Devant les membres du conseil des droits de l’Homme à l’ONU, le ministre d’Etat gabonais en charge de la Justice et des Droits humains a réitéré, mardi 7 novembre, le refus de son pays d’accueillir une autre enquête sur les violences postélectorales que celle qu’envisage d’initier la Cour pénale internationale (CPI).
Libreville campe sur sa position ! Il n’y aura pas d’autre enquête que celle qu’envisage de mener la CPI. Alain-Claude Bilie-By-Nze, en sa qualité de porte-parole du gouvernement, l’avait déjà dit en octobre dernier, alors que l’Union européenne avait appelé une nouvelle fois à l’organisation d’une enquête indépendante destinée à faire toute la lumière sur les violences post-électorales, d’août à septembre 2016 au Gabon. Au cours de son audition devant le conseil des droits de l’Homme à l’ONU à Genève, Francis Nkea Nzigue a eu l’occasion de réitérer le refus de son pays sur la question.
«S’il y a eu des violences dans un pays, nous ne voyons pas une autre institution qui, plus crédible et mieux que la CPI, peut mener une enquête indépendante pour établir la vérité. Nous ne voyons pas pourquoi l’Union européenne demande une autre enquête internationale. La CPI devrait lancer une enquête dans ce sens, nous attendons ses conclusions pour savoir ce qui s’est passé», a déclaré le ministre d’Etat en charge des Droits humains, à la suite de la présentation du rapport national sur l’Examen périodique universel (EPU).
Le Garde des sceaux a par ailleurs tenté de justifier la répression de la contestation populaire du 31 août 2016 : «L’Etat ne peux pas laisser les malfaiteurs, les malfrats bruler le pays. C’est pour cette raison que dans certaines conditions que l’Etat est obligé de sévir pour protéger les citoyens et les biens de la République.»
Si Francis Nkea Nzigue s’est montré fermement opposé à l’organisation d’une autre enquête internationale, c’est parce que «sur le plan national, la justice a pris des dispositions pour que des décisions soient rendues sur le domaine juridique». Selon le membre du gouvernement, les autorités judiciaires gabonaises ont lancé, ces derniers mois, des enquêtes pour établir les responsabilités dans les événements ayant suivi l’annonce des résultats de la présidentielle de 2016. Une élection jugée «un peu tumultueuse» par le ministre d’Etat. N’empêche, la délégation de l’Espagne, elle, s’est montrée préoccupée par «l’existence d’un nombre de morts plus élevé que celui reconnu par les autorités (gabonaises), ainsi que de disparus et de victimes de détention arbitraire».
Auditionné sur d’autres sujets, à l’instar du respect des libertés individuelles dans son pays, Francis Nkea Nzigue a brossé un tableau plutôt féérique du Gabon. «La liberté de la presse est extrêmement protégée dans notre pays. Nous avons d’ailleurs adopté un nouveau Code de la communication qui dépénalise le délit de presse. Personne n’est en prison au Gabon pour un délit de presse», a fait savoir le ministre d’Etat, qui n’a pas manqué d’ajouter que «personne n’est en prison au Gabon pour ses opinions». Et parlant de prison, le membre du gouvernement a presque présenté les geôles gabonaises comme des «hôtels où chaque personne qui y va est assurée d’avoir une chambre et un lit». Une commission de surveillance aurait été mise en place pour s’assurer de cette réalité.
Le représentant du Gabon a par ailleurs été félicité sur les efforts entrepris par son pays dans le cadre de l’établissement de l’égalité des genres dans les administrations, ainsi que pour la condamnation des mariages forcés, la traite des personnes, la torture et la mutilation. Toutefois, des membres de la commission des droits humains de l’ONU n’ont pas manqué de faire quelques recommandations au Gabon, y compris sur les questions liées à la protection des droits de l’enfant, aux violences faites aux femmes et à la peine de mort.
L’adoption du rapport présenté par le Gabon est prévue pour le vendredi 10 novembre prochain en après-midi.