Les impôts et taxes sont en baisse en 41o milliards de Fcfa, les ventes de pétrole piquent du nez, l’endettement explose tandis que la commande publique éprouve des difficultés à être ventilée.
La déclaration de politique générale du Premier ministre Franck Emmanuel Issoze Ngondet a livré les peurs et inquiétudes de l’opinion sur le destin économique et financier du pays. Après avoir magnifié l’option de diversification des sources de croissance, le chef du gouvernement a donné à comprendre la profondeur de la crise que traverse le Gabon. L’effondrement du taux de croissance est la conséquence de la chute des ventes de pétrole qui, cette année, dégringole de plus de 3,9% de prévisions, à 2,9%.
D’après le Premier ministre, le Gabon, dont l’économie dépend en grande partie du pétrole, subit «comme d’autres pays producteurs, les conséquences de cette crise» qui lui a fait perdre en l’espace de deux ans, des recettes de l’ordre de 1100 milliards de Fcfa. Car en effet, en 2012, rappelle-t-il, «au pic pétrolier, les recettes pétrolières annuelles de l’Etat étaient de 1500 milliards de FCFA. Elles ne représentent plus que 400 milliards en 2016. Soit une diminution de 1100 milliards de FCFA».
Seulement, la chute des cours du pétrole suffit-elle à expliquer les contreperformances d’une économie autrefois rentière à 100% et qui de plus en plus se diversifie ? Difficile à dire si l’on écoute Franck Emmanuel Issoze Ngondet qui prépare les esprits à une nouvelle dégringolade. Celle-là concerne l’effondrement des recettes d’impôts et taxes de 410 milliards de Fcfa. Si le pays est prisonnier de l’environnement international quant à la fixation des cours des matières premières, il ne peut cependant pas mettre à l’index un facteur exogène pour expliquer la chute des recettes d’impôts et des taxes de douane. «Comparativement à la loi des finances, le budget risque de connaître un déséquilibre de l’ordre de 410,8 milliards de FCFA en 2016, du fait d’une collecte de recettes plus faible que ce que nous avions prévu », plaide le Premier ministre.
Le déséquilibre budgétaire procède certainement de simulations de collecte approximatives ou de la surestimation de la capacité des contribuables à contribuer à l’effort de construction du pays. Autre piste à explorer pouvant expliquer cette déculottée que les techniciens de la matrice budgétaire essuient sur leur propre terrain, il y a certainement l’octroi exagéré des exonérations fiscales aux entreprises. Une situation déjà dénoncée par le FMI en janvier dernier devant les ministres des Finances de la Cemac réunis à Yaoundé.
Sur ce dernier aspect, les prescriptions du FMI préconisent une meilleure collecte des ressources internes. Pour y arriver, il faut réduire l’utilisation généralisée des exonérations fiscales et douanières discrétionnaires. Car, elles compromettent les recettes globales de l’État et affaiblissent la gouvernance.
C’est pourquoi, conseille le FMI, il faut améliorer la coordination et la coopération intergouvernementales en matière de politique fiscale. «Au cours des dernières années, la Commission (Cemac, Ndlr) a publié un certain nombre de directives dans le domaine fiscal, mais rares sont celles qui ont été transposées dans les législations nationales et appliquées. Il est donc possible de faire plus pour renforcer la crédibilité et l’engagement», rappelle Christine Lagarde.
Les autorités ont certainement perdu de vue le fait que la mobilisation de recettes intérieures doit «tenir compte des importantes questions de fiscalité internationale qui ont une incidence sur l’assiette des impôts liés aux industries extractives». Ce qui doit se faire afin d’éviter l’érosion de la base d’imposition et les transferts de bénéfices.
Au regard de la situation, il n’est pas exclu que les services de l’assiette se soient rendus coupables de négligence, de désinvolture vis-à-vis des contribuables en se payant sur la bête. Car, depuis trois mois déjà, les agents des impôts crient à la sécheresse de leurs primes. Le non-paiement de ces gratifications peut à lui seul justifier ce trou de 410 milliards de Fcfa dans les caisses de l’Etat. Ces derniers, se rendant complices de la situation peuvent alléguer de ce que l’Etat ne payant pas leurs primes, ils n’ont pas eu d’autres choix que de se rendre justice.
Quant à l’endettement, le Gabon à fin 2016, atteindra un taux de mobilisation des ressources extérieures de 39,4%, soit 3160,1 milliards de Fcfa hormis les avances statutaires de la banque centrale qui représentent généralement 20% du budget national des Etats membres.