Pourtant présentée comme «la plus haute juridiction de l’Etat en matière administrative», le Conseil d’Etat, semble avoir été oublié, voire totalement ignoré, depuis deux décennies, par les plus hautes autorités du pays. Plusieurs années après sa création, cette institution fonctionne encore sans véritable siège. Un SDF institutionnel.
Alors que l’affaire avait fait grand bruit en avril 2013 au moment de leur déguerpissement, par l’Agence nationale des grands travaux (ANGT), des bureaux de cette institution judiciaire de la Cité de la démocratie, pour des motifs controversés par le commun des Gabonais, les agents du Conseil d’Etat continuent d’attendre que leur situation résolue. L’institution, pourtant présentée par l’article 74 de Constitution de la République gabonaise comme «la plus haute institution judiciaire de l’Etat en matière administrative», semble avoir été reléguée au dernier plan dans les projets de l’Etat. Tant et si bien que les agents, éparpillés à travers la capitale, se tournent désormais les pouces, faute de bureaux.
C’est un fait : locataire depuis sa création en 1994, au terme de l’éclatement de la Cour suprême, le Conseil d’Etat de la République gabonaise, jadis cher à Omar Bongo, est une institution oubliée, presque refoulée, par la Présidence de la république et la Primature. Elle fonctionne en SDF (Sans domicile fixe). Une situation qui perdure depuis que le projet de construction d’un immeuble dit «inter-Cour» a tout bonnement été classé avec les innombrables autres «grands projets» de l’émergence. Le bâtiment «inter-Cour» était censé abriter les services de plusieurs autres institutions judiciaires dont la Cour des comptes, le Conseil d’Etat et des éléments du secteur de la justice. Vue sous cet angle, l’idée était loin d’être saugrenue, jusqu’à l’intervention de l’ANGT dans l’affaire.
Le plus étonnant, en plus du silence quelque peu coupable du premier conseiller de cette institution maltraitée, qui semble d’ailleurs se complaire de la situation de quasi-végétation de certains agents de la structure dont il a la charge, reste l’attitude de l’ANGT. En effet, ne pouvant se contenter du simple déguerpissement de l’institution judiciaire comme elle l’a fait en 2013, cette agence dont la direction est pourtant bien cotée au palais du bord de mer, semble désormais en difficulté pour trouver un siège digne à l’institution, vielle de deux décennies. Toute chose qui oblige l’institution à demeurer locataire, et la plupart des fonctionnaires, à travailler depuis leur propre demeure. Pour l’heure, le Conseil d’Etat, du moins son président et quelques collaborateurs, «squattent» l’immeuble interministériel, au centre-ville, en attente de la fin des travaux engagés sur le Boulevard Triomphale Omar Bongo depuis plus d’un an.
Pourtant, comme de la poudre de perlimpinpin, l’institution qui est chargée de «conseiller l’Etat» par le biais des consultations sur les différents projets de lois ou tout autre texte y relatif, avait projeté un aménagement de ses bureaux sur le même boulevard. Mais, depuis lors, une pancarte indicative trône toujours devant le nouvel immeuble situé près de l’ambassade de Guinée Conakry : les travaux ne sont toujours pas achevés. Et depuis qu’elle les a chassés de leurs bureaux de la Cité de la démocratie, l’ANGT reste silencieuse et semble bien loin d’envisager la construction d’un bâtiment qui serait exclusivement dédié à cette juridiction, l’une des plus hautes de toutes. Tout de même déplorable au moment où les travaux de construction de la Cour constitutionnelle sont, eux, en passe de s’achever.