Un an après l’élection présidentielle à laquelle il avait participé, Raymond Ndong Sima, ancien Premier ministre d’Ali Bongo, est sortie de son silence, le 23 septembre, pour «donner sa lecture de la situation politique du pays». Il estime que «depuis deux ans, l’outrance, l’invective et l’injure tiennent lieu de débat politique».
Depuis l’élection présidentielle du 27 août 2017, Raymond Ndong Sima a très peu été vu en public. De même, il s’est rarement exprimé sur les réseaux sociaux. Pour rompre ce silence, l’ancien Premier ministre a organisé une conférence de presse à la Chambre de commerce de Libreville, le 23 septembre, pour s’exprimer sur la situation que traverse le pays.
La première observation de Raymond Ndong Sima porte sur l’assèchement du débat démocratique au profit de l’invective. Selon le natif d’Oyem, la montée de l’intolérance, qui se sert de l’injure et l’invective comme combustible, est due à l’incapacité de la classe gabonaise à formuler des arguments novateurs et pertinents, pour sortir le pays de la crise politique actuelle. «Je sais que depuis deux ans maintenant, l’outrance, l’invective et l’injure tiennent lieu de débat politique en lieu et place de la contradiction qui permet d’opposer des arguments», a-t-il déclaré, soulignant qu’une «telle pratique donne à penser que la classe politique gabonaise est en mal d’arguments».
Cette «panne d’arguments» est dangereuse car, elle peut secréter certaines dérives qui risquent de donner corps à un autoritarisme de fait. C’est le cas par exemple de l’incident relatif à l’interdiction de sortie du territoire dont il a été victime le 6 septembre 2017, à l’aéroport de Libreville, alors qu’il s’apprêtait à quitter le pays.
Pour Raymond Ndong Sima, cet incident est «une faute administrative grossière», malheureusement cela est symptomatique de la situation du Gabon depuis un certain temps, a-t-il regretté.
Selon l’ancien Premier ministre, qui impute la responsabilité de cette situation aussi bien au pouvoir qu’à l’opposition, «le couple galaxie présidentielle-coalition décline la trame de la politique de notre pays en une boucle trigone dans laquelle la tricherie et la désinformation alimentent l’invective et la répression, loin, très loin du débat sur les questions utiles, sur les questions de fond».
Pour lui, l’élection présidentielle du 27 août 2016 a «débouché sur une impasse». Et face à cette impasse, ce qu’on a «enregistré depuis lors ce sont des monologues dans les deux camps politiques constitués». «Mais ces monologues ne peuvent pas conduire à une solution de sortie de crise puisque chacun se satisfait dans son camp de ses positions», a-t-il indiqué.
Moins tendre avec ses compagnons d’hier, Ndong Sima estime que «l’opposition doit admettre qu’elle a échoué pour cause de stratégies douteuses à faire triompher une alternance nécessaire».
Pour sortir de la crise politique actuelle, il propose «un vrai dialogue politique qui adresse les questions de fond et qui conduit à une sortie de crise solide».
Mais au-delà du nouveau dialogue, l’ancien Premier ministre propose également quelques pistes pour sortir de la grave crise économique et sociale qui menace le Gabon. Il suggère de «réformer en profondeur l’appareil judiciaire pour accroitre son efficacité», de «réduire la taille de l’Etat pour dégager des économies budgétaires», de «rétablir les équilibres macroéconomiques nécessaires à une croissance durable», de «définir et préserver les bases de la solidarité nécessaire à une croissance durable» et d’«accroitre l’intégration dans la sous-région».
Pour l’ancien chef du gouvernement, il s’agit d’une «offre politique parce que le pays a besoin de mieux». Il en a profité pour inviter «tous ceux et toutes celles qui souhaitent préparer de façon rigoureuse une offre politique sérieuse et crédible pour les prochaines échéances», à se joindre à lui pour «construire un nouveau parti qui travaillera sérieusement à l’élaboration de solutions solides, en phase avec les aspirations de la population et ouvert au débat contradictoire».