Alors que le Gabon se trouve dans l’impasse, en raison d’un contexte de répression des opposants et des acteurs majeurs de la société civile, Ali Bongo appelle à un «dialogue politique». Mais le chef de l’Etat n’a pas encore visiblement mûri la question de ce dialogue. En effet, lors d’une interview à Radio France International (RFI), dimanche matin, Ali Bongo n’a pas su en préciser les contours face à l’envoyée spéciale de cette radio, Carine Franck.
La période est à la répression, à des arrestations arbitraires, à des menaces et intimidations de la part du pouvoir. Léon-Paul Ngoulakia, ancien candidat à l’élection présidentielle avant son ralliement à Jean Ping, a été interpellé vendredi dernier et est actuellement gardé à vue. Alfred Nguia Banda, président d’une formation politique, le Rassemblement Républicain et Socialiste (RRS), qui a soutenu le candidat consensuel de l’opposition, est lui aussi aux arrêts, tout comme à Port-Gentil, où un des leaders de partis ayant soutenu l’ancien président de la Commission de l’Union africaine, Féfé Onanga, du MPR, est détenu depuis vendredi. Peu avant eux, Jean-Rémy Yama, président de la confédération syndicale Dynamique Unitaire, Firmin Ollo, Cyr Koumba Mba Essiane, et l’ancien député Bertrand Zibi Abéghé, avaient été interpellés et écroués à la prison centrale de Libreville. Sans oublier toutes les menaces qui pèsent sur Jean Ping et sur plusieurs de ses soutiens. Le pouvoir en place à Libreville fait dans la rigidité, la force et la répression.
C’est dans ce climat qu’Ali Bongo déclaré vainqueur par la Cour Constitutionnelle dans la nuit de vendredi à samedi décide d’appeler à un dialogue avec l’opposition. Plutôt bizarre, «plutôt contradictoire», lui a fait remarquer Carine Franck, l’envoyée spéciale de RFI à Libreville qui lui a demandé «avec qui comptez-vous organiser ce dialogue ?» alors que des opposants sont arrêtés. A cette question, Ali Bongo répond : «je tiendrai ce dialogue avec ceux qui accepteront la main que je tends, et nous avons des contacts».
La journaliste de RFI, quelque peu surprise par cette réaction, rétorque : «pour l’opposition, ce n’est pas le moment de tenir un tel dialogue», et là Ali Bongo va un peu maladroitement, comme à son habitude, va répondre : «j’avais dit que je tiendrais un dialogue après l’élection, et c’est ce que je fais aujourd’hui». Savait-il déjà que la Cour Constitutionnelle le proclamerait vainqueur ? Puis, à une autre question : «de quoi allez-vous parler au cours de ce dialogue ?». Ali Bongo hésite, et Carine Franck poursuit : «Parlerez-vous d’un gouvernement d’union nationale, d’un gouvernement d’ouverture ?», et là l’ancien ministre de la Défense indique qu’il s’agira, au cours de ce dialogue, de parler de «la réforme du système démocratique». Carine Franck conclut en demandant si on y parlera du mandat présidentiel qui pour le moment est illimité, Ali Bongo répond : «oui, tout sera sur la table».
En fait, le sentiment qu’Ali Bongo a donné tout au long de cette interview, c’est qu’il ne savait pas vraiment sur quoi doit aboutir le dialogue qu’il souhaite.
En dehors de Gérard Ella Nguéma, Bruno Ben Moubamba et Pierre-Claver Maganga Moussavou, les autres leaders de l’opposition n’ont pas donné suite à la demande de dialogue lancée par l’ancien député de Bongoville.