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Rapport de la MOE-UE : Ali Bongo parie, joue et perd
Publié le jeudi 15 decembre 2016  |  Gabon Review
Mariya
© Autre presse par DR
Mariya Gabriel, chef de la délégation de la Mission d’observation électorale (MOE) de l’Union européenne (UE) lors de l’élection présidentielle gabonaise du 27 août
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Les conclusions auxquelles est parvenue la Mission d’observation électorale de l’Union européenne (MOE-UE), pourtant invitée par le régime d’Ali Bongo, mettent en doute la sincérité des résultats officiels de la dernière présidentielle. Un véritable désaveu pour nos institutions. Quelle suite ? Peut-on faire comme si de rien n’était ?

C’est un véritable camouflet pour le président de la République et la majorité au pouvoir. Rendu public le 12 décembre courant à Libreville, le rapport final de la Mission d’observation électorale de l’Union européenne (MOE-UE) met en doute la sincérité des résultats officiels de la dernière présidentielle. Sous le velours des tournures diplomatiques, la sentence de la MOE-UE est tombée, dure, crue et cruelle : le scrutin du 27 août dernier a été émaillé «d’anomalies évidentes». En clair, la victoire d’Ali Bongo est remise en cause. En d’autres termes, sa présence à la présidence de la République est jugée illégitime. Volens nolens, la majorité au pouvoir s’en trouve décrédibilisée, délégitimée à la face du monde. À l’extérieur du pays, elle est humiliée. Son image ternie. Actualité oblige, certains en viennent même à établir un parallèle avec la Gambie et à se prononcer pour une égalité de traitement.

Tirer les conséquences

On peut toujours établir un distinguo entre Yahya Jammeh et Ali Bongo. On est libre de s’arc-bouter contre les décisions des institutions nationales, notamment la Cour constitutionnelle. On a même le loisir de crier au néocolonialisme ou de se faire l’apôtre d’un souverainisme de circonstance. Mais, la réalité est là : personne ne conteste vraiment les conclusions de ce rapport. Mieux, la MOE-UE a observé cette élection suite à une invitation formulée par le régime d’Ali Bongo. La majorité au pouvoir ne peut, en conséquence, faire comme si de rien n’était. Individuellement et collectivement, ses représentants doivent en tirer les conséquences. Essayer de minimiser la portée de ce rapport ou le passer par pertes et profits serait une erreur tragique. A court ou à moyen terme, le silence, l’inaction ou un compromis d’arrière-boutique serait dévastateur pour l’ensemble de l’édifice institutionnel national.

La pire des attitudes serait de réduire le rapport de la MOE-UE à… un simple rapport. Le ranger au rayon des documents inutiles ou des souvenirs douloureux serait malhabile. Le considérer comme la production d’une institution sans prise réelle sur la réalité nationale serait inconséquent. À l’inverse, il serait autrement plus responsable de tenir compte de la genèse de cette mission d’observation, d’analyser les conditions dans lesquelles elle a exercé et d’anticiper les retombées de ses conclusions sur l’appareil d’Etat. Dans cet exercice, la souveraineté pourra toujours servir de paravent. Mais, on ne devra pas éviter une réflexion de fond sur la crédibilité de notre Etat et son rapport au souverain. Eluder cette question reviendrait à consacrer la rupture définitive entre les institutions et le peuple. Par voie de conséquence, cela équivaudrait à légitimer toutes les options, y compris les plus antidémocratiques. Comment capitaliser au mieux le rapport de la MOE-UE sans verser dans des considérations partisanes et politiciennes ? Là réside le vrai défi.

Aspiration à la pleine citoyenneté

À l’adresse de la majorité au pouvoir, il convient peut-être de rappeler une évidence : au Gabon, le vote populaire n’est dirigé ni contre une personne, ni contre une famille encore moins contre un groupe ethnique ou une province. Vingt-six ans après la restauration du multipartisme, il vise simplement à oxygéner la vie publique et offrir à l’élite dirigeante une chance de renouveler sa pratique. Il ambitionne aussi de libérer les énergies, en finir avec les privilèges et permettre à tout un chacun de se réaliser positivement selon ses capacités. Autrement dit, les Gabonais aspirent à la pleine et entière citoyenneté, c’est-à-dire à la protection de leurs droits civils et politiques voire à une totale égalité des droits. Dans un environnement pollué par l’existence de la pieuvre Delta synergie et marqué par des dénis de droit à la pelle, cette exigence devrait servir de fondement à toute réflexion prospective.

En invitant, de son propre chef, la MOE-UE, Ali Bongo a fait un pari. Il a joué et perdu. Logiquement, il doit en tirer les conséquences. Reste à donner un contenu réel à ces conséquences immédiates. Les options existent, multiples. Déjà, le ministre des Affaires étrangères – en poste à l’Intérieur durant la dernière présidentielle – a invité la classe politique à «prendre en compte certains éléments (…) proposés par le mission de l’Union européenne». Mais, à la différence de la chef de la MOE-UE, il a omis de dire dans quel cadre. Le dialogue proposé par Ali Bongo ? Peut-être. Sera-t-il souverain ? Nul ne le sait. Ouvrira-t-il une période de transition ? On ne peut rien en dire. Pour l’heure, Pacôme Moubelet-Boubeya n’a pas précisé si les conclusions du dialogue suggéré par Mariya Gabriel à la suite d’Ali Bongo seront exécutoires ou si elles auront valeur de simples conseils. Il n’a pas non plus indiqué si le mandat présidentiel en cours se poursuivra normalement ou si une présidentielle anticipée est envisageable. Sans doute, sa réflexion n’est-elle pas allée jusque-là ? C’est probable. A-t-il volontairement choisi de ne pas trop s’avancer ? C’est possible. Une chose est néanmoins sûre : à ces conditions-là, les Gabonais pourront, à moyen terme, donner une nouvelle chance à leurs institutions. Mais, ils exigeront sans nul doute le parrainage et l’arbitrage de l’Union européenne.
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