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Cour constitutionnelle : L’an XXV de Mborantsuo
Publié le samedi 8 octobre 2016  |  Gabon Review
Marie-Madeleine
© Autre presse par DR
Marie-Madeleine Mborantsuo, présidente de la Cour constitutionnelle du Gabon
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Un quart de siècle déjà ! Marie-Madeleine Mborantsuo, 61 ans, magistrat de l’ordre financier, est le président de la Cour constitutionnelle depuis octobre 1991. C’est un fait rare, un fait sans précédent, dans l’histoire des Conseils constitutionnels, que de voir la même personne à la tête d’une telle institution. Mais cette longévité qui aurait pu être positive, est «malheureusement entachée de faits contraires à l’évolution politique et démocratique ; là-bas, on ne dit pas le droit ; on fait de la politique, et comme on fait de la politique, nos décisions sont toujours en faveur de nos amis du PDG». Ainsi s’exprimait Marc-Aurélien Tonjokoué, ancien membre de la Cour, peu avant son décès.


«Celle qui transforme les défaites en victoires»

Dans le microcosme politique et judiciaire, «Madame Irrecevable» est désignée comme «celle qui a fait de la Cour constitutionnelle la Tour de Pise» (un ancien ministre passé dans l’opposition), «celle qui bloque la démocratie au Gabon» (Paul Mba Abessole), «celle qui transforme les défaites des Bongo dans les urnes en victoires sur tapis vert» (un des avocats de Jean Ping), «celle qui a fait de la réélection d’Ali Bongo une affaire personnelle» (un politologue franco-gabonais).

D’une manière générale, dans l’opinion, Marie-Madeleine Mborantsuo est perçue comme «le principal élément bloquant de l’évolution démocratique du Gabon». «Venir nous dire qu’à l’élection présidentielle du 27 août dernier, Ali Bongo a fait 50% des voix, c’est un peu fort de café !»

Habituée à régner d’une main de fer et à écarter malicieusement la moindre voix discordante, Marie-Madeleine Mborantsuo, saisissant l’occasion de la révision constitutionnelle du début des années 2000 devant casser la limitation du mandat du président de la République, avait amené Omar Bongo à briser également la limitation des mandats des membres de la Cour Constitutionnelle. Auparavant, un membre de la Cour constitutionnelle pouvait rester en poste pour un mandat de sept ans, renouvelable une seule fois.

Plaidoyer pro domo

En mars 2014, s’en ouvrant en privé à la presse, Marie-Madeleine Mborantsuo avait laissé entendre qu’elle est aux affaires depuis les années 1980 ; qu’elle avait cependant eu à subir le chômage comme certains jeunes de son époque avant de retourner en France pour d’autres formations. Grâce à l’appui de Fidèle Mengue M’engoua, professeur de droit public et plus tard ministre des PME, de l’Artisanat et du Commerce dans le gouvernement Ndong Sima, elle a ensuite enseigné à l’Université Omar-Bongo et à l’Institut des finances. Elle a par après été conseiller du ministre de la Planification, contribué à la mise en place de la Chambre des comptes, à la conférence nationale de 1990 et la rédaction de la Constitution y consécutive. «La démocratie qui est la nôtre aujourd’hui et que nous vivons, j’y ai pris une part active», avait-elle alors indiqué.

La dame n’avait pas manqué de se montrer fier du rôle joué par son institution après la mort d’Omar Bongo. La Cour constitutionnelle avait en effet a organisé la transition tout en permettant à la présidente du Senat de prêter serment et de travailler depuis la présidence alors que la Constitution ne le disposait pas exactement ainsi. Pour Madame Mborantsuo si les élections étaient bien organisées, rien ne permettraient à la Cour constitutionnelle de se prononcer sur quoi que ce soit. S’étonnant de ce que «ceux qui travaillent en amont des élections, ceux qui organisent tout cela jusqu’à rendre les résultats, ne sont pas inquiétés alors que l’on s’acharne» sur sa personne, elle avait précisé dans son plaidoyer pro domo devant la presse que la haute juridiction ne sort de son silence que lorsqu’elle est sollicitée à travers des saisines. Pour elle, l’institution rend ses décisions conformément à la loi.

Rien à voir avec Elisabeth Pognon du Bénin

Mais cette femme qui aime le pouvoir et ses privilèges n’a pas mis à profit sa longévité à la tête de la Cour pour en gommer l’image négative née de la proclamation des résultats de l’élection présidentielle de décembre 1993. Ces résultats avaient été proclamés précipitamment et nuitamment, alors que plusieurs provinces, dont l’Estuaire, étaient encore en train d’effectuer le dépouillement des votes qui allait révéler la victoire de Paul Mba Abessole ! Au contraire, «d’année en année, élection après élection, l’institution qu’elle dirige s’est engouffrée dans les choix politiques et familiaux, au lieu d’être guidée par l’objectivité, impartialité, et l’intérêt supérieur du pays». Rien à voir avec Elisabeth Pognon, le président du Conseil constitutionnel du Bénin dans les années 90 !

L’un des juges constitutionnels actuels estime que «c’est une femme sous pression qui ne fait que ce que le haut-lieu lui demande de faire». Un de ses collaborateurs affirme, pour l’amender, qu’elle a souvent peur pour sa sécurité, et «elle se voit ainsi obligée de jouer le jeu». Mais le dire comme ça est tout de même symptomatique d’une certaine légèreté !

Son mandat actuel prendra fin en octobre 2019. D’ici-là, elle va examiner les recours liés aux élections législatives de décembre prochain (dans deux mois), et ceux liés aux élections municipales et départementales de décembre 2018 (dans deux ans).
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