L’exercice auquel nous avons eu droit ces derniers jours sur la première chaîne de télévision publique gabonaise, Gabon Télévision, loin de passer inaperçu, devrait interpeller plus d’un sur ce qu’il faut entendre par chaîne publique. Les médias naturellement ont pour mission d’informer, d’éduquer et de distraire. Si cela est certes fait quotidiennement ici, il ne manque pas de se poser la question de savoir quels sont les programmes proposés au public au sens d’orientation donnée auxdits programmes. Pourquoi le dis-je ? Simplement parce que la majorité, pour ne pas dire tout le monde, peut être unanime sur le fait qu’il y a de moins en moins de personnes, Gabonaises, qui s’intéressent à Gabon Télévision qu’ils accusent d’être la caisse de résonnance du pouvoir et de ne livrer par conséquent au contribuable que ce qui parait diffusable aux autorités politiques, occultant du coup tout ce qui devrait participer au renforcement de la culture citoyenne.
Pierre-Claver Akendengué qui s’invite à un débat sur Gabon Télévision à l’occasion de ses cinquante ans de carrière musicale, cela faisait longtemps que l’on avait vu le plateau être consacré à ce genre d’évènement ! Et que surtout, les invités soient en réalité des personnalités bien indiquées pour parler non seulement de culture musicale, mais aussi de l’artiste lui-même pour avoir une certaine connaissance de son œuvre et du musicologue, l’un n’allant pas dans notre entendement sans l’autre. Tout-à-tour, le Professeur Daniel- Franck Idiata, le Manager culturel, Magali Wora et l’artiste-musicien, Franck Baponga ont passé en revue la discographie de PCA, évoqué longuement son parcours et son combat pour la liberté, édifié le public sur l’immensité de cette personnalité mondiale presqu’ignorée dans son pays et magnifié son talent, au point de faire des griefs à la chaîne de télévision publique devant ce qu’ils considèrent tous trois comme une grosse omission.
Principal reproche : Gabon Télévision ne semble pas s’intéresser aux questions de promotion culturelle, surtout lorsqu’elles concernent des talents gabonais de premier plan, ceux que l’on devrait nommer, des références. Conséquence de ce manquement : les générations montantes, contexte oblige dans l’ère du tout numérique et du village planétaire dont la constitution est accélérée par internet, se tournent beaucoup plus vers l’extérieur et n’ont pas de repères sur la scène nationale, dire qu’il y en a qui peuvent et même doivent jouer ce rôle avec maestria. C’est ici le cas de citer Pierre-Claver Akendengué à qui la communauté internationale a reconnu solennellement les mérites, allant jusqu’à l’inviter à l’ONU, un acte qui n’a pas, malheureusement, été suffisamment commenté sur nos médias officiels. De quoi pousser les intervenants à l’émission-débat organisée à l’occasion de ses cinquante ans de carrière, à s’interroger sur le crédit que peut avoir une chaîne publique qui œuvre à passer sous silence ce qui aux yeux du monde, représente plus qu’un symbole.
PCA, immortalisé !
Tel est le souhait émis par le Professeur Daniel-Franck Idiata, le manager culturel, Magali Wora et l’artiste-musicien, Franck Baponga qui souhaitent que des émissions concernant des icônes du type Pierre-Claver Akendengué se multiplient d’une part, mais qu’elles fassent l’objet d’un intérêt particulier, y compris dans les milieux du savoir d’autre part, pour que la jeunesse s’approprie l’œuvre de celui que le Professeur Idiata n’a pas limité l’aura au seul Gabon. Comme pour corroborer le propos tenu par lui-même PCA lorsqu’il expliquait en substance pendant une interview qu’il chantait l’Afrique, ses malheurs, ses insuffisances, que sais-je, nous rappelant cette scène de Lagos où rencontrant lors d’un spectacle Myriam Makéba, cette dernière fondait en larmes à sa vue avec en bouche l’un de ses titres « Afrika Obota ».
C’est significatif de ce que pensent les Africains de ce panafricaniste convaincu dont le discours, selon Daniel-Franck Idiata, n’a pas changé d’un iota depuis les années 60. Non sans exprimer de regret, Magali Wora s’est plaint que le sort réservé à des icônes de la trempe de PCA ne lui soit, à lui aussi, réservé, c’est-à-dire que l’on n’évoque abondamment son nom sur nos chaînes publiques qu’après qu’il ait passé l’arme à gauche. Nous poussant à nous souvenir de Serge Eniga, Edingo, et bien d’autres au crépuscule de leur vie dont nous ne citerons pas les noms par pudeur. La question, la véritable, est celle de savoir pourquoi cette omission ?
Franck Baponga, lui, a tenté d’y répondre, affirmant qu’il est de la responsabilité des pouvoirs publics de travailler à la valorisation de la culture locale, en commençant par permettre aux préposés à l’antenne d’exercer leur liberté dans le choix des programmes destinés aux populations. En filigrane, il faut y voir, une plainte au sujet de l’immixtion quasi-permanente du politique dans la programmation des chaînes publiques. Histoire d’attirer l’attention sur le fait qu’il est plus qu’intéressant de laisser les Hommes de médias faire leur job pour que les vaches soient mieux gardées.