La réussite des Chambres africaines extraordinaires (CAE), créées au sein des juridictions sénégalaises pour juger l'ancien président tchadien Hissène Habré, va pousser les dirigeants africains à penser à la création d'un système permanent pour juger ceux qui commettent des crimes graves dans le continent, estime l'avocate tchadienne Jacqueline Moudeina.
"Je crois que les CAE constituent un test pour les dirigeants africains et pour l'Union africaine et vont poser les jalons d'une cour permanente, a souligné Mme Moudeina dans un entretien avec Xinhua à Dakar.
L'ancien président du Tchad vit au Sénégal depuis son renversement par un coup d'Etat en 1990. Poursuivi pour "crime contre l'humanité, crime de guerre et actes de torture", il a été inculpé et mis en détention en juillet 2013 à Dakar.
Selon une commission d'enquête tchadienne, le régime de M. Habré a fait plus de 40.000 morts parmi les opposants politiques et parmi certains groupes ethniques.
Mme Moudeina a affirmé qu'en initiant cette procédure de poursuite contre Hissène Habré, les ONG qui défendent et conseillent des victimes du régime Habré, visent un effet purement pédagogique.
"Pour nous, c'est plus jamais ça non seulement au Tchad, mais partout en Afrique, parce que l'Afrique et le monde entier nous regardent. Et si on réussit à obtenir un jugement juste et équitable pour les victimes et pour Hissène Habré, je crois que cela fera un cas d'école en Afrique et c'est ce que nous recherchons", a-t-elle dit.
Elle a estimé enfin qu'un procès de Hissène Habré est "un peu plus proche" et les victimes "voient ce procès prendre corps avec les trois commissions rogatoires effectuées au Tchad".
Selon Mbacké Fall, procureur général des Chambres africaines extraordinaires, le procès de l'ancien président tchadien pourrait se tenir au mois d'avril 2015 à Dakar.