Le principal challenger à Ali Bongo lors de la dernière présidentielle se déclare d’un optimisme sans équivoque quant à l’aboutissement des sanctions de l’Union européenne (UE) contre le régime d’Ali Bongo. Il se dit prêt pour un dialogue si et seulement si c’est pour discuter des termes d’une passation de pouvoir. Pendant une heure, face à la presse locale, il a passé en revue les sujets brulant de l’heure au Gabon. Après la synthèse ci-après, Gabonreview publiera en trois partie l’intégralité de cet entretien.
Trois thèmes ont constitué la trame de l’entrevue accordée par Jean Ping, le 7 février dernier, à la presse locale : La résolution de l’UE ; les dialogues politiques ; et les perspectives politiques, économiques et sociales. L’échange a permis de cerner l’idée qu’il fait de ce qui adviendra après la résolution du Parlement européen, sachant que rien n’est gagné d’avance. Les décideurs de l’UE étant en effet attendus pour statuer sur d’éventuelles sanctions contre le régime d’Ali Bongo, après un vote impressionnant d’une résolution à cet effet.
«Bien sûr que nous sommes rassurés. La résolution a été adoptée par 553 voix pour, et soixantaine de voix contre. C’est-à-dire qu’elle a été adoptée très majoritairement. Dans cette résolution, les parlementaires votent par groupe. C’est-à-dire que les socialistes, qu’ils soient Français, Allemands, ils votent en groupe. Les gens de Mme le Pen qui sont là-bas avec tous ceux de la droite votent aussi avec la droite. Ca veut dire que les parlementaires européens qui votent là sont en liaison avec leur propre gouvernement. Ça veut dire que c’est clair que la résolution sera adoptée», a indiqué Jean Ping.
En venant aux différentes réactions du pouvoir gabonais quant à la résolution en question, Jean Ping, sur le ton du défi et un peu railleur, estime que ceux qui «poussent des cris d’orfraie» n’ont ni la qualité ni la capacité de ne pas se soumettre aux implications de cette résolution. «Les accords de Cotonou prévoient des engagements que, eux, ils prennent vis-à-vis de nous et que nous, nous prenons vis-à-vis d’eux. Et vous voyez un monsieur, le porte-parole Billie-By-Nze, qui déclare qu’il va sortir de ça. Chiche qu’il sorte ! On va voir», a défié l’ancien candidat à la présidentielle. Fidèle à la rhétorique qu’il déploie depuis la fin de la dernière présidentielle, il a laissé entendre : «nous allons prendre toutes mesures, je dis bien toutes les mesures nécessaires pour récupérer la souveraineté gabonaise et la voix du peuple, c’est-à-dire que celui qui a été élu soit installé là où il faut» .
Fait nouveau dans cette rhétorique, le candidat consensuel de l’opposition à la dernière présidentielle s’est montré un tantinet favorable à un dialogue avec Ali Bongo, à la seule condition que l’objectif soit porté sur une transmission du pouvoir. «Si on dit que nous devons parler avec le camp en face pour organiser la transition, la passation de service à celui qui a gagné, nous sommes prêts à donner toutes les garanties nécessaires pour que les gens qui ont perdu le pouvoir puissent partir en sécurité avec leurs familles, leurs biens et les gens qui les entourent. Nous sommes prêts à examiner cette situation-là. Si c’est un dialogue, pour voir les conditions de transfert du pouvoir pacifique», a-t-il précisé, confirmant avec fermeté cependant son refus de participer à un dialogue avec l’actuel locataire du palais de la présidence de la République sous le format actuellement envisagé. Cité en exemple parmi ceux qui suggèrent d’y participer, le président de l’Union pour la nouvelle République (UPNR) a été mis face à ses responsabilités. «Si Louis Gaston Mayila que vous avez cité veut aller au dialogue, c’est son problème à lui, ce n’est pas le mien. Il verra comment il va échouer», a prévenu Jean Ping.
Répondant à une question sur la crédibilité que pourrait avoir le dialogue appelé par Ali Bongo sans Jean Ping, l’opposant a laissé entendre que tous les leaders autour de lui sont courtisés, suppliés par le pouvoir afin d’y participer. «Personne n’a accepté», assure-t-il. Ce qui, selon lui, a conduit les organisateurs de ce dialogue vers «des petits poissons» qu’ils se réjouissent de dénombrer. Une cinquantaine de personnes constitue ce «menu fretin», rappelle-t-il.
Amené a laisser entrevoir les perspectives, singulièrement sur le volet économique, Jean Ping décline un plan, notamment pour les investisseurs. «Dès que nous sommes là, nous leur dirons que ça doit être écrit. Nous passons des accords avec eux pour rétablir le climat des affaires, la sécurité des investisseurs. Nous demanderons notamment à l’Union européenne de réunir une conférence de bailleurs de fonds pour qu’on nous considère comme un pays sinistré et qu’on nous vienne en aide. C’est que la Centrafrique a fait. Vous avez peut-être noté que la Centrafrique a eu des moyens colossaux pour régler une situation chaotique et dangereuse ? Nous sommes dans la situation de la Centrafrique», estime Jean Ping, notant que c’est pour rétablir la crédibilité du Gabon.
Le leader de l’opposition a assuré ne pas être inquiet des menaces brandies par le pouvoir avec l’opération mamba, consistant à mettre hors d’état de nuire les personnalités soupçonnées de malversation financière. Il déplace la pointe du curseur plutôt sur les chantres de cette opération, notamment le porte-parole du gouvernement qui trainerait, selon lui, un dossier lourd.