Les dirigeants peuvent se succéder à la tête de la Société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG), comme le 26 septembre avec le remplacement de Jean Paul Camus par Antoine Boo, mais si rien n’est fait, beaucoup continueront de dénoncer la très longue attente relative à l’acquisition d’un compteur d’eau et/ou d’électricité, avec en sus le manque « d’humanité » de plusieurs techniciens véreux.
Parmi les priorités du nouveau gouvernement, figurent le logement et l’emploi. Parlant de logement, il y a bien sûr l’eau et le courant car une habitation moderne doit nécessairement en disposer. C’est à ce niveau qu’intervient la SEEG qui, depuis 1997, détient le monopole de la distribution et de la commercialisation de l’électricité et de l’eau potable dans tout le Gabon.
Depuis plusieurs années, la concession faite par l’Etat au groupe Veolia via sa filiale, la SEEG, est dénoncée par plusieurs associations de consommateurs et par les populations qui se plaignent des services de la cette société qui ne «serait pas à la hauteur de la demande en besoin énergétique du pays ». Un ancien membre d’une de ces associations de consommateurs affirme que la SEEG était la plus citée dans les plaintes des consommateurs : «2 cas sur 3 concernaient les litiges avec la SEEG».
Les difficultés à la SEEG commencent lorsqu’un usager veut acquérir un compteur. C’est le cas pour toutes personnes qui construisent une maison, mais aussi pour un locataire qui veut avoir son propre compteur s’il ne bénéficie pas d’un compteur individuel. Certains bailleurs le permettent afin de mettre leur locataire dans de bonnes conditions. C’est l’option choisie par des couples avec enfants, afin de diminuer les charges au maximum, car «avoir un compteur commun revient beaucoup plus cher que de gérer le sien », renseigne une jeune femme qui précise qu’elle a pris l’initiative parce qu’une de ses belles-sœurs travaillent à la SEEG. Elle n’a donc pas connu les caprices de dame SEEG.
Un parcours semé d’embûches Tout commence donc lorsqu’on se rend dans une agence de la SEEG, muni de sa pièce d’identité et du numéro du poteau le plus proche de sa maison. Jusqu’ici pas de problème particulier. Les problèmes commencent au niveau du rendez-vous qui « officiellement est de 5 jours », selon un agent rencontré à l’agence de la Peyrie. « Après avoir été reçu par un conseiller qui vous pose quelques questions basiques sur le logement et l’emplacement, il vous fixe un rendez-vous avec des techniciens sur le terrain pour qu’ils aillent confirmer que le poteau peut encore avoir un branchement ou que l’endroit où vous voulez poser le compteur d’eau est bien approprié. Ce sont les techniciens qui vont s’assurer de tous ces éléments avant de revenir normalement, au bout de 15 jours, selon la disponibilité des équipements électriques et de plomberie et après le paiement du devis, on vous installe le compteur », explique le même agent.
Sauf que tous ces délais ne sont que « théoriques », car la réalité est totalement différente. «La SEEG, ce n’est pas la peine. Il faut vraiment qu’ils aient de la concurrence, c’est de mal en pire», déplore un client venu pour la troisième fois voir «où en est son rendez-vous » depuis plus de 3 mois qu’il a fait la demande. «Je viens relancer ma demande auprès d’un conseiller pour que les techniciens viennent voir ma maison en construction afin d’établir un devis pour les compteurs d’eau et d’électricité. Ils ont promis m’appeler depuis que j’ai déposé ma pièce d’identité avec mon numéro de téléphone, ainsi que le numéro du poteau le plus proche», poursuit-il.
L’agent de la SEEG interrogé reconnait que cela peut être long, mais il parle d’un délai de 6 mois au maximum, en insistant sur la disponibilité du matériel alors que des usagers font état de plus d’un an d’attente : « Je n’en pouvais plus, j’ai dû aller voir les gars de la SEEG et je me suis arrangé avec eux. Au bout d’une semaine, j’avais mes deux compteurs placés. J’ai dû dépenser 100 000 francs en plus du devis de la SEEG », avoue une dame. D’autres usagers préfèrent passer par des sous-traitants. En effet, il suffit de mettre le prix pour obtenir facilement un compteur. « Les Libanais qui construisent un peu partout là des magasins avec plein de boxes sont ceux qui viennent le plus vers nous. Ils ont de l’argent et ne veulent pas perdre de temps à attendre de longs mois. Avec nous, c’est très facile, on travaille avec eux et notre chef est un ancien cadre de la SEEG à la retraite», confie un ingénieur du milieu. Ceux qui n’ont pas les moyens de «mouiller » les techniciens ou les conseillers clientèle de la SEEG attendent en moyenne 1 an avant d’avoir un compteur à leur nom. Et même lorsque ce dernier est finalement posé, les problèmes ne sont pas finis.
En effet, il y a beaucoup de soucis avec certaines factures d’eau par exemple qui ne «sortent que longtemps après, avec des surprises désagréables ». C’est le cas d’une maman qui a attendu plus de 8 mois avant d’avoir sa première facture de plus de 600 000Fcfa. «Alors que je venais chaque mois et on me disait qu’il n’y a pas encore de factures. A ma grande surprise, quand la facture est sortie, on me parle d’un rappel de je ne sais quoi», explique-t-elle. Pour garder son compteur d’eau, elle a dû accepter de payer cette somme par traite sur plusieurs mois, en accord avec un gestionnaire.
Le cas de cette dame n’est pas isolé à la SEEG. Tous les jours, des clients se plaignent de leurs factures qu’ils «ne comprennent toujours pas». D’un mois à l’autre, on peut passer du simple au double. Et la SEEG va même plus loin en « coupant » à toute personne qui ose contester une facture. « A la suite de la contestation d’une facture d’eau de plus de 3 millions en moins de 4 mois, j’ai écrit à la SEEG en leur expliquant qu’il était impossible que je paie cette somme. Ils m’ont expliqué plein de choses mais je ne suis restée sur mes bottes car je n’ai rien remarqué de bizarre au niveau de mon compteur. Comment pouvais-je payer plus de 3 millions pour l’eau ?» s’émeut une dame.
La Société d’énergie et d’eau du Gabon n’a pas fini de malmener les populations qui souhaitent vivement qu’il y ait de la concurrence dans ce secteur. « S’il y a une autre société au Gabon, je crois que la SEEG ne va plus faire ce qu’on voit là. C’est toujours positif la concurrence. Le monopole est la pire des choses pour un consommateur», se convainc un client.