L’appel au dialogue lancé par le chef de l’Etat restera sans doute lettre morte. Il est perçu par le camp de Jean Ping qui l’a décliné comme une tentative de faire l’impasse sur sa défaite à la dernière présidentielle.
Alors que le contentieux électoral est toujours examiné par la Cour constitutionnelle, le camp de Jean Ping a exprimé son étonnement face à l’empressement du vainqueur contesté de cette élection à aller au dialogue. Pour le président de la commission communication de l’équipe du candidat de l’opposition, il s’agit, en réalité, d’«une manœuvre désespérée» visant à faire oublier à la communauté internationale qu’Ali Bongo «a instrumentalisé les forces de sécurité et de défense, pour assassiner des Gabonais aux mains nues». Pour Jean Gaspard Ntoutoume Ayi, bien que faisant cet appel, «monsieur Ali Bongo ne fera pas oublier au peuple gabonais et à la communauté internationale que c’est la Garde républicaine qui a donné l’assaut au QG de monsieur Jean Ping et tué de nombreux gabonais».
Derrière ce qui est qualifié de curieux appel au dialogue, le camp de Jean Ping croit également avoir décelé la volonté d’Ali Bongo de «signifier au peuple gabonais et à la communauté internationale son intention d’interrompre le processus électoral ou de forcer la décision de la Cour constitutionnelle». Sinon, comment comprendre une telle initiative, et davantage une telle confusion entre le chef de l’Etat et le candidat à la présidentielle ? Dans le camp de l’ancien président de la commission de l’Union africaine, l’on accuse à nouveau les institutions républicaines d’être plus que jamais soumises à la seule ambition de celui qui a toujours craint l’idée d’un dialogue tout au long de son mandat.
S’il a présenté Jean Ping comme «une personnalité rompue au dialogue et convaincue de sa pertinence», Jean Gaspard Ntoutoume Ayi a justifié le refus du candidat de l’opposition à prendre part à celui sollicité par Ali Bongo par le fait que, depuis 2010, le président de la République «a toujours opposé une fin de non-recevoir» à tous les appels au dialogue national inclusif et sans tabou demandés lui ayant été adressés. Pour l’heure, disant ne pas trouver de légitimité à Ali Bongo pour réconcilier les Gabonais, l’opposition a réaffirmé sa volonté de voir la crise trouver une solution, soit par la reconnaissance de la victoire de Jean Ping, soit par «le recomptage des voix en présence d’une expertise internationale, au sein d’une commission paritaire, afin de lever toute équivoque sur les résultats définitifs» du scrutin. Ce à quoi les autorités gabonaises semblent ne pas souhaiter se soumettre, en dépit des appels de l’Union européenne, des Etats-Unis et de la France.