Le gouvernement gabonais laisse penser que le FMI ne va pas lui imposer certaines mesures pour sortir de la crise actuelle, alors que les mécanismes d’appui du Fonds prévoient le contraire.
Dans un entretien accordé à un quotidien de Libreville, le ministre de l’Economie, de la Prospective et de la Programmation du développement, annonce que le Gabon entend poursuivre la mise en place de son Programme de Redressement Economique (PER) pour sortir de la crise, et non un Plan d’ajustement structurel (PAS) qui sera imposé par le Fonds monétaire international (Fmi). « Ce sera le programme du Gabon appuyé par le Fmi, et non l’inverse », indique en effet Régis Immongault.
Le 23 décembre dernier, lors d’un sommet extraordinaire des chefs d’Etat de la CEMAC tenu à Yaoundé la capitale camerounaise, le Gabon et les autres pays membres de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (Cemac) ont décidé d’ouvrir des négociations avec le Fonds monétaire international pour mieux structurer les efforts d’ajustement de leurs Etats, les accompagner vers une sortie de crise et les aider à mettre en place les conditions d’une relance vertueuse et durable de leurs économies.
Le ministre gabonais de l’Economie soutient que la situation économique actuelle impose à son pays un ajustement « avec ou sans le Fmi ». D’ailleurs, rappelle-t-il, « ces efforts d’ajustement ont débuté depuis près de deux ans, comme l’ont montré les révisions à la baisse de nos budgets et les réductions de certaines dépenses. Jusqu’ici, nous avons fait ces efforts sans le Fmi ». Pour le ministre en charge de l’économie gabonaise, ces efforts vont se poursuivre en simple concertation avec le Fmi, tentant dans la foulée de rassurer les Gabonais de ce que les mesures d’austérité à venir ne seront pas brutales.
Redressement sous contrôle
Force est cependant de constater que le ministre de l’Economie ne dit pas tout sur la question. Qu’on les appelle « redressement » plutôt qu’« ajustement », les mesures envisagées avec l’implication active du Fmi seront mises en place sous le contrôle de l’institution financière internationale. Pour la simple raison que le Fonds se réserve le droit d’imposer certaines réformes aux Etats à qui il accorde un appui financier et technique pour sortir de l’impasse. Les prêts du Fmi donnent au pays le répit nécessaire pour appliquer les mesures d’ajustement et les réformes visant à rétablir les conditions propices à une croissance vigoureuse et durable, à l’emploi et aux investissements sociaux.
Cependant, pour les obtenir, le Fonds et les autorités du pays concerné s’accordent au préalable sur des mesures économiques. Et l’engagement de cet Etat à appliquer ces réformes fait partie des conditionnalités de l’accord, d’autant que, pour la situation du Gabon, au cours des dernières années, et dans le cadre de ses revues annuelles statutaires, le FMI n’a eu de cesse d’interpeller les autorités gabonaises sur certaines faiblesses de la gestion des finances publiques du pays, prédisant que cette gestion exposait le pays à des revers.
Autrement dit, sur la table des négociations, le Fmi va imposer au Gabon de prendre un certain nombre de mesures si le pays veut obtenir son appui financier. Le but étant de s’assurer que les ressources obtenues vont servir à régler effectivement les problèmes et rétablir la stabilité économique afin que le Fonds puisse être remboursé, ce qui libère des fonds pour d’autres pays en difficulté. En résumé, le Fmi n’accorde ses prêts que lorsque l’Etat se soumet à certaines de ses exigences.
Le ministre gabonais de l’Economie ne dit donc pas tout de cette affaire, lorsqu’il assure qu’aller en négociations avec le Fmi sans que cette institution ne lui impose certaines conditionnalités, liées notamment à la manière de gérer l’économie sur la période concernant l’accord, est possible. Le même ministre ne disait-il pas il y a peu, toujours dans les colonnes du journal l’Union, que le recours au FMI pour un PAS par le Gabon n’était pas encore envisageable, tentant ainsi de rassurer l’opinion publique gabonaise, inquiète à l’idée que le pays soit obligé de se soumettre à un PAS.
Au fond, PAS ou PER, qu’est ce qui change, au-delà de la sémantique, si l’un et l’autre sont mis en œuvre sous le «diktat» du FMI ?