Le vice-Premier ministre se serait subitement transformé ces dernières semaines en donneur d’ordres, s’ingérant ainsi dans le fonctionnement d’institutions et de structures indépendantes.
Nommé en octobre 2016 comme deuxième personnalité du gouvernement, après Emmanuel Issoze Ngondet, Bruno Ben Moubamba semble avoir pris la grosse tête. Ces dernières semaines, le vice-Premier ministre en charge de l’Urbanisme, de l’Habitat social et du Logement s’est subitement transformé en donneur d’ordres, y compris en dehors de son domaine de compétence. Des correspondances vraisemblablement signées par lui, et ayant circulées sur les réseaux sociaux le week-end écoulé, montrent qu’il n’hésite plus à s’ingérer dans le fonctionnement d’institutions et de structures normalement libres et indépendantes.
Si en décembre dernier, à la faveur d’un point de presse donné avant son départ pour Singapour, le ministre avait déjà sommé les juges de ne divulguer aucune information sur l’audit qu’il avait lancé quelques jours plutôt, au risque de compromettre l’enquête, peu avaient parié qu’il irait jusqu’à dicter ses volontés au procureur de la République. Pourtant, l’une des correspondances signées de Bruno Ben Moubamba adressé au Procureur de la République près le tribunal de première instance de Libreville montre tout le courage du VPM. Il y enjoint presque son interlocuteur «de procéder (impérativement) à une garde à vue» de 6 responsables des collectifs d’occupants illégaux des logements sociaux d’Angondjé et de Bikélé. La raison donnée par celui que certains perçoivent désormais comme «un super ministre» : ils «sont à l’origine des résistances et d’incitation à la révolte des populations». Ben Moubamba aurait-il le projet de se substituer à la justice ? Bien malin qui le dira. N’empêche, reçue le 26 décembre 2016 par le cabinet du procureur de la République, cette correspondance a donné lieu, le 5 janvier 2017, à une sortie de Steeve Ndong Essame Ndong, au cours de laquelle il avait annoncé la poursuite de jeunes compatriotes ayant occasionné des dégâts matériels à Angondjé. La lettre du VPM a-t-elle été pour quelque chose ? Mystère.
L’autre cas d’ingérence du vice-Premier ministre, non le moins préjudiciable, est celui lié à tentative d’influence exercée sur le président de la commission nationale des bourses du Gabon. En effet, le 20 décembre 2016, sous sa casquette de VPM, Bruno Ben Moubamba a sollicité l’appui dudit responsable pour obtenir une bourse d’études aux Etats-Unis au profit d’un certain Arnaud Iris Bouckinda Bouckinda, que des sources présentent comme son neveu. Le membre du gouvernement espère voir son protégé intégrer «une école d’ingénierie en télécommunications et réseaux à Boston». Mais pour cela, est-on tenté de lui répondre, il faut qu’il suive la procédure officielle comme tous les demandeurs. Le «changement» auquel il dit aspirer ne passe-t-il pas aussi par la fin de telles pratiques ?