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Haro sur l’obséquiosité des politiques
Publié le samedi 27 janvier 2018  |  Gabon Review
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© Gabon Review par DR
La flagornerie des politiques gabonais vient de loin : Paul Mba Abessole à genoux devant Omar Bongo et en public sur le boulevard de l’indépendance
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Des ministres qui s’agenouillent devant le président de la République, des ministres et hauts cadres qui se prosternent en public avant de passer dans le champ visuel du président de la République, le protocole tirant ostentatoirement la chaise à celui-ci… la télévision gabonaise pourrait bien occulter ces images pas du tout reluisantes pour la nomenklatura gabonaise et pour l’image du pays, déjà soupçonné d’inclination monarchique avec la dernière révision constitutionnelle.

Les comptes-rendus télévisuels des Conseils des ministres montrent aux téléspectateurs des membres du gouvernement dans des postures pas du tout avantageuses. Selon un diplomate occidental en poste à Libreville, il s’agit de «positions honteuses et déshonorantes» pour les ministres. Catégorique, il affirme : «la fidélité peut se montrer autrement que par ces séances de soumission».

Il est bien connu que le protocole doit tirer le fauteuil du chef de l’Etat lorsqu’il doit prendre place, mais est-il nécessaire de le montrer dans les journaux télévisés, ainsi qu’on l’a encore vu le mercredi 10 janvier ? On sait bien, au Gabon, que pour parler à l’oreille du président de la République, certains ministres vont jusqu’à poser un ou les deux genoux au sol, mais a-t-on besoin de les montrer au grand public ? Quand des membres du gouvernement «s’auto-humilient» par de telles postures, en vue de marquer ou manifester, à leur façon, qui de la loyauté, qui de la soumission, à «l’autorité suprême», doit-on montrer de telles images aux téléspectateurs ? La soumission fait-elle partie des us et coutumes de la République ? Sûrement pas.

Aucun manuel du protocole ne fait obligation au Premier ministre, aux membres du gouvernement, aux collaborateurs du président ou aux présidents d’institutions de s’agenouiller pour s’adresser au chef de l’Etat. Aucun manuel du protocole ne prévoit cette posture qui serait, pour ses adeptes, une «posture de loyauté», alors que d’autres la qualifient de «séance d’auto-humiliation». Et pourquoi donc le Premier ministre a-t-il besoin de parler à l’oreille du président de la République en conseil des ministres ? Il est pourtant prévu que les deux hommes aient un entretien avant chaque séance dudit conclave. C’est donc au cours de cet entretien qu’il devrait soumettre au chef de l’Etat les aspects confidentiels de certains dossiers, s’il en existe. Bref, là n’est pas le sujet du jour…

Des ministres en séances d’auto-humiliation

Si les hautes personnalités gabonaises, elles, ont adopté la pratique du «genou par terre», la télévision doit-elle promouvoir cette «exception culturelle gabonaise» ? Un conseiller en communication estime pourtant que «ces images peuvent être interprétées comme des séances d’auto-humiliation ; elles n’ont pas à être présentées à l’opinion. Que ces images soient prises et archivées pour l’histoire, il n’y a pas de problème à cela, mais on ne devrait pas les montrer». Du même avis est un historien de la communication a abordé sur le sujet. Il a estimé qu’«en 2018, il y a des images dont on peut dispenser le téléspectateur. Ces images où on voit des ministres poser un genou au sol, et d’autres s’agenouiller complètement pour montrer leur (grande) loyauté au chef donnent à réfléchir sur le sens que ces ministres donnent à leur fonction. Respect veut-il dire, chez eux, soumission ?».

De nombreux fonctionnaires internationaux et diplomates occidentaux en poste à Libreville disent «s’amuser beaucoup de ces images où l’on voit un éminent ministre aller poser un genou au sol pour parler au président ; c’est puéril, mais ce qui l’est davantage, c’est que la télévision montre ça. Quand je vois ça, je m’interroge : le journaliste veut-il montrer la toute-puissance du président ou veut-il montrer combien un ministre est petit et obséquieux devant le président de la République ? On peut être loyal à son chef et le montrer autrement, par du dynamisme dans l’action, par exemple. Pas besoin de se mettre à genoux devant le président. En fait, le journaliste ne devrait pas montrer ces images, parce qu’elles montrent un ministre dans une position qui est, à mon avis, honteuse et déshonorante pour lui-même. Ce n’est pas de la loyauté, ni du respect ; c’est le témoignage de la soumission».

Aux monteurs, on dit : «cachez ces images, coupez !»

En un mot comme en mille, ce que l’on retient de ces avis et opinions, c’est que si le ministre, lui, se met à genoux pour parler au président de la République, le journaliste ne devrait, pour sa part, pas montrer ces images au public. «Toutes ces aspérités doivent être évitées au public. Chaque séance du Conseil des ministres est marquée par ce rituel. On voit un responsable du Protocole d’Etat tirer le fauteuil du président de la République et le tenir jusqu’à ce que celui-ci y prenne place. Puis, on voit des ministres aller s’agenouiller pour chuchoter à son oreille. Ces images-là n’ont pas besoin d’être montrées», affirme le directeur général d’une agence de communication. Pour lui, «autant le président ne le demande à aucun ministre, autant il n’est demandé à aucun journaliste de montrer ces images qui donnent une image pas très reluisante aux institutions gabonaises». Alors, à tous ceux qui sont chargés du montage à la télévision : «cachez ces images, coupez !» Oui, en 2018, il y a des images dont le téléspectateur doit être dispensé…
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