Un projet de révision constitutionnelle a été entériné par le gouvernement au cours du Conseil des ministres du 28 septembre dernier, avec en toile de fond, de profondes modifications du fonctionnement de l’Etat. On y voit entre autres, un renforcement des pouvoirs du président de la République et une déconstruction de la démocratie semi-présidentielle acquise au terme de négociations et de concertations nationales tels que la conférence nationale de 1990 et les accord de Paris de 1996. Qu’en pensent les gabonais de ce projet ?
Nicolas Nguema, vice président de Union et solidarité
Ce projet de révision de la Constitution est un transfert de souveraineté du peuple à Ali Bongo Ondimba. A la lecture de ce dernier on se rend vite compte que le Président n’est plus un arbitre des institutions. Il devient l’institution suprême de la République, que dis-je de la monarchie car il dépouille l’Assemblée nationale et le Sénat de leur raison d’existence. Cela revient à placer le président au dessus de la Nation. Voyez-vous le partage de pouvoir entre le président de la République et le Premier ministre disparaît totalement. Le gouvernement devient un cabinet dont les ministres lui font même allégeance en lui jurant fidélité. Comme le parti les Upégistes Solidaires qui donnera certainement sa position officielle, je suis foncièrement contre ce que veut faire le pouvoir établi, car c’est une procédure visant à institutionnaliser la monarchisation de l’état.
Marc Ona Essangui, acteur de la société, secrétaire exécutif de Brainforest
Le projet de révision constitutionnelle consacre le complot issu du dialogue d’Angondje avec la complicité de ceux de l’opposition qui se rendent complice de cette dérive monarchique. C’est le peuple qui décide et le moment venu ce peuple abrogera toute ces décisions iniques et anti-constitutionnelles.
Cyd Aubiang, comptable et membre de l’Union nationale
Par cette révision constitutionnelle dont j’ai pu lire quelques dispositions, le gouvernement et l’opposition de façade veulent transformer la République gabonaise en monarchie en dépossédant le peuple gabonais de sa souveraineté pour la confier à un suzerain, Ali Bongo. C’est ce qui ressort de la lecture des articles 15 et 20 dudit projet. Tantôt une prestation de serment des membres du gouvernement devant le président de la République avant leur entrée en fonction, tantôt une prestation de serment des commandants en chef des forces de défense et de sécurité devant le président de la République avant leur entrée en fonction. Le président devient-il le roi? Et ce qui est encore plus choquant c’est qu’ils n’en parlent pas. N’eut été quelques médias perspicaces on se réveillera en voyant à Gabon télévision ou à Gabon 24 Ali Bongo en train de devenir le roi du Gabon. L’opinion veut une élection à deux tours avec limitation des mandats, une responsabilité pénale du Chef de l’Etat pendant et après son mandat pas les subterfuges avec lesquels ils nous enfument actuellement.
Paul-Aimé Bagafou, ancien secrétaire général de l’ONEP
Globalement, les modifications de la Constitution envisagées par le pouvoir ne répondent en rien aux aspirations démocratiques profondes de l’écrasante majorité des gabonais pour qui le principe de l’alternance doit être inscrit dans le marbre. Or : premièrement, en optant pour la non limitation des mandats présidentiels, l’intention sous-jacente de vouloir conserver le pouvoir à vie est clairement perceptible, malgré le retour au scrutin à deux tours; deuxièmement, le maintien de la durée du mandat présidentiel à 7 ans au lieu des 5 ans souhaité par le plus grand nombre participe de cette volonté car, ne se justifiant par rien d’autre de pertinent comme argument; troisièmement, l’immunité absolue envisagée pour le Président de la République fait de celui-ci, un citoyen au dessus des lois. Il devient par conséquent, un « monarque absolu » qui pourra se permettre de commettre tous les crimes et délits que bon lui semblera sans pour autant craindre de rendre compte à qui que ce soit. On est donc là, dans un glissement vers une dictature constitutionnalisée en lieu et place de la démocratie réelle qui devait être la norme universelle de gouvernance des états au 21ème siècle… Et cette constitutionnalisation de la dictature est tout simplement inadmissible.
En outre, on voudrait bien comprendre le sens de la pratique qui voudrait qu’aux termes de leur pseudo réforme constitutionnelle, que les ministres et les commandants en chefs des forces de sécurité et de défense auraient désormais à prêter serment devant le Président de la République. Est-ce à dire que ceux-ci doivent désormais se dévouer à la seule personne du « monarque » plutôt que de servir et défendre la Nation ? En somme, si cette mascarade est in fine entérinée elle sonnerait définitivement le glas de ce qui nous reste comme libertés et droits fondamentaux et, c’est pourquoi, la situation nous commande de dire « non ! » à cette énième forfaiture…
Félix-Guénaël Ngombyh Obame-Nguéma, Membre de l’Union Nationale
Il arrive dans la vie d’une nation un temps où la révision de la loi fondamentale s’avère une nécessité. Réadapter maintenant les fondements de notre vivre ensemble est plus qu’un impératif car, à juste titre et depuis plusieurs années, plusieurs articles de notre Constitution sont pointés du doigt. Je citerai comme exemples: Le retour à des élections à deux tours; La limitation du nombre de mandat présidentiel; La réforme profonde des institutions qui régissent le fonctionnement de la République. Seulement dans le cas actuel, les autorités qui dirigent le Gabon n’ont aucune légitimité pour engager une quelconque réforme constitutionnelle.