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Crise postélectorale : Fin de mission de la CPI
Publié le vendredi 23 juin 2017  |  Gabon Review
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A l’issue de la mission de la Cour pénale internationale (CPI) à Libreville, le 22 juin, le chef de la section d’analyse des situations au bureau du procureur à la CPI s’est prêté aux questions de Gabonreview. S’il a donné des précisions sur les contours du séjour de 48 heures de la délégation, Emeric Rogier a également insisté sur l’indépendance et l’impartialité de la mission de la CPI.

Gabonreview : Il y a toute une confusion dans l’opinion sur ce que vous êtes venus faire. Pouvez-vous revenir sur le but de votre présence à Libreville ?

Emeric Rogier : Cette mission se déroule dans le cadre d’un examen préliminaire de la situation au Gabon, que le procureur de la CPI (Fatou Bensouda, ndlr) a ouvert en septembre 2016, suite au renvoi de la situation par le gouvernement gabonais. Cette saisine a déclenché un examen préliminaire et j’insiste sur le terme parce qu’il ne faut pas confondre un examen préliminaire avec une enquête. A ce jour, aucune enquête n’a été ouverte par la CPI. En revanche, comme son nom l’indique, il y a un examen préliminaire qui est un processus d’analyses, d’évaluations et d’informations dont nous disposons déjà. Et qui visent à déterminer si les critères du Statut de Rome pour ouvrir une enquête sont remplis.

En d’autres termes, au cours de la période électorale et postélectorale, en particulier fin août début septembre 2016, il y a eu un certain nombre d’actes de violence commis au Gabon. Et la question est de savoir si ces actes peuvent constituer des crimes relevant de la compétence de la CPI. En l’espèce, des crimes contre l’humanité. Si c’est le cas, il faudrait alors se poser la question si une enquête de la CPI serait justifiée. Pour le moment, nous en sommes à déterminer si la Cour est compétente pour traiter de cette situation. Si oui, il faudra se demander si les autorités gabonaises ont déjà mené des enquêtes et pré-enquêtes, si les crimes sont suffisamment graves, s’il y aurait des raisons sérieuses de penser qu’une enquête de la CPI ne servirait pas les intérêts de la justice.

La mission qu’on vient de faire s’inscrit dans ce cadre. Il ne s’agissait pas de recueillir des preuves, de prendre des témoignages, mais de s’entretenir avec différents interlocuteurs : les autorités, l’opposition, la société civile ou encore la communauté diplomatique pour se faire une meilleure idée de la situation. Mais aussi essayer de commencer à vérifier un certain nombre d’informations et d’allégations concernant la période électorale.

A vous entendre, la CPI a été saisie par le gouvernement alors que, parallèlement, l’opinion croit savoir que cette instance a également été saisie par Jean Ping. Est-ce à dire que la plainte de ce dernier n’a pas été prise en compte ?

Elle a été prise en compte ! Elle nous est parvenue après le renvoi de la situation par le gouvernement. C’est cette action qui a déclenché l’examen préliminaire. Et dans ce dernier cas de figure, nous pouvons prendre en compte toute information quelle que soit sa provenance. La plainte de Jean Ping rentre donc tout à fait dans le champ de l’examen préliminaire. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la représentation du bureau a rencontré monsieur Jean Ping et d’autres représentants de l’opposition au cours de cette visite.

Peut-on dire que votre mission est terminée ? Si oui, elle a été brève quand même…

La mission touche effectivement à sa fin. Elle a été brève, nous avons passé deux jours sur place à Libreville. Encore une fois, ce n’était pas une mission d’enquête. Mais une prise de contact avec le pays, avec les différents interlocuteurs. La mission a été très intense et très constructive. Toutes ces réunions se sont déroulées sans aucune entrave, sans aucune restriction. Nous avons également animé des conférences de presse à l’issue de réunions que nous avons eues au ministère de la Communication. Mais aussi une série d’interviews aux médias locaux et internationaux.

Avez-vous recueilli les avis de la presse locale, considérée comme un témoin de ce qui s’est passé ?

