Le gouvernement et le Sénat gabonais estiment que les députés de l’Union européennes doivent arrêter de s’ériger en donneurs de leçons, et rejettent les résolutions prises à Strasbourg.
« Le Gouvernement de la République joint sa voix à celle du Sénat gabonais pour dénoncer cet acharnement que rien ne justifie ». Dixit Alain-Claude Bilie-By-Nze, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement gabonais, face à la presse vendredi 22 septembre 2017. Il réagissait ainsi à une résolution prise le 14 septembre à Strasbourg par le Parlement européen qui « demande aux autorités gabonaises (…) de mettre un terme à tous les actes de harcèlement, d’intimidation et de persécution contre les opposants, et de prendre des mesures concrètes pour garantir la liberté d’expression ».
« Le Parlement européen dit ce qu’il veut, il n’y a pas d’opposants harcelés au Gabon. Mais au Gabon, comme en France, comme en Grande-Bretagne, si quelqu’un viole la loi, il répond de la justice. Je suis désolé, encore une fois, il n’y a pas de souveraineté au-dessus des autres. Le Parlement européen n’a pas été élu par les Gabonais, il a été élu par les Européens et très franchement, qu'on laisse les Gabonais gérer leur démocratie en toute sérénité », a assené Alain-Claude Bilie-By-Nze.
Réaction jugée « très vive » par certains observateurs de la scène politique gabonaise, mais « qui se justifie », d’après d’autres. Depuis la fin de l’élection présidentielle d’août 2016, les parlementaires européens n’ont eu de cesse de dénoncer un processus électoral entaché « d’anomalies » décrites en décembre 2016 par la mission d’observation électorale de l’Union européenne dans son rapport. Les parlementaires européens demandent à la Commission et aux Etats membres « d’envisager des sanctions ciblées à l’encontre des responsables de la fraude électorale et des actes de violence qui en ont découlé ».
Au Gabon, « le gouvernement s’étonne de constater que ces Eurodéputés ne prennent en compte ni les évolutions politiques intervenues depuis la dernière élection présidentielle – avec notamment la tenue d’un Dialogue politique ouvert à la société civile et à la quasi-totalité des forces politiques légalement reconnues – ni les principales résolutions de ce Dialogue ayant appelé à des réformes législatives, politiques et institutionnelles, encore moins de l’apaisement général qui prévaut dans notre pays et qui est à porter au crédit du président de la République », a déclaré son porte-parole.
Au sein de l’opposition, on se gargarise évidemment de la sortie des députés européens. Dans l’après-midi du 22 septembre, le président de l’Union nationale a estimé au cours d’une réunion que l’Union européenne est dans son droit de prendre ces positions au regard des dispositions contenues dans l’Accord de Cotonou. Selon Zacharie Myboto, « l’Union nationale se reconnait globalement dans la résolution qui est la deuxième d’ailleurs de l’Union européenne sur le Gabon. Il n’y a pas du tout d’ingérences de la part de l’Union européenne dans ce qui se passe aujourd’hui au Gabon et nous encourageons l’Union européenne à persévérer dans cette voie ».
Alain-Claude Bilie-By-Nze condamne pour sa part l’attitude des eurodéputés qui « induit de manière insidieuse qu’il pourrait exister, sur une autre planète, des souverainetés au-dessus des autres ». Il assure que le Gabon va implémenter les réformes décidées lors du dialogue politique d’avril et mai derniers, en fonction de « notre capacité d’adapter nos systèmes juridiques, institutionnels aux évolutions que notre pays est à même d’absorber ». Et de conclure : « nous le ferons avec le soutien de tous les partenaires du Gabon, de ceux qui sont réellement soucieux de notre développement, dans la paix et la concorde ».