Ce plan de redressement s’étale sur trois ans et vise à combler le déficit de 29 milliards de Fcfa qu’accuse la banque, la recapitaliser à hauteur de 10 milliards de Fcfa, acquérir un système d’information, assainir les comptes et les créances douteux, réduire les effectifs, etc.
Les fins de mois sont cauchemardesques à la PosteBank. La situation perdure depuis 2015 au grand dam de ses 400 épargnants, des 19 000 fonctionnaires qui y touchent leurs salaires et même du personnel de la banque qui va de grève en grève pour revendiquer leurs rémunérations, très souvent payées avec retard. Cette crise est toute aussi embarrassante pour le gouvernement qui doit à chaque fois ramener la sérénité dans les rangs pour apaiser ce climat de tension.
Pour sortir du gouffre, les dirigeants actuels de l’établissement de crédit ont élaboré un plan de redressement. Le document soumis à l’attention du chef de l’Etat attend d’être formellement approuvé pour être mis en œuvre. Ce plan de redressement défendu par Michaël Adandé, PDG de la Poste SA, propose une restructuration profonde de l’établissement bancaire sur le plans financier, opérationnel et de la gouvernance.
29 milliards de déficit
Au stade actuel, la PosteBank ne dispose plus de fonds propres. Pis, la banque accuse un déficit de 29 milliards de Fcfa. Tous les dépôts effectués par les clients de cet établissement bancaire, ne sont plus disponibles en termes de trésorerie depuis près de 13 mois déjà. Pour relever la barre et continuer à mener l’activité bancaire, les responsables de la PosteBank formulent deux propositions.
Premièrement combler le déficit de capital de la banque et deuxièmement ajouter les 10 milliards exigés aux établissements bancaires par la Cobac pour exercer au sein de la zone Cemac. Le projet de plan de redressement soumis aux autorités gabonaises, met également un point d’honneur sur la reconstitution des avoirs des épargnants de la banque. Le financement de toutes ces propositions doit être assuré par l’Etat, l’unique actionnaire de la PosteBank.
Si le plan de redressement est validé tel quel, l’Etat devra donc casser la tirelire. L’ensemble des besoins financiers nécessaires pour relancer la PosteBank se chiffrent à 61 milliards de Fcfa. Mais cette perfusion ne sera pas injectée d’un seul coup en raison de la situation des finances publiques. Du fait de la récession budgétaire, les décaissements ont été étalés sur trois ans. Soit 20 milliards la première année, 19 milliards la deuxième année et le solde à la troisième année de mise œuvre du plan de restructuration. C’est dire que, dans le meilleur des cas, la PosteBank ne sortira pas totalement du gouffre avant 2020.
Système d’information
Jusqu’à la désignation de la nouvelle équipe managériale, «on ne savait pas qui faisait quoi, ni comment à la PosteBank». La banque ne disposait pas d’un système d’information fiable. Cette défaillance a été catastrophique pour l’établissement dont le réseau compte jusqu’à 50 points de vente implantés sur l’ensemble du territoire gabonais. Chacun de ces points s’effectue des opérations financières au quotidien. Dans ce fonctionnement archaïque, il était impossible pour les responsables en poste au niveau du siège à Libreville de savoir exactement les états des versements et des retraits des agences. Cette gestion opaque de l’information a laissé libre cours aux pratiques douteuses dans le traitement des opérations. Pour changer la donne, les dirigeants de la PosteBank ont entrepris la construction d’un système d’information plus viable. Le nouveau dispositif s’arrime aux standards modernes et permet de piloter la PosteBank à partir de Libreville, de façon à garantir la traçabilité de chaque opération comme dans les banques concurrentes.
Gouvernance
Du point de vue de la gouvernance, la PosteBank sort de loin. Avec des organes sociaux « inopérants » à l’image de son conseil d’administration, la banque a perdu la notion de bonne gouvernance. Ce conseil d’administration se résumait à trois personnes parmi lesquelles des membres du personnel. Conséquence : « les débats étaient totalement déséquilibrés », confesse un haut cadre de la banque. L’inefficacité de cet organe chargé de surveiller les actes de gestion posés par le directeur général, s’est soldée par un « grave déficit de gouvernance ».
C’est ainsi que le plan de redressement s’est attaqué à cette défaillance. Aujourd’hui le PosteBank dispose d’un conseil d’administration plus équilibré. Désormais l’Etat, unique actionnaire de cette banque y siège, représenté par trois départements ministériels. Notamment le ministère de l’Economie, le ministère de l’Economie numérique et le Premier ministère. « Ces acteurs pèsent sur la stratégie du plan de développement des activités et pèsent aussi sur les actes de gestions », explique le conseiller du PDG de la Poste SA.
Par le truchement de ces membres du conseil, le gouvernement peut plus rapidement interpeller le DG dans le cas où il y aurait des manquements graves dans la conduite des activités de la Banque. Toujours dans le cadre la gouvernance, le PosteBank fait l’objet d’un assainissement des comptes. L’opération consiste à traquer les comptes d’épargne présentant des soldes douteux. En effet « certains clients n’ayant jamais versé le moindre centime à la PosteBank se sont retrouvés avec de comptes crédités de plusieurs millions de Fcfa », explique un cadre de la banque. C’est ainsi que des comptes d’épargne ouverts à la Poste Bank avant 2007 ont été suspendus pour nécessité d’enquête.
Quid de la réduction des effectifs
La Poste revendique un effectif 700 employés. Les recettes de l’entreprise atteignent péniblement 200 millions de Fcfa ces derniers temps. Pourtant, les charges de fonctionnement de cette entreprise publique cumulent à 1,4 milliards de Fcfa. Dans cette dépense, la masse salariale à elle seule engloutit jusqu’à 800 millions de Fcfa. Dans un contexte de rareté des ressources, cette masse salariale budgétivore de la Poste ponctionne abondamment les caisses de l’Etat. Pour sortir de la zone de turbulence, le dégraissement du personnel s’impose. Dans ce sens, un plan de départs volontaires est annoncé à la PosteBank. Il s’agit de réduire les effectifs de 700 à 400 agents selon le plan de redressement. C’est d’ailleurs dans la même lancée que la Poste a s’est séparée de trois de ses cinq filiales.