Dialogue politique contre dialogue politique, grondements des parlementaires européens, menace de prise de pouvoir par Jean Ping, tempêtes du gouvernement, etc. La crise née de la dernière élection présidentielle est loin de connaître son épilogue, au regard de la radicalisation des discours de chapelles, qui excluent tout compromis en faveur d’un accord politique inclusif.
Statu quo, c’est bien le terme qui sied pour décrire désormais la crise postélectorale gabonaise, plus de six mois après le scrutin présidentiel d’août 2016. Il n’est plus surprenant de parler de l’enlisement de la crise post-présidentielle aujourd’hui, eu égard aux rebondissements et aux nouveaux développements qui surviennent chaque jour les uns après les autres. Après la saisine de la cour pénale internationale par les camps Jean Ping et Ali Bongo, qui se présentent mutuellement comme des victimes post-présidentielle et auteurs d’appel au génocide. Après le dialogue politique pour l’alternance organisé par Jean Ping, en décembre dernier, place désormais à l’implication des Eurodéputés, qui ont adopté la semaine dernière, une résolution condamnant en des termes peu diplomatiques, les violations de droits de l’homme par le pouvoir de Libreville, lors de la crise postélectorale d’août dernier.
Pour le candidat de l’opposition au dernier scrutin présidentiel, qui ne cache pas sa gratitude aux parlementaires européens, il s’agit bien là d’une victoire, du moins symbolique puisque ces sanctions pour être appliquées devront d’abord être approuvées par le Conseil européen, instance suprême de l’union européenne. Faudrait-il y attendre un effet de masse des pays membres de l’organisation en faveur de l’ancien fonctionnaire de l’Union Africaine ? Difficile de répondre avec exactitude à la question, mais toujours est-il que le vote donnera lieu à d’intenses débats au sein de l’Union Européenne, surtout quand on sait les groupes d’intérêts de chaque Etat membre de l’union, notamment dans sa coopération bilatérale avec le Gabon. A cela s’ajoute les objurgations de la partie gabonaise qui menace d’examiner la part qui revient à chaque partenaire et de donner des suites à la coopération européenne.
Seulement cette démarche des Eurodéputés en faveur de Jean Ping sonne l’alarme d’une situation presqu’inédite dans la relation entre le pays de Léon Mba et l’Europe. Et c’est dans cet esprit que Jean Ping, manifestement ragaillardi par cette résolution a annoncé dans la foulée, qu’il initiera bientôt sur le terrain des actions visant à rétablir le vote des citoyens. Même s’il ne le dit pas ouvertement, il s’agit des actes de défiance du pouvoir allant jusqu’à son installation au palais présidentiel comme il s’y était engagé à l’issue de son dialogue politique pour l’alternance. Y parviendra-t-il ? La question reste posée. Mais avec le dialogue politique national que s’apprête à organiser Ali Bongo Ondimba, avec la participation des 54 partis et groupements politiques sur les 58 que compte le microcosme politique gabonais, on s’interroge néanmoins sur la légitimité de cette messe en l’absence de la chapelle de Jean Ping, qui concentre le plus gros lot des militants de l’opposition.
A cette interrogation, les tenants du pouvoir répondront que Jean Ping a bel et bien été consulté, et que la vie du pays ne peut pas se gripper parce qu’un seul bloc, fut-il représentatif de l’opposition refuse de prendre part aux discussions "pré démocratiques". Jean Ping répond lui aussi de son côté, qu’il ne prendra jamais part à un dialogue organisé par un pouvoir illégitime, au risque de l’avaliser. De part et d’autre, la volonté du statu quo est donc manifeste et c’est l’enlisement !