Selon un panorama dressé par le média panafricain Jeune Afrique, le Gabon figure parmi les dix premiers pays africains à avoir des gouvernements « obèses ». Avec ses 40 membres, le gouvernement gabonais arrive à la huitième place, juste derrière le Mozambique et la Tunisie.
Etabli quelques mois après la tumultueuse élection présidentielle du 31 août dernier et dit « d’ouverture » en raison de l’entrée de quelques têtes d’importance relative issues de l’opposition, le nouveau gouvernement gabonais compte 40 membres, ministres et délégués confondus. Il a été remanié à 50% et est composé à 30% de femmes avec comme chef de file , Emmanuel Issoze Ngondet, le Premier ministre. « C’est un gouvernement qui compte des hommes et des femmes issus de l’opposition, de la société civile, mais également de la majorité républicaine qui soutient Ali Bongo… », expliquait le porte-parole du gouvernement au lendemain de la constitution de ce corpus administratif. Il n’est pas différent de l’ancienne équipe puisqu’il comporte le même nombre de ministres malgré quelques remaniements.
Huitième gouvernement d’Afrique en termes du volume des ministres, le gouvernement gabonais a été établi pour surmonter de nombreux défis dont la matérialisation du projet de l’égalité des chances mais également de déboucher sur la réconciliation nationale avec la tenue du dialogue politique dont les travaux sont en cours. Comme le Gabon, bien des pays africains disposent eux aussi, de gouvernements à effectifs pléthoriques . Un panorama établi par le média panafricain, Jeune Afrique, permet de saisir le volume des ministres par gouvernement.
Avec ses 110 ministres, le Ghana arrive en tête. Il est suivi de la Guinée Equatoriale (80 ministres), l’Afrique du sud (71 ministres), le Cameroun (61 ministres), la République Démocratique du Congo (RDC) (42 ministres), la Tunisie et le Mozambique 41 ministres chacun. Dans le reste des pays du continent, le nombre de ministres au sein des gouvernements oscille entre 11 et 39. Pour le président ghanéen, Nana Akufo-Addo, « Il est préférable d’avoir des hommes et des femmes capables de servir les intérêts de la nation et de travailler à la croissance de l’économie ». Cela ne pose donc aucun problème d’avoir autant des ministres si l’on s’en tient aux propos du président ghanéen.
« Travailler à la croissance de l’économie » ?
L’explication fournie par le président ghanéen, Nana Akufo-Addo ne passe cependant pas à tous les niveaux. L’expérience a montré que les gouvernements africains, malgré leurs effectifs excessifs lorsqu’on les compare avec les effectifs des gouvernements des anciennes puissances coloniales comme la France (36 ministres), le Royaume-Uni (27 ministres), l’Espagne (15 ministres) ou encore le Portugal (24 ministres) n’ont presque pas porté les fruits attendus souvent par les populations. Bien au contraire, une forme de pérennité et de répétition continuelle des problèmes de gouvernance face aux défis socio-économiques existent, avec une identification linéaire des mêmes schémas de gouvernance dans la plupart des pays africains se fait remarquer.
Ce qui est un problème de développement pour un Camerounais moyen et qui touche immédiatement son quotidien, l’est aussi, peut-être à une proportion différente, pour un Tchadien ou un Malien. Pourtant vivant dans des territoires différents, les citoyens africains, qu’ils soient du Gabon, du Cameroun, de la Côte d’Ivoire ou du Tchad font quasiment face aux même difficultés d’accès au logement, à l’éducation, à la santé et à l’emploi. De même, les difficultés rurales liées à l’absence des infrastructures, d’une agriculture peu développée et optimale, à la carence d’emplois et au manque de perspectives de développement des territoires affectent de la même manière les africains et ce, quel que soit le territoire. Comment alors ces gouvernements « en surnombre » travaillent-ils à la croissance des économies ?
Les figures de réussite économique en Afrique sont peu nombreuses. Et comparé aux pays occidentaux cités, par ailleurs anciennes puissances coloniales, et au regard de leur développement, on peut aisément remarquer que la pertinence d’action d’un gouvernement ne dépend pas souvent du volume des ministres au sein du gouvernement mais de la rigueur et du respect des engagements de développement définis. Le secret n’est pas dans le nombre mais dans la prise des trajectoires de développement. L’ Ile Maurice (avec ses 23 ministres) est un bel exemple de réussite de gouvernance. A la différence de ses voisins du continent, l’île fait partie de ces pays qui ont compris l’enjeu de la clairvoyance dans la gouvernance d’un Etat même si des choses restent encore à parfaire. Aucune bonne notation internationale dès qu’elle concerne l’Afrique, n’échappe au pays. Avec son petit nombre de ministres, l’île Maurice fait bonne figure.
Le Gabon un cas d’école
Un gouvernement à quarante ministres ! Ce n’est pourtant pas la première fois qu’un gouvernement gabonais comporte ce nombre de ministre. Du temps de feu président Omar Bongo Ondimba, la pratique d’étoffer les gouvernements était récurrente même si les fruits attendus n’ont pas toujours été bénéfiques pour la plupart des gabonais. Qui dit en réalité gouvernement étoffé d’hommes et de femmes, dit difficultés immenses. La pratique n’a malheureusement pas débouché au Gabon, sur des résultats de gouvernance concrets. Les ministres qui se sont succédé dans les différents gouvernements, n’ont eu que leur bien-être et enrichissement personnel comme intérêt principal au détriment des problèmes immédiats de logement, d’urbanisation des villes, de construction des routes, des écoles et d’hôpitaux. En quarante ans de gestion souveraine de ce petit Etat d’aujourd’hui 1,8 million d’habitants, le Gabon n’a vraiment pas progressé en termes de développement. Le panorama de l’économie nationale tout comme la démocratie encore embryonnaires dépeignent une société dont la réflexion de l’autorité publique n’a abouti à un aucun résultat appréciable. Les gouvernements qui se sont succédé sont les principaux acteurs de cet échec.