Vendredi 16 juin dernier, les rédactions d’Africa N°1, TV+, Kanal 7 et quelques autres médias ont été prises d’assaut par un commando armés jusqu’aux dents, les sommant de diffuser sur leurs antennes, un message vidéo donnant 3 jours à Ali Bongo pour quitter le pouvoir au profit de Jean Ping. A la tête des bandits encagoulés, un certain Désiré ABA’A MINKO, ancien candidat malheureux à la présidentielle de 2016. A la réprobation quasi-générale, se mêlent doutes et accusations mutuelles entre les camps d’Ali Bongo et de son rival, Jean Ping.
Déjà éprouvés par plus de 7 mois de salaires impayés, les journalistes de la radio panafricaine, Africa N°1, qui gardent encore la station en sursis depuis plusieurs années, avec la foi amère d’un signe de bienfaisance à l’horizon, ont vécus, vendredi dernier, des scènes d’une épouvante inhabituelle. Et pour cause, un commando des éléments encagoulés, armés de machettes, couteaux pistolets et autres bombes a fait irruption dans leur rédaction, les sommant de diffuser un message vidéo, donnant 72 heures à Ali Bongo pour quitter le perchoir. La radio ne disposant pas de support vidéo, le commando n’a trouvé d’autre solution que d’arracher les téléphones des journalistes tremblant de peur, avant de s’enfuir en direction d’autres médias comme Kanal 7, RTN et TV+ où ils ont pu finalement diffuser leur message révolutionnaire.
A la tête du mouvement, un certain Désiré ABA’A MINKO, ancien candidat à la dernière présidentielle, qui s’était finalement rallié à la cause de l’opposant, Jean Ping. C’est finalement au siège de la délégation de l’Union Européenne, que celui qui se dit révolutionnaire a été arrêté, armé d’une bombe apparemment factice. Selon les premiers éléments de l’enquête, il s’agirait d’un coup savamment orchestré, mais exécuté avec une telle légèreté et plaisanterie qu’il frise une grosse blague, un montage tellement grossier que même l’ultimatum de trois jours donné à Ali Bongo pour libérer le pouvoir, peine à convaincre du sérieux d’ABA’A MINKO.
La guerre de communication
Au-delà de ce qui s’apparente à un montage, c’est désormais tout un chapelet de questions qui hante de nombreux gabonais. Pour qui, Désiré ABA’A roule-t-il ? Serait-il réellement envoyé par Jean Ping à qui il fait allégeance dans son ultimatum ? Son acte serait-il enfin, l’exécution du fameux plan "B" longtemps vaticiné par Ping pour dégager Ali Bongo du pouvoir ? Ou est-il simplement l’envoyé du camp au pouvoir pour discréditer l’opposition représentée par Jean Ping, surtout à la veille de l’arrivée des experts de la cour pénale internationale (CPI) comme certains tentent désormais de l’insinuer ? Difficile de répondre avec exactitude, surtout dans un contexte de guerre de communication des deux camps qui s’accusent mutuellement d’être à l’origine du coup. Mais toujours est-il qu’avec cette allégeance publique à l’ancien président de la commission de l’union africaine, ABA’A MINKO jette un pavé dans la marre de Jean Ping, même si le camp de l’opposant n’a pas tardé de dénoncer le geste de son allié.
Voilà qui donne du grain à moudre au camp du pouvoir, qui accuse depuis Jean Ping de pratiquer la politique de la "terre brulée", à travers son fameux appel à « éliminer les cafards ». Et la guerre de communication dans ce contexte est tellement importante qu’en cas de responsabilité établie de l’un ou de l’autre camp, le discrédit, mais surtout les soupçons des experts de la CPI ne manqueront pas d’accélérer le dossier du côté de la Haye. Le geste d’ABA’A MINKO, arrêté au siège de l’UE, lui ne manquera pas d’être interprété comme une pression de Jean Ping sur la communauté internationale, afin de la pousser à prendre en main le dossier électoral gabonais, elle qui semble avoir pris acte du fait accompli. C’est dire que l’acte d’ABA’A MINKO, même s’il est reprouvé par l’ensemble de la classe politique, relance de plus bel la batille entre les camps Jean Ping et Ali Bongo devant la CPI.