Un rapport de la gestion du contentieux électoral de septembre 2016 par la Cour constitutionnelle du Gabon attribué aux observateurs de l’Union africaine (UA) émet des doutes sur la qualité des procès-verbaux des bureaux de vote du Haut-Ogooué et les résultats recueillis par Ali Bongo dans cette province.
En mission au Gabon en septembre dernier, pour observer la gestion par la Cour constitutionnelle du contentieux né de la présidentielle du 27 août 2016, les experts de l’Union africaine ont rendu leur rapport. C’est en tout cas ce qu’il semble, alors que depuis ces derniers jours circule sur les réseaux sociaux un document présenté comme tel. Et à la lecture du rapport attribué à Nagoum Yamassoum, président du Conseil constitutionnel du Tchad, et Mipamb Nahm-Tchougli, membre de la Cour constitutionnelle du Togo, une conclusion paraît inévitable : la réélection d’Ali Bongo, décidée par la Cour constitutionnelle, s’est faite sur la base de procès-verbaux dont la qualité a laissé perplexes les observateurs de l’UA. Mieux, les deux personnalités assurent que les PV examinés laissaient «apparaître une constante avance du candidat Jean Ping sur le candidat Ali Bongo Ondimba».
Et de l’examen des PV des provinces de l’Estuaire et du Haut-Ogooué auquel ils ont assisté aux côtés des juges constitutionnels gabonais, les observateurs de l’UA ont relevé «des anomalies» : «des procès-verbaux mal remplis et non signés, des procès-verbaux incomplets ou surchargé, des calculs inexacts…» Selon le rapport, ces observations sont loin d’être une particularité gabonaise. D’autant «qu’on (les) retrouve partout ailleurs dans la majorité des pays» africains en l’occurrence. «Toutefois, relève les observateurs, il convient de noter que dans la commune de Libreville, certains procès-verbaux ne sont pas sans susciter des interrogations, tant en raison de leur rédaction, de leur présentation que de l’orientation bien particulière des résultats qui y sont contenus».
Dans le Haut-Ogooué où Ali Bongo l’a emporté grâce à une participation avoisinant les 100%, les observateurs ont relevé trois principales curiosités sur les PV de cette province : «les procès-verbaux se distinguent par leur ordre par rapport aux procès-verbaux des autres provinces, des procès-verbaux clairement établis et conformément aux textes, la lisibilité des procès-verbaux est si nette qu’ils ne peuvent que susciter des interrogations». Pour les observateurs, «les procès-verbaux du Haut-Ogooué sont si bien rédigés, ordonnés et, par ailleurs, la coïncidence entre le nombre d’inscrits, celui des suffrages exprimés et l’attribution quasi-totale de ceux-ci à un seul candidat, qu’ils paraissent invraisemblables».
Alors que Jean Ping conteste toujours la victoire d’Ali Bongo à la dernière présidentielle, les observations des experts de l’UA viennent conforter la requête déposée récemment par les avocats du candidat de l’opposition. Une requête qui s’attaque aux décisions de la Cour constitutionnelle du 23 septembre 2016, relatives, entre autres, à la réception de la demande conventionnelle d’Ali Bongo puis à l’annulation des résultats de 21 bureaux de vote du 2e arrondissement de Libreville du candidat du Parti démocratique gabonais (PDG). Les avocats avaient déjà expliqué que leur initiative se fondait sur les «grossières incohérences» relevées aussi bien dans les PV du Haut-Ogooué que dans le rendu de la décision finale de la Cour constitutionnelle. Leurs arguments n’ont, semble-t-il, pas convaincu les juges de la Cour qui ont rejeté leur requête le 16 novembre 2016.