la Coalition pour la nouvelle république (CNR). Mais les pro-législatives disent poursuivre un seul et unique objectif : l’alternance par la voie démocratique. Ressassés à longueur de journée, les arguments des anti-législatives se fracassent invariablement contre une évidence historique : jamais l’opposition n’a abordé les législatives en rangs serrés, ses différentes composantes se révélant systématiquement incapables de présenter des candidats sur l’ensemble du territoire national. A cela s’ajoute une certitude juridique : entre la présidentielle et les législatives, les modalités de centralisation et de proclamation des résultats différent radicalement. Est-ce suffisant pour justifier une participation ? Est-ce de nature à offrir des garanties de transparence et de crédibilité ? Faute d’y répondre ou de contourner ces questions, l’opposition devrait réfléchir au sens de sa participation. Sans un mécanisme fiable de sécurisation et de contrôle du scrutin, elle pourrait bien aller au casse-pipe.
Défi
Effectivement, la sécurisation du scrutin requiert des moyens humains, logistiques et financiers colossaux. Sur l’ensemble du territoire national, elle exige, au bas mot, la mobilisation de 3 000 personnes, si ce n’est le double ou le triple. C’est dire le défi logistique, financier et humain. C’est aussi dire l’immensité de la tâche. Or si la plupart des ténors de l’opposition sont des vieux routiers de la politique nationale, des habitués des scrutins, leurs partis sont des novices en la matière. Créés durant la législature finissante, ils ont, pour l’essentiel, une faible expérience électorale. L’Union nationale ayant boycotté celles de 2011, aucun parti membre de la CNR ne peut affirmer avoir pris part à des législatives intégrales. Du coup, la mutualisation des moyens et équipes apparaît comme une nécessité. Revendiquant la victoire supposée de Jean Ping à la dernière présidentielle, l’opposition va-t-elle reconduire la recette d’août 2016 ? Tout l’indique. Reste à voir si elle y parviendra. Reste aussi à savoir comment elle entend s’assurer de la restitution de la vérité des urnes par les institutions en charge de l’organisation.
Pour autant, cette mécanique ne pourra fonctionner de manière optimale si la position de Jean Ping n’est pas préalablement clarifiée. En clair, pour maximiser ses chances, l’opposition est condamnée à s’assurer de l’engagement résolu ou tout au moins du soutien de son leader. Faute de quoi, elle pourrait se heurter à la réticence d’une partie de sa base, désabusée et désorientée par l’issue finale de la dernière présidentielle. Pour l’heure, la présence du président de la CNR au siège de l’Union nationale nourrit toutes les hypothèses. Jean Ping aurait-il décidé de conduire la bataille des législatives ? Rien ne permet de l’affirmer. Aurait-il opté pour un mutisme engageant ? Rien ne l’atteste non plus. N’empêche, de nombreuses confidences font état de ses réserves au sujet d’une participation aux législatives. Comme on peut le deviner, le pouvoir doit observer tout cela avec un certain intérêt. Peut-être une raison d’essayer de reproduire le 15 août 2016…