La question des avantages fiscaux accordés à plusieurs opérateurs économiques afin de booster l’investissement par le mécanisme de contreparties signées avec le gouvernement continue d’alimenter l’actualité nationale. Quelques jours après l’audition du directeur général des Impôts, François Auguste Akomezogho, par le directeur de cabinet du Chef de l’Etat, Brice Laccruche Alihanga, l’opinion s’attendait à un bilan exhaustif de ces exonérations lors de la conférence de presse animée le lundi 5 février dernier à son siège. Malheureusement les représentants de cette entité se sont bornés à une série dénonciations sans vraiment convaincre.
La rencontre du 5 février dernier avec la presse nationale et internationale marquait non seulement le lancement de l’opération «Justice fiscale» mais devait également permettre de faire l’état des lieux des avantages fiscaux octroyés aux opérateurs économiques. Une occasion manquée, selon certains hommes de media qui n’ont pas été convaincus des exposés du directeur des régimes spécifiques, Pamphile Eyouga, du chef de service relations publiques, Sylvestre Oyouomi-A-Loury et du chef de service contentieux, Paul N°2 Abessolo Minto’o.
Pour une direction financière chargée de la collecte des impôts, l’opinion s’attendait à une mise au point détaillée du coût des exonérations fiscales accordées aux opérateurs économiques au préalable. Ce qui, il faut le souligner, aurait eu le mérite d’édifier le contribuable sur l’opportunité de cette mesure prise par le gouvernement il y a bientôt plusieurs années sans que l’on n’en perçoive les retombés.
Sur le plan légal, il faut rappeler que la Constitution de la République gabonaise affirme le principe du consentement à l’impôt, celui de sa légalité, de sa proportionnalité aux capacités contributives tout en insistant sur «l’égalité des citoyens devant l’impôt». En outre, la sécurité juridique des contribuables est garantie par le fait que l’administration est liée par ses prises de position qui lui sont par ailleurs opposables. Aussi le contribuable dispose-t-il de recours administratifs et juridictionnels lorsqu’il entend contester l’assiette de l’impôt. Toute chose qui suppose que ce dernier est en droit d’obtenir des informations concernant les avantages accordés à certains opérateurs qui, au demeurant, font déjà entorse au principe de l’égalité des citoyens devant l’impôt.
Pis, lors de cette rencontre, le directeur des régimes spécifiques a informé «le grand public, et particulièrement les opérateurs économiques, du démarrage imminent de l’opération «Justice fiscale» qui permettra d’auditionner, d’examiner et d’évaluer les contreparties des exonérations fiscales qui ont été accordées à tous les opérateurs concernés lors de ces dernières années». Quid du bilan de ces avantages qui, sans nul doute, a eu des répercussions négatives sur les recettes fiscales de l’Etat. Les citoyens gabonais auraient souhaité d’ailleurs avoir de ces responsables des détails chiffrés sur cette mesure gouvernementale dont l’application était dévolue à la Direction générale des impôts. Dans sa communication, la DGI s’est limitée fort malheureusement à psalmodier des arguments sans réelle consistance et qui, au demeurant, justifie par le remue menage observé ces derniers jours suite à l’audition à la présidence de la République, donnant l’impression de panique au sein de cette administration.
Il n’est un secret pour personne, l’administration gabonaise est gangrenée par des maux qui ralentissent considérablement son fonctionnement; ajouté à cela le manque de communication dans ces différentes structures qui donne l’impression d’une gestion opaque de la chose publique. Dans l’opinion, il se dit que sans l’intervention de la Présidence, la Direction générale des impôts, comme beaucoup d’autres entités avant elle, n’aurait jamais pensé à rendre des comptes au contribuable gabonais.
Autre point et non des moindres, il y a quelques mois, l’ancien ministre délégué à l’Economie, Noël Mboumba, tirait déjà la sonnette d’alarme sur l’opacité qui régnait autour des exonérations accordées à certains opérateurs économiques. Il appelait en ce temps à un audit sur ces mesures qui semblaient être entourées d’un flou déconcertant. A cette interpellation, le contribuable n’a fait que constater le silence assourdissant de la DGI qui, clairement, n’est pas exemptée de tout reproche dans ce qui se passe aujourd’hui.
Avec le lancement de cette opération à l’initiative de l’exécutif, il serait intéressant non seulement de procéder à la «vérification des contreparties réalisées par les bénéficiaires» mais il faudrait également que la Direction général des impôts, pour le strict respect des normes, fournisse au préalable un inventaire exhaustif des opérateurs ayant bénéficié de ces avantages et quel a été l’incident de cette mesure sur les recettes fiscales de l’Etat. Cela ne serait que justice pour le contribuable gabonais qui a le droit de savoir.