Nous avons communiqué avec la presse, essentiellement pour expliquer le but de la visite et présenter son déroulement. Ultérieurement, la presse pourra toujours nous contacter si elle souhaite nous transmettre des informations. Pour votre question, nous pouvons très bien le faire à l’avenir si nous le jugeons nécessaire.

A partir de quel moment la CPI peut-elle être intéressée par un type de plainte, comment se définit un crime contre l’humanité ou encore un génocide ?

La réponse n’est pas forcément facile à donner. En termes simples, un crime contre l’humanité est une attaque commise contre la population civile. Elle peut être commise soit par un Etat, un gouvernement ou par une organisation. Une attaque donc de façon délibérée, conformément à une politique prédéfinie. Après, ce qui caractérise cette attaque, c’est le fait de commettre un certain nombre d’actes violents : des meurtres, des viols, de la torture, etc.

Y a-t-il des crimes contre l’humanité sans morts ?

C’est rare ! Parce qu’en général lorsqu’une attaque est menée contre la population civile, ça se traduit par des meurtres. Mais en théorie, ça peut se produire. C’est le cas en RDC où Jean Pierre Bemba a été jugé coupable de crime contre l’humanité, commis en particulier par ses troupes entre 2002 et 2003. Ses troupes ont commis des meurtres mais elles ont surtout commis un nombre très important de viols. Et le viol, en lui-même, a constitué cette attaque contre la population civile.

Y a-t-il un nombre de morts à partir duquel l’on commence à crier gare, à parler de crime contre l’humanité ?

Il n’y a pas de seuil prédéfini. Le plus important, c’est l’intension de mener une attaque et le déroulement de cette attaque. En général, un crime contre l’humanité suppose un certain nombre de victimes. Parce qu’une attaque menée contre la société civile génère un certain nombre de victimes. Il n’y a pas de chiffre minimal à proprement parler. Mais un nombre important de morts peut être une indication du fait que l’attaque a été menée.

Nous avons ici le gouvernement et Jean Ping qui ont porté plainte… Dans l’histoire des procès de la CPI, un plaignant s’est-il déjà retrouvé poursuivi par la suite ?

Ce qu’il faut bien comprendre c’est que le bureau du procureur, lui-même, est totalement indépendant. Le fait d’avoir reçu une plainte du gouvernement ou de l’opposition ne nous oblige en aucune façon. Ces deux plaintes sont évaluées dans le cadre de la même situation. Et elles le seront encore plus en toute indépendance et en toute impartialité. A partir de là, quelques personnes qui se seraient rendues coupables de crimes relevant de la compétence de la Cour feront l’objet de plaintes ou de poursuites. Mais encore une fois, nous ne sommes pas à ce stade. Nous n’avons pas encore établi que des crimes relevant de la compétence de la Cour ont été commis au Gabon. La question est donc un peu prématurée.

Vous êtes arrivés un peu comme des enquêteurs mais vous avez été accueillis par le ministre de la Justice, vous êtes montés dans des véhicules du gouvernement… Cela entame-t-il votre partialité ?

Cela n’entame ni notre indépendance, ni notre impartialité. Parce que le Gabon est Partie au statut de Rome. Quand on se rend dans un Etat, au Gabon ou ailleurs, on ne le fait pas de façon secrète ou à l’insu de la population. Lorsqu’on va dans un Etat on s’y rend avec le consentement de celui-ci. Et nous demandons aux autorités locales de nous fournir un soutien logistique pour qu’on puisse se déplacer à notre guise. Le cas échéant, si la situation est tendue, nous pouvons demander que des mesures de sécurité soient prises. Mais cela fait partie des services qu’un Etat membre de la CPI s’est engagé à rendre aux représentants de la CPI, lorsque ces derniers se rendent sur son territoire. Et comme je l’ai signifié, notre mission s’est déroulée sans entrave et les représentants du gouvernement n’ont jamais assisté aux réunions que nous tenions avec l’opposition, ou encore avec la société civile. Donc, nous restons totalement indépendants.
